C'est tout... Une nouvelle de Bob Boutique
C’est tout
Il était une fois un gars qui se regardait en gros plan dans le miroir de la salle de bain. Non pas pour examiner les poils de son nez ou péter ses points noirs, mais admirer sa nouvelle denture ! Une merveille… 4.500 euros en Tunisie, hôtel et infirmières compris, pour 40 ou 50 dents en porcelaine.
Il sourit et re-sourit, de face, de côté, en reculant d’un mètre, à dix centimètres de la glace… et ses yeux brillent de joie. Y’a longtemps qu’il ne s’est plus vu aussi beau. Lui qui ne riait jamais à gorge déployée et mettait une main discrète devant sa bouche lorsqu’il devait prononcer… le voilà aux anges. Pour peu, il léviterait de bonheur.
Pourtant le mec n’avait pas des dents pourries. Non. Elles étaient même très correctes, mais dans sa profession : présentateur du journal télé de la Une, en prime à 20h00… il était temps, grand temps de faire l’investissement. « Cette fois-ci Angèle, tu peux repasser. Même en couchant avec Bernard tu ne réussiras pas à piquer ma place ! Les p’tites vieilles m’adorent et les femmes d’âge mûr m’envoient des sacs entiers de courrier… »
Angèle Ridelle, une grande blondasse prête à tout (si vous voyiez Bernard vous comprendriez) pour faire son trou, sans jeu de mot. Quand on pense qu’elle était Miss Charleroi il y a dix ans, avec un diplôme de coiffure, et qu’elle présente aujourd’hui le 13 heures !
Bon, si on veut être tout à fait objectif, il faudrait ajouter que notre dentiste ne vaut guère mieux. Après tout, il a mis six ans pour saccager ses trois années d’économie et sa réussite, il la doit plus à son charme (incontestable) et ses amis politiques qu’à son QI.
Soit. On n’est pas là pour philosopher mais pour raconter une histoire. Même qu’elle démarre à l’instant avec le bruit sec de la boite aux lettres qui se referme derrière le facteur.
***
Jean Dierickx (c’est le nom de notre héros, si on peut appeler ça un héros) traverse le couloir et ramasse le courrier qui s’est répandu sur le sol. Il reconnaît tout de suite les logos d’ Electrabel et Belgacom et jette les plis sur la tablette du meuble miroir. Des factures de gaz et de téléphone ou plus exactement des rappels qu’il faudra bien payer un jour ou l’autre.
Puis son œil encore avachi du matin s’arrête sur une enveloppe allongée de couleur brune qui semble légèrement renflée. Il la ramasse, la soupèse (elle contient des documents), note qu’il n’y a pas d’expéditeur au verso et se décide enfin à l’ouvrir, avec les doigts, en arrachant le rabas.
On dirait un truc publicitaire avec des billets de monopoly, genre ‘vous êtes notre millionième client et recevez à ce titre ces bons cadeaux qui… ». Il s’apprête à déchirer le folder lorsqu’un détail arrête son mouvement en l’air…
C’est que ces billets ont l’air vachement vrais. Ils reluisent légèrement et il reconnaît, la gorge nouée, le petit hologramme qui change d’image lorsqu’on incline la coupure. En plus, les biftons sont verts, comme ceux de 100 euros ! Ses doigts tremblent tellement qu’il met un temps fou à extirper le pactole de l’enveloppe.
Dix. Dix billets bien propres et repassés qui semblent sortir tout droit d’un distributeur. Mille euros.
Il y a une lettre, pliée en trois.
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Cher Monsieur,
Je suis très riche. Et je m’ennuie.
Cet argent, vous pouvez le garder. Mais je suis prêt à renouveler cette somme si vous acceptez de me rendre un petit service. Trois fois rien pour vous, appréciable pour moi.
Je m’explique.
Nous avons formé sur internet un groupe très discret qui se lance des paris. J’ai assuré pour ma part que vous vous gratteriez l’arête droite du nez à la fin du journal de demain dimanche, juste après votre proverbial :’ je vous souhaite bien le bonsoir’.
C’est tout.
