Marcelle Dumont a lu "Villa Philadelphie" d'Edmée de Xhavée

Publié le par christine brunet /aloys

 

J’AI LU VILLA PHILADELPHIE D’EDMEE DE XHAVEE


 

J’aime l’écriture d’Edmée de Xhavée. C’est une écriture de femme. Quand j’écris cela je ne veux pas du tout dire « couleur dragée » ou « poupon » toutes les trois pages. Non, c’est l’écriture élégante et juste d’une personne qui voit clair, mais connaît l’art de dire des choses délicates, comme sans y toucher. Elle n’insiste jamais, mais sait se faire comprendre sans tomber dans la vulgarité. Elle connaît admirablement l’univers de la famille bourgeoise, coincée entre la décence obligatoire et le désir impérieux d’assouvir ses passions. On dirait d’ailleurs que l’auteure ne peut se départir d’une légère ironie et d’un sourire très dédramisant.

Dans « Villa Philadelphie », c’est de cécité maternelle et de jalousie dévorante qu’il est question. On y voit une mère – par ailleurs excellente femme – prodiguer un amour plus profond et de meilleure qualité à sa fille aînée, alors qu’elle enveloppe la cadette d’une sorte d’affection condescendante. Elle n’en est évidemment pas consciente. La préférée en profite pour écraser sa sœur, en croyant se grandir. Sûre d’elle et de son pouvoir, elle en profite pour lui souffler son amoureux.

Toutefois les deux sœurs démarrent dans la vie bien dotées et vivent l’une à côté de l’autre dans des villas jumelles, mais la malédiction initiale continue à peser. Rosalie, toujours adulée par sa mère, a épousé l’homme qu’elle a choisi (et volé à sa sœur). Eveline – parce qu’il faut bien se marier – a hérité sans protester d’un mari égocentrique, laid et peu séduisant.

Il faudra toute une vie pour que les choses se renversent. Eveline trouvera la sérénité et le courage de disposer de sa vie, alors que Rosalie sombrera dans la folie lorsque sa séduction ne sera plus qu’un souvenir.

Dans « Les promesses de demain », une des nouvelles d’Edmée m’a fascinée. On y voit une mère incestueuse dépenser des trésors de ruse et de dissimulation pour protéger son secret. Et lorsque l’épouse dupée comprend enfin ce qui se passe et surprend les deux amants, il suffit de l’évocation du fils léchant la cheville de sa mère pour que tout soit dit. Bravo, Edmée ! Comme on est loin des descriptions pornographiques que nous infligent les images et la littérature d’aujourd’hui !


 

 

MARCELLE DUMONT

Publié dans Fiche de lecture

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P
Une très belle note de lecture !<br /> Une vision très juste du livre et de l'auteur ;-)
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M
Belle note de lecture, très fidèle à l'écriture d'Edmée ! "Villa Philadelphie" est très séduisante !
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S
Bravo pour ce touchant roman que la note de lecture de Marcelle met en valeur avec brio!
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E
Un grand merci à toi Marcelle, qui d'ailleurs m'a attirée par la même écriture "de femme". Et merci pour ton regard sur Villa Philadelphie où en effet je ne peux parfois que m'amuser un peu de l'innocence soigneuse avec laquelle de bons bourgeois évitaient ..."d'avoir les yeux en face des trous"... parce que la vérité, n'est-ce pas est parfois bien vulgaire. C'est le milieu auquel j'appartiens, et je l'aime tendrement, sans aucun mépris facile, mais je ne peux m'empêcher souvent de soupirer avec impatience... La vie est bien belle si on ose la vivre!
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J
Bravo à toute les deux, pour le roman et pour sa critique. :))
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M
Une note de lecture qui me semble très juste. Bravo Marcelle !
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