Carine-Laure Desguin nous propose une nouvelle en épisodes : Deux jours pour l’éternité - 5
Le lendemain matin, Franck se lève très tôt. Sur toutes les chaînes de télé, ce ne sont que des communiqués spéciaux toutes les heures. Aucune créature ne sort pour le moment des engins extraterrestres. Des militaires encerclent chaque vaisseau. On en compte actuellement une vingtaine, dispersés sur chacun des cinq continents. Aucun engin repéré à proximité des océans.
Franck Nussdorfer reste perplexe, son cas serait-il isolé ? Il a voulu contacter Oliver Lewis son ex-collègue. En vain, le numéro n’est plus attribué … Il prépare alors le petit-déjeuner. Gillian dort encore. Ni l’un ni l’autre n’a fermé l’œil durant la nuit. Ils ont discuté, cherché des réponses à une kyrielle de questions. Franck refusera l’hospitalisation proposée par les flics, pas question de subir des examens médicaux, de consulter un psy ou autre gus spécialiste du cerveau. Il se sent très bien. Il n’est pas fou.
L’ex-scientifique appuie sur le bouton on de la machine à café. Il n’y parvient pas. Rien ne se déclenche. Il essaie encore. Le bouton on semble avoir perdu de sa densité. Franck passe les mains sur l’entièreté de la machine. Toute la machine a perdu sa rigidité. Franck ressent alors au niveau de son thorax d’intenses vibrations. La veille, il avait éprouvé les mêmes sensations, mais plus modérées celles-là. Franck veut ouvrir une fenêtre, il se sent oppressé. La poignée de la fenêtre est elle aussi dans le même état de mollesse que la machine à café. Les vibrations de plus en plus soutenues impressionnent Franck Nussdorfer. Il porte à présent les deux mains sur son thorax qui lui aussi a perdu de sa densité. À proximité de son cœur, en zone sous-cutanée, il tâte une partie plus compacte de plus ou moins deux centimètres carrés. Une puce, pense-t-il, ils ont osé m’introduire une puce dans le corps.
Franck Nussdorfer découvre avec stupeur juste à côté de la machine à café un cercle parfait constitué de bulots. Leur coquille est entière, aucun éclat apparent. Les bulots commencent à vibrer. Franck n’en croit pas ses yeux. Ses idées s’éclaircissent. La peur à présent fait place à une immense sérénité. L’ex-scientifique commence à comprendre. Le souvenir des deux jours passés hors du temps terrestre lui revient en mémoire. Il entrevoit tout : l’intérieur immense d’un vaisseau multi-équipé, son corps anesthésié étendu sur une table chirurgicale et autour de la table, sept géants engoncés dans des combinaisons lumineuses d’un gris métallique. Ces êtres venus sans aucun doute d’un lointain ailleurs sont penchés sur lui et, de leur unique œil planté au milieu de leur visage émacié, ils examinent chaque membre du corps de Franck Nussdorfer. Leurs deux mains, prolongées par trois longs doigts seulement, pénètrent son épiderme et triturent ses organes.
Soudain le Terrien entend l’une de ces créatures briser le silence et murmurer, « Celui-ci est le premier, ce sera notre prototype. Il s’appellera Adam.»
FIN
Carine-Laure Desguin
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