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C’est tout ! Il en de bonnes celui-là… mille euros, ça ne se trouve quand même pas sous les pattes d’un cheval et puis ( franchement dit ) ça vient bien à point. Car si un présentateur-vedette gagne pas mal d’argent, même à la télé belge, il en dépense tout autant, sinon plus.
Un exemple : sa grosse Audi Quattro lui coûte un pont et traîne chez son concessionnaire depuis deux jours parce qu’il y a une note de 750 euros à payer. Et puis ces rappels… le deuxième pour le gaz… si ça continue ces emmerdeurs vont le couper et il reçoit samedi… même qu’il a dû engager un traiteur vu que sa femme s’est barrée il y a un an.
Mille euros ! Il les contemple alignés en éventail sur la tablette de marbre et sait déjà qu’il va les garder.
Se gratter le nez face à la caméra, même subrepticement, c’est pas très professionnel. Mais bon… l’émission ne va pas dégringoler à l’audimat pour ça. Il y aura du courrier, c’est sûr. Des bobonnes amoureuses qui lui enverront des mouchoirs brodés et l’un ou l’autre mauvais coucheur qui se permettra une remarque sarcastique… bref, du tout-venant.
En revanche, il se demande si ‘le gars qui s’ennuie’ lui enverra bien le complément ? Mille euros de plus… exactement, à quelques cents près, la somme que l’avocat de son ex réclame pour la pension alimentaire en retard… chienne de vie.
Il ramasse d’un geste large de croupier les billets qu’il glisse dans le tiroir du meuble et se dirige en sifflotant vers la cuisine où coule le café. Voilà une journée qui commence bien.
***
« Madame, Mademoiselle, Monsieur, Je vous souhaite bien le bonsoir… »
Il porte rapidement un index furtif sur l’arête du nez puis rassemble les papiers de l’émission, tandis que le générique de fin résonne dans son oreillette. Un coup d’œil sur le moniteur pour noter qu’il n’est plus à l’antenne, il se lève en vérifiant discrètement autour de lui si quelqu’un a relevé son geste.
Non. Les électriciens éteignent les spots tandis que dans l’aquarium en face, Fred discute en riant avec le technicien du son qui rabat les curseurs de sa table de mixage. Marie est penchée au dessus de son épaule et on distingue les trois quart de son sous-tif par l’échancrure du pull. Tout est normal.
« Je t’offre un café ? » lui demande le secrétaire de rédaction qui le rejoint dans le couloir, « j’en ai appris de belles sur la prochaine saison… » et patati et patata. Jean Dierickx rayonne. Personne n’a rien remarqué et il vient de gagner mille euros de plus. Enfin… si l’autre tient parole.
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Lundi, rien. Si… son relevé Visa qui le fait sursauter. Quoi ? Il a dépensé mille deux cent cinquante euros le mois dernier ? Mais à quoi et comment ?
Il parcourt rapidement le listing : un resto avec sa mère… une nouvelle paire de godasses… un caddy de bouffe… ha oui ! Merde ! Ce bar où une polonaise ou une ukrainienne lui a bourré la gueule au champagne. Six cent cinquante euros ! Il s’est fait avoir comme une bleusaille. Et dire qu’il ne l’a même pas sautée…
« Quel con ! » hurle t-il au miroir du corridor.
Mardi, rien. Un charter de pubs et une carte postale de sa sœur qui fait la crêpe sur les plages du Maroc.
Mercredi…
Là… sur le carrelage, parmi les autres lettres, une enveloppe brune allongée et vaguement rembourrée. Il se précipite, déchire frénétiquement le pli sur sa tranche et découvre avec un ‘yeah !’ triomphant les dix billets verts soigneusement rangés.
Il y a un mot…
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Cher Monsieur,
C’était très bien et mes amis ont trouvé ça amusant. Ils ont payé immédiatement leur dette de jeu. Merci.
Deux d’entre eux, et non des moindres, ont cependant émis un doute… était-ce bien le geste annoncé ou l’effet du hasard ? J’ai repassé l’enregistrement et doit admettre que votre mouvement fut très rapide, presqu’anodin.
