"Le cycliste urbain", un nouvel article du dictionnaire post-philosophique de Didier FOND
DICTIONNNAIRE POST-PHILOSOPHIQUE
LE CYCLISTE URBAIN
« Si on disait du mal ?... » (1)
Le déplacement à bicyclette ne date pas d’aujourd’hui et est, à l’origine, quelque chose de tout à fait valable et respectable. Malheureusement, depuis quelques années, ce qui était autrefois réservé à des gens sachant utiliser un vélo et rouler correctement en ville est devenu, par la grâce de certaines municipalités, une facilité offerte au premier abruti venu qui ignore les rudiments de la circulation.
Le cycliste urbain en général se divise en deux catégories :
- La première, sur laquelle il n’y a rien à dire, intègre les gens qui ont compris qu’on ne peut pas faire n’importe quoi sur un deux roues, qu’il y a des règles à observer et que le code de la route s’applique à tout le monde, y compris à eux. Ce sont ce que nous nommerons les « cyclistes urbains pourvu d’une intelligence normale, voire supérieure. »
- La seconde, sur laquelle nous allons nous étendre, a un nombre d’adhérents formidablement plus élevés que la première. Constatation déprimante, parce qu’elle sous-entend de graves problèmes quant à l’intellect d’une grande partie de notre population, notamment entre 20 et 35 ans, âges les plus touchés par la stupidité rédhibitoire.
Un bon exemple valant mieux qu’un long discours, nous allons évoquer le cas de la bonne ville de Lyon qui a eu l’idée (vite piquée par Paris) de mettre des deux roues à disposition de tout un chacun. Excellente idée sur le papier, et remplie d’implicites écologiques. L’huile de genou pollue moins que le diesel et son odeur est moins forte et moins désagréable (à voir) que celle des gaz d’échappement.
Néanmoins, néanmoins, dirons-nous, le « velov » n’est pas, à y regarder de plus près, une SI bonne affaire. Pourquoi ? Mais parce que n’importe qui -et surtout ceux dont le QI ne dépasse pas le 50- peut emprunter un vélo ou décider d’acheter un vélo, ou se rappeler qu’il/elle a un vélo pourri dans sa cave qui ne demande qu’à resservir. Finalement, on se retrouve devant le même problème que celui qui hante les grands cerveaux de l’Education Nationale : la massification. Et forcément, la chute de la qualité.
Le cycliste urbain catégorie 2 possédant l’intellect d’un chou-fleur ignore :
- Les feux rouges : Il n’en a jamais vu de sa vie et pense que c’est encore une invention du PC pour se faire remarquer ; donc il est hors de question qu’il jette un soupçon de regard à cette chose malsaine.
- Les sens interdits : Il se dit que c’est une jolie décoration. Mais pourquoi n’en avoir mis que dans certaines rues ?
- les priorités à droite : L’abstraction est trop difficile. Et après le PC, la droite ! Et puis quoi, encore ?
- Les « cédez le passage » : Mais pourquoi avoir tracé ces bandes sur la chaussée ? Ça, c’est salir la ville pour rien. Son ego écolo se révolte.
- Les divers panneaux routiers jalonnant son chemin : Il trouve que les images sont jolies mais ne comprend rien au texte quand il y en a un : forcément, il sait à peine lire. [Oh, que c’est méchant, ça !]
- Pour celui qui utilise son propre vélo, qu’il vaut mieux avoir une lumière au cul pour circuler la nuit : Etant lui-même une lumière, sa personne devrait suffire.
Le cycliste urbain cat. 2 roule de préférence au milieu de la chaussée, en zigzaguant de son mieux, le nez en l’air, et traverse les carrefours sans faire attention à ce qui se passe autour de lui. Quand il estime que la rue ne lui suffit pas, il envahit les trottoirs et fonce au risque de renverser le premier obstacle venu, que ce soit Vénus en personne ou Miss Tick.
Le cycliste urbain cat. 2 se prend pour un grand sportif : c’est pour cela qu’il ignore les règles élémentaires du code de la route. D’ailleurs, il ne fait que suivre les préceptes du Président d’une association d’usagers de bicyclettes, interviewé sur une radio quelconque et qui, en deux phrases, n’a pas peur de se contredire complètement. 9 h 10 : première phrase, mémorable : « faire du vélo est un véritable sport qui développe les muscles et l’endurance et c’est ça qui est bien dans ce moyen de transport. » 9 H 13 : deuxième phrase : « Les cyclistes ne peuvent pas s’arrêter aux feux rouges parce que redémarrer demande un trop grand effort physique. » (Véridique et sans commentaire.)
- Le cycliste urbain cat. 2 a sa fierté : on ne lui barre pas le passage impunément. Il vous insulte si votre voiture le frôle de trop près et vous insulte si vous avez l’outrecuidance de prétendre passer quand vous avez le feu vert et qu’il arrive à toute allure sur vous alors qu’il a le feu rouge et que freiner et surtout s’arrêter, c’est beaucoup trop lui demander.
- Le cycliste urbain cat. 2 hait les voitures qui puent, polluent, font du bruit, l’empêchent de respirer correctement (ce en quoi il rejoint le jogger), de circuler librement, bref, lui pourrissent la vie ; mais heureusement qu’il a la sienne pour partir en vacances.
BREF :
- Le cycliste urbain cat. 2, sans doute las de la vie, fait tout pour se faire expédier au cimetière avant son heure. Et gageons qu’il saura encore protester auprès de Saint-Pierre ou de Messire Satan, arguant que « c’est la faute de l’autre » s’il se trouve à cet endroit. Seul problème dans ce séduisant programme suicidaire