Marie-Noëlle Fargier nous propose une poésie...
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J'ai écrit ce texte il y a de très nombreuses années quand les hospices existaient encore. Je le sors, oublié, dans un fond de tiroir. Ce genre de "lieu de vie" n'existe plus aujourd'hui. Et pourtant, face au manque de moyen humain que subissent les hôpitaux, les maisons de retraite..., et malgré le courage des personnels, je me demande si les plus défavorisés n'auront pas à nouveau à connaître ce mauvais sort.
Caressée par le Soleil
Dans ma robe fleurie
Tu es là mon Amour
Nos mains unies de nos cœurs en éveil
Mathilde est là aussi
Baignée de Lumière
Elle court, elle rit
Tu es là mon Amour
Ton regard si doux
Me protégeant pour toujours...
Une porte claque sans fin
Laissant apparaître un colosse vêtu de blanc
M'éblouissant d'une lumière hargneuse
Pas un mot, pas un chant
Un gant rude et glacé
Laboure ma peau...ridée
Maintenant je sais...
Un coup de serviette
Ce doit être la toilette
Ou plutôt le lavage
Qui rime avec mon âge
Endimanchée d'une moitié de chemise blanche
Cachée par un peignoir
Surmonté d'un bavoir
Costume de mes jours noirs
Mais pour ces jeunes gens
Il faut gagner du temps !
Le poids de mes Ans
Est envoyé sur un chariot roulant
Je suis véhiculée
A une allure de possédée
Mais pour ces jeunes gens
Il faut gagner du temps !
Dans la salle à manger
Ou plutôt à avaler
Autour d'une table
Hommes, Femmes, tous semblables
Devant un bol de café, dit au lait
Débordant de pain trempé
Où flottent des yeux nauséeux
Mais pour ces jeunes gens
Il faut gagner du temps !
J'ouvre la bouche devant une cuillère
Bourrée de cette odeur singulière
Autour de moi
Mon reflet multiplié
A croire qu'on a tous fait le même choix
Mêmes habits, mêmes petits-déjeuners !
Cette photographie pourrait faire rire
Mais, j'ai tellement envie de pleurer
Mes larmes refusent de couler
Pour alléger mon cœur
Mon corps est de cire
Dans ce musée sans fenêtre
Puis-je me reconnaître ?
Mathilde vient me visiter
Avec un air accablé
Elle, qui riait, embrassait sa maman
Avec un cœur débordant de sentiments
Nos fous rires au petit-déjeuner
Quand barbouillée de miel et de confiture
Elle m'offrait un baiser
Défaisant ma coiffure
Cette odeur de café et de lavande
Qui embaumait nos amours gourmandes
L'eau fraîche de la Fontaine
Qui réveillait nos vies si pleines
J'avais si fière allure !
Je ferme les yeux
Pour retrouver mon rêve merveilleux
Ma robe fleurie, mes chaussures vernies
Aujourd'hui je porte des chaussettes
Plus besoin d'emplettes
Mais pour ces jeunes gens
Il faut gagner du temps !
Le Temps, le Temps..........
Dieu qui m'a donné tous ces ans
Est-ce une faveur
D'Exister sans chaleur ?
Prends ma main, mon Amour
Emmène-moi vers un autre Jour
Où je serai en VIE
Me protégeant pour TOUJOURS.....