Puis-je vous demander de bien vouloir le répéter dimanche en grattant très clairement l’arête de votre nez et ce, ‘ avant’ votre traditionnel « Je vous souhaite bien le bonsoir ».
Vous recevrez bien évidemment mille euros supplémentaires.
C’est tout.
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Ben, y’a même pas de question à se poser. Il va le faire. Point. D’abord filer à la banque régler cette connerie de pension… et puis…
Non.
Il va payer la moitié. L’avocat hésitera à ester en justice et réécrira une nouvelle sommation... Autant de temps gagné et ça la fera chier des barres. Un prêté pour un rendu… quand il songe qu’il l’a emmenée à Venise, avec les gondoles, le p’tit resto et les joueurs de mandolines alors que (mais ça, il ne l’a su que plus tard) elle le trompait déjà avec ce machiniste de studio moulé comme un dieu.
Cinq cent euros. Bien suffisant pour cette espèce de Bimbo sur échasses.
Les cinq cent restants, ce sera pour Axelle… une splendide rouquine incendiaire qui vient d’entrer au secrétariat de la rédaction et à qui il a promis un week-end de rêve sur la baie de Somme.
Quelle gonzesse, les amis… une bombe ambulante. Pour elle, il serait prêt à fourrer son index dans une narine devant 657.323 ( dernier chiffre de l’audimat) téléspectateurs et trices. Et même se moucher tiens…
Quant aux milles euros qui arriveront le mercredi suivant ( il n’en doute plus, ‘le riche qui s’ennuie’ est un mec réglo )... On verra. C’est pas les projets qui manquent.
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« Hey Jean… contrôle-toi un peu mec ! Tu aurais pu attendre le générique avant de te gratter le pif ! Déjà dimanche dernier, si je me souviens bien… » Fred l’entoure de son bras protecteur et l’entraîne dans le couloir de l’étage vers la cafet…
« Bonsoir Jean… » ( c’est Miss Charleroi maquillée comme une geisha de bande dessinée qui sort à l’ instant du bureau des journalistes ) « t’avais une ‘tit chatouille ? ». Elle file déjà en ondulant du croupion vers le studio.
« t’avais une ‘tit chatouille… » l’imite Jean Dierickx dans son dos. « Mais qu’ est-ce qu’elle fout ici ? »
« Elle a un billet dans l’émission de Chenal… une critique littéraire ou un truc du genre ! »
« Littéraire ? Mais elle n’a jamais rien lu de sa vie à part le catalogue de la Redoute ? »
« Laisse tomber, ca vient de Bernard himself ! » et son copain imite furtivement le geste d’un gars qui baise une nana. « T’as déjà pensé à ma proposition de journal en duplex… »
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Le fond de l’air est doux. Très doux. Une brise légère qui s’insinue dans le col de la chemise. Une lumière crue fait briller les serpentins d’eaux qui ondulent paresseusement entre les bancs de sable abandonnés par la marée basse. La vue est superbe depuis la terrasse de l’hôtel du Crotoy (ils se sont pas foulés pour le nom) qui surplombe le muret de la digue. Mais notre présentateur n’est pas du tout subjugué par la baie de Sommes. Non, il râle des barres.
Sur la table en fer à côté du plateau des boissons, une paire de jumelles pour apercevoir des phoques qui semblent avoir décidé, tous en même temps, de retourner au Groënland. Pas un seul en vue… Quand il pense qu’il a passé une heure hier soir à les étudier sur internet, histoire d’épater la rouquine.
‘On y va en amis, rien de plus…’ avait-il expliqué, genre cool, sympa. Et la conne l’a pris au mot. Même pas un patin ! En plus elle a ses règles, plein de boutons sur le front et lui raconte depuis une heure en pouffant comme une gamine ses aventures de collège dont il n’a vraiment rien à fouttre. Mais alors là… vraiment rien à branler. Si encore cette expression donnait des idées à la belle. Même pas.
Mais il sait se tenir, sourit de toute sa nouvelle denture, hoche de la tête, fait semblant de la trouver très amusante, alors qu’il s’emmerde à du cent à l’heure. Dont coût, jusque maintenant, 14h12… il fait rapidement le calcul… quatre-cent vingt euros… quatre-cent trente avec la dame blanche qu’elle vient d’avaler en riant aux éclats.
A ce prix la, une put est vachement plus efficace…
« Chiche qu’elle me dit… » poursuit la ‘tit secrétaire toute fière et pimpante de son tête à tête avec le beau Monsieur Dierickx. Elle lui prend le bras… « hé bien je l’ai fait… tu te rends compte ? »
« Pas possible ! » s’ exclame t-il en feignant l’admiration. Tout en pensant qu’il va écourter cette escapade et inventer un coup de fil urgent… inutile de payer deux chambres d’hôtels supplémentaires ( deux, pas une , deux…) pour les couilles du pape. Elle est bien gentille, mais faut pas abuser, hein !
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Lundi, rien. Normal.
Mardi, idem. Normal.
Mercredi… là, sur le carrelage, l’enveloppe brune légèrement renflée. On résume, ou alors pour les détails vous relisez les paragraphes plus hauts.
Il prend les mille euros avec des étoiles de concupiscence dans les yeux, passe par la cuisine pour enlever le thermos de la machine à café et va s’installer avec une tasse, un paquet de biscuits et des petits chocolats dans le canapé du salon, où il déplie la lettre qui accompagne l’envoi.
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Cher Monsieur,
Je suis satisfait. Vous avez convaincu mes amis et j’ai récupéré sans problème avec intérêts l’argent que je vous ai versé.
Ce pari les a tellement amusés qu’ils m’ont proposé de pimenter le jeu en vous priant d’arborer un vêtement de leur choix. Je ne vous cache pas que j’ai hésité, car je n’ignore pas que vous êtes tenu de porter des costumes de marque, dont le fournisseur apparaît dans votre générique de fin.
Nous avons négocié et choisi de nous en tenir à une cravate de couleur unie, d’un vert pâle très élégant.
Les sommes engagées seront évidemment beaucoup plus importante, aussi n’ai pas voulu me décider avant d’avoir votre accord. Si vous êtes prêt à jouer ce jeu bien inoffensif, croisez les doigts lors de votre prochain journal, juste à l’ instant où vous lancerez votre habituel ‘je vous souhaite bien le bonsoir’.
Nous passerons alors à des versements de cinq mille euros.
C’est tout.
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Cinq mille ! Cinq mille euros !
La feuille de papier tremble entre ses doigts… il passe une paume hésitante sur un front en sueur, s’humecte des lèvres desséchées malgré le café, qu’il dépose sur la table au risque de verser… Il rêve là, c’est pas possible, il va se réveiller…
Cinq mille… l’ acompte de la cuisine équipée dont il reporte l’achat de mois en mois, alors qu’il en a signé le bon de commande à Batimat pour obtenir le fameux rabais de trente pour cent !
Ce mec est fou, fou à lier… mais il en connaît d’autres.
Forcément, dans ce milieu désaxé qu’est la télé, on finit par fréquenter tout le monde et les langues se délient... on raconte, on exagère, mais ça rumeure quand même ! Ce ministre qui prend un hélico de l’armée pour aller faire du ski avec bobonne dans les Alpes… Ce parvenu qui s’achète une Ferrari pour tourner dans le parc du château, car à l’extérieur les voyoux risquent de la griffer… ou encore cette rombière pleine aux as qui va s’acheter un diamant à Anvers, chaque fois qu’elle déprime parce que son chat refuse de manger…
Non. Que ce mec joue au poker avec des goldcards ne l’étonne pas outre-mesure. Mais qu’il puisse, pour une fois, s’asseoir à leur table, ça oui… Ces rupins sont rarement partageux.
