ACTE 5 - Hors-série - Texte 6 - Ecrire un conte fantastique mystérieux
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Carnet de bord
Une tâche inachevée
10 juin 1969, 23h01, retour d’Angleterre. Je retrouve ma bibliothèque, la fraîcheur des livres, l’odeur du papier vieilli; cette sensation oubliée durant mon voyage. Une obscure lumière s’éclaire dans mon esprit comme le chemin à suivre.
J’approche de la fenêtre, je touche un carreau. De la buée se dessine autour de ma main. Dehors, une pluie chaude recouvre la ville de Venise. Le brouillard s’épaissit telle une brume qui m’envahit. Mais pourtant quelle chaleur ! Rien n’a changé et pourtant tout ! Les livres sont à leur place, la poussière les recouvre -encore et toujours cette même poussière qui m’était familière et chaleureuse, mais qui me paraît à cet instant froide et inquiétante.
Je fais quelques pas, le plancher grince sous mon poids, comme si mon long voyage avait enlevé à toute la demeure la sensation qu’émet une âme qui vie.
Et ces bruits ! Sûrement un oiseau cherchant à fuir cette lourde pluie. Le sifflement du vent me rappelle ces longues heures à marcher dans le froid. Je frissonne.
Cette maison me paraît tellement vide depuis le départ de père...Je tire un livre de l’étagère et ne peux réprimer un frémissement devant mes mains rougies, abîmées ! Je glisse mes doigts sous la couverture et en retire la photographie de l’enfant que j’étais riant aux éclats sur les genoux de mon père. Cette photographie, nous l’avions prise à son départ, devant le navire, son navire avec son équipage, envoyé en mission par le préfet de Venise en Égypte. Comme la vie était simple avant tout cela ! Pris de nostalgie, je me dirige pieds nus vers le miroir. Comme j’ai changé ! Vêtu de haillons, le visage pâle, amaigri et avec mes yeux rougis de fatigue, je n’ai plus rien de ce petit garçon. Je souris. Non ! Je n’y arrive plus !
Je suis parti petit garçon est revenu… Je ne sais plus ce que je suis à présent.
Mes sacs tombent de mes épaules affaiblies. Un bruit sourd s’en suit, résonnant encore aujourd’hui dans ma tête. Le choc avec le sol fait ouvrir la grande malle d’un seul coup. Un nuage noir s’en échappe et envahit la pièce. Je suffoque un instant et tombe roide.
26 mars 1965, je suis sur la coque du navire. Accroché au cordage, je regarde les voiles blanches secouées par le vent. Hier soir, l’équipage m’a découvert, moi le fils du capitaine, qui m’était faufilé en secret dans la cale du navire. Par chance, c’était trop tard pour me ramener sur la côte. Je n’ai plus qu’à laisser passer le temps jusqu’à l’Égypte. Quand, se dessine enfin, au loin, la silhouette de la terre égyptienne, l’ombre d’un nouveau continent, avec de grandes collines dorées, magnifiques et imposantes.
Jusqu’à lors, leur mission m’était inconnue, mais à peine avons-nous abordé, qu’un flot d’ennemis -il n’en reste dans mon esprit qu’une floue superposition de cris et de mouvement- s’emparent du bateau. Je sens qu’on me tire de ma transe, mon père me cris quelque chose-à mes oreilles qu’un message incompréhensible- et me remet aux mains d’un matelot qui quitte la côte avec quelques membres de son équipage.