La Mariée venue du pays des neiges, un poème de Françoise Castera
LA MARIEE VENUE DU PAYS DES NEIGES
Elle est venue de loin traquée par la famine
C’était un pays mort où tout tombait en ruine
A part quelques nantis le peuple était perdu
Ignoré exploité et tout espoir déchu
Elle espérait trouver amour et protection
Et donner en échange sa vie et ses passions
Que vive la mariée !
Miroitait dans ton rêve un homme beau et fier
Cet homme imaginé était imaginaire
Là-bas sur le tarmac il t’a paru tout autre
La langue que tu parles est bien loin de la nôtre
Et puis tu avais peur – tu es jeune et jolie
Il t’a suffi alors de prononcer un « oui »
Que vive la mariée !
Tu étais condamnée vivant dans le silence
Liée à tout jamais par ton obéissance
A subir ton mari, vivre ses exigences
Sans que rien ne t’apporte la moindre jouissance
Que de regrets en toi et combien d’inquiétude
Ta liberté ici n’étant que servitude
Que vive la mariée !
Tu n’avais pas prévu cet homme imprévisible
Tyrannique et lubrique dérisoire et risible
As-tu imaginé ces étreintes baveuses
Cet homme maladroit à la barbe râpeuse
La femme a deux fonctions : elle est bête de somme
Et sert à assouvir les pulsions de son homme
Que vive la mariée !
La mariée est malade et c’est la nostalgie
Qui peu à peu l’emporte lui rabotant la vie
L’homme n’est pas content il l’a payée trop cher
Qu’elle retourne à sa terre qu’elle retourne à la terre
Elle n’aura pas le temps de retrouver les siens
Elle n’aura pas le temps son pays est trop loin
Que meure la mariée !
Françoise Castera