***
« Mais tu es tombé sur la tête Jean ! Tu sais fort bien que c’est impossible… » William fait trembler ses doigts en l’air comme une folle, ce qu’il est par ailleurs. « Tout ce que tu portes au journal se retrouve dès le lendemain en vitrine dans nos boutiques… et du vert en plus ! Pourquoi pas du kaki à pois roses ? C’est pas du tout à la mode… »
Il picore nerveusement dans une assiette de haricots verts croquette et manque de renverser son ballon de gros rouge. Le snack est bourré et il y règne un tel chahut qu’ils pourraient se hurler à l’oreille sans que les convives des tables voisines ne comprennent le moindre mot. Pour la plupart des collègues de la télé.
« D’ailleurs le vert est interdit sur les plateaux, ça aussi tu le sais. Ca porte malheur… c’est comme la corde au théâtre.
« vert pâle. Will… pâle ! »
« Vert c’est vert… » puis, les yeux dans les yeux, la fourchette suspendue… « Et puis c’est quoi cette idée de cravate ? Encore une gonzesse que tu veux épater ? »
« Un cadeau de ma tante Emma. Je ne sais pas ce qui m’a pris, mais je lui ai promis… et tante Emma, on-ne-la-dé-çoit pas. D’autant plus que je suis son héritier préféré, qu’elle approche des nonante ans et qu’elle veut me coucher sur son testament ! Tu veux un dessin ? »
« Ecoute Jean, tante ou pas (rigolo quand on y réfléchit à deux fois)… je ne peux rien faire. On vient de sortir une nouvelle collection et elles sont toutes rayées dans des tons parme et brun… je t’aime bien, mais là, franchement… c’est pas possible. J’sais pas moi, fais lui coucou sur l’écran ! »
Notre présentateur vedette appelle le serveur occupé à l’autre bout de la salle, élève à bout de bras le pichet de vin presque vide, s’essuie les lèvres avec la serviette et repart à l’attaque.
« Bon, on recommence à zéro. Supposons… (je dis bien, supposons !) que tu trouves un billet de cinq cent euros, là sous la table, à tes pieds… personne ne semble avoir perdu quelque chose, le brouhaha se poursuit normalement… bref, c’est pour toi. Cinq cent euros. Qu’est-ce que tu en ferais ? »
« On passe du coq à l’âne là… »
« T’occupes… qu’est-ce que tu en ferais ? »
« Cinq cent euros ? »
« Cinq cent. »
« Ben… j’sais pas. C’est déjà une belle somme ça ! Ah si, j’offre un voyage surprise à Bruno… Venise ! »
« Parfait, tu peux réserver une date. »
« … »
Il le regarde les yeux ronds, comme deux boules de billard, une croquette piquée à deux centimètres de la bouche.
« Ben oui, je t’offre cinq cent euros… là, tout de suite, je te les glisse discrètement sous la table ! »
« Mais t’es complètement à la masse ! »
« Au contraire, Will… j’ai une tantine de nonante ans qui va passer l’arme à gauche et m’a demandé de la conduire chez le notaire mardi prochain. J’lui fais cette fleur et j’ hérite de trois maisons. Trois ( il lui tend trois doigts sous les yeux ). C’est plus clair comme ça ? »
William replonge dans son assiette, tournicote pensivement avec son couvert dans les légumes, se gratte la tignasse, puis…
« On pourrait… imagine que deux minutes avant de passer à l’antenne, tu renverses une tasse de café sur la cravate que j’ai déposée dans la loge… »
« Mais t’en a toujours plusieurs avec toi… »
« Oui, mais j’ai disparu… je suis parti aux toilettes… ou n‘importe où… bref, on ne me trouve pas… on t’appelle… la pub se termine… ils vont lancer le générique… Alors tu fonces avec ‘ta’ cravate. » Il relève son visage un peu efféminé et le contemple d’un œil taquin aux cils légèrement noircis au mascara.
« Ouai, ça pourrait marcher. »
« A condition que tu téléphones toi-même à Garnier pour expliquer… et… que tu lui offres, par exemple, de passer à l’ouverture de notre prochaine boutique de la rue Neuve. »
« C’est réglo… touche ! » Ils se frappent dans la paume des mains et autour d’eux y a des regards étonnés qui se croisent, pour retourner aussi vite à leurs steak-frittes. Chacun ses oignons.
(...)
Bob Boutique
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