Edmée de Xhavée a lu "Mères indignes" de Luce Caron
J’ai lu Mères indignes de Luce Caron. Edmée De Xhavée
Sept nouvelles, sept mères. Indignes. En souffrance, éjectées de la vie qu’elles rêvaient et suffocant dans celle qui leur échoit.
Céline si seule et qui n’en dort plus d’être maman, assourdie par l’enfant et aveuglée par le regard qu’on porte sur elle, sur cette femme accompagnée de cris. Céline qui s’est perdue dans la solitude…
Aurélie, pas assez seule, elle. Entourée, encerclée de mari et enfants. Aurélie qui a dérapé, et ça ne pardonne pas, les dérapages. Contrôlés ou pas. Il faut faire face, il faut vraiment, mais vraiment aller respirer quelques bouffées de liberté et de calme…
Agnès et son ado en perpétuel séjour dans le virtuel. L’ado que l’on attend endormie sur le sofa, espérant enfin mériter son amour, son attention, son regard. Agnès invisible, inaudible. Ça finira mal, elle le pressent, si elle n’agit pas. Le poids infini de ce qu’il faut décider, on le sait, on le sent, mais aussi… cette voix qui avertit : il n’y aura pas de retour en arrière !
Elsa, qui s’est habillée un peu trop fleurie pour un enterrement, c’est vrai. Pour un éloge funèbre qu’on n’oubliera pas. On attend d’elle d’être celle qui ne fait que passer et qui, finalement, n’a rien de bien intéressant : elle n’est qu’une de ces nombreuses mères de famille qui travaillent. Pas de quoi fouetter un chat. Ni un chien…
Olivia, Olivia qui vient chercher sa grand-mère Simone pour le dernier adieu à Véronique, leur mère et fille. Des bribes du passé se bousculent. Comment à 10 ans, proclamée indépendante par sa mère elle avait été couronnée du rôle de gouvernante : café servi en rentrant de l’école, que mange-t-on ce soir, je vérifie ce que nous avons au frigo après les devoirs. C’est qu’elle avait tant besoin d’elle, cette mère, c’est qu’il ne fallait pas la laisser seule, l’abandonner pour d’autres compagnies… Aurore, l’amie intime, avait fini par ne plus donner de nouvelles, inexplicablement. Et cette mère boa-constrictor qui lui avait broyé la vie. Mais Simone fait la sourde oreille : mais voyons non, sa chère Vivi, sa chère Vivi… elle adorait Olivia, c’est automatique, une mère ne peut échapper à la joie d’aimer sa fille, voyons…
Caroline, elle a sombré et perdu. Certes, quelques bulles font du bien au moral, aident à fêter le fait que bébé s’est endormi. Le bonheur y est mort, dans les bulles. Et puis il y a cette journée de trop…
Sabine. Sa distraction les avait fait rire au début de leur vie commune, les avait tant amusés, son mari et elle. Et puis… c’est devenu une réalité trop importante dans leur quotidien, ça prend tant de place, cette vie nébuleuse en permanence, constellée d’oublis, de confusions, de courses pour rattraper le temps et la confiance, retrouver les objets, le fil des choses. Dans ce désordre, est-il encore possible de trouver où l’amour s’est caché ?
Chacune de ses femmes, nous l’avons approchée, l’avons été peut-être, en tout cas elle nous est familière. Chacune a sa souffrance, un mal maternel. On comprend cet émoi terrible et secret, et sans doute, on ne saurait que leur dire…
Edmée de Xhavée