Carine-Laure Desguin a lu "Ma voisine a hurlé toute la nuit" d'Anne-Michèle Hamesse

Publié le par christine brunet /aloys

Anne-Michèle Hamesse, Ma voisine a hurlé toute la nuit, Nouvelles, Cactus Inébranlable éditions, 2016.

Dix portraits de femmes. Je me cale sur la banquette d’un bistrot, ce sera cool, je me dis. Le livre est léger, quatre-vingts pages, une récré. Lorsque j’ai acheté le livre au Grand Curtius de Liège (4ème Salon des petits éditeurs) voici quelques heures, je n’ai pas regardé la couverture, non, pas du tout. C’est le titre « Ma voisine a hurlé toute la nuit » qui a attiré toute mon attention. Il me semblait que je l’entendais crier, cette voisine. Et puis ce nom, Anne-Michèle Hamesse. Jamais rien lu de cette auteure, je ne connais Anne-Michèle Hamesse qu’en tant que présidente de l’Association des Écrivains belges de Langue Française. L’envie me prît donc de découvrir l’écriture de cette auteure publiée plusieurs fois aux éditions Luce Wilquin. Bien calée sur la banquette, je triture « Ma voisine a hurlé toute la nuit » et pan, mes yeux se rivent sur la couverture. Dans une semi-obscurité, une main féminine, un dos dénudé, quelques centimètres carrés d’une lingerie fine et de couleur noire. Cette photo est signée Claire Veys, auteure elle aussi puisqu’elle a publié un roman, Dizzy.

Dix portraits de femmes, des nouvelles. Première nouvelle, « Loterie ». J’ai envie de zapper l’histoire de cette paumée recueillie par sa sœur et qui gagne à la loterie mais je continue quand même et là, là, stupeur, ces dernières lignes, elles m’interpellent. Du noir de noir. Je relis le texte en entier, de la première jusqu’à la dernière ligne. Une écriture stylée, vraiment. J’oublie de siroter la Leffe que le garçon, silencieux devant ma totale immersion, vient de me servir. Car les neuf autres nouvelles sont du même acabit que cette « Loterie ». Des femmes écorchées, des femmes malheureuses dans leur mariage (ou leur célibat) ou des femmes qui donnent l’impression de vivoter plutôt que de vivre, d’être à côté de leur vie, oui, c’est ça, de vivre une vie à côté de leur vie. Mais croyez-moi, lorsqu’on lit ces dix portraits de femmes, on a envie de se secouer et de radiographier tout ce qui nous entoure. Elle est si courte parfois, et si bête aussi, cette vie. N’est-ce pas ? N’est-ce pas ?

Avec des mots justes et très bien aiguisés, l’écriture d’Anne-Michèle Hamesse est moins innocente qu’il n’y paraît. Les psychés des individus sont creusés, découpés, ciselés. Les caractères sont façonnés et je dirais même sculptés car on les imagine fort bien, ces femmes aux destinées chaotiques qui laissent supposer des pertes, des manquements, des souffrances, des amputations, des meurtrissures. Des océans de silence et des flaques de non-dits. Un silence pousse parfois un cri strident, le saviez-vous ? Une contradiction ? Oui, sans doute. Il en va d’ailleurs de ces contradictions dans chacun des textes de ce livre. Leur chute n’en appelle pas nécessairement à la raison ni à la logique. Et c’est pourquoi ces dix textes, je ne vous les détaillerai pas. Je vous les laisse découvrir.

Mon coup d’cœur cependant pour « Le papier gris ». Cerise, elle s’appelait Cerise. Un portrait de femme tout en finesse. Et quelle subtilité dans l’écriture d’Anne-Michèle Hamesse pour donner de la vie et de la tolérance à une histoire d’amour entre deux femmes.

 

 

Publié dans Fiche de lecture

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P
Même si ce sont des portraits de femmes, ce livre pourrait peut-être me plaire surtout si c'est noir de noir !
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P
J'ai vraiment envie de découvrir ce livre après cette belle note de lecture !!!<br /> Pourquoi pas en dégustant une Leffe ? ;-)
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M
Quand le lecteur se laisse happé et qu'à la fin une prise de conscience, un éveil s'opèrent ! Bravo à l'auteur et à Carine-Laure qui a su transmettre...
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M
Carine-Laure m'a communiqué son intérêt pour ces dix portraits de femme. J'ai hâte de découvrir l'écriture d'Anne-Michelle Hamesse, à qui je dois d'avoir pu présenter mon recueil de nouvelles "Nuageux à couvert" le 19 octobre dernier. je l'en remercie encore et je salue son empathie et son ouverture d'esprit.
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E
Toujours en attente chez moi mais quelle délicieuse attente (sauf les hurlements mais bon... :D )...<br /> <br /> Carine-Laure l'a lu d'une traite et commenté d'un trait!
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M
Une note de lecture qui donne vraiment envie de découvrir le recueil.
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C
Des portraits de femmes assez inattendus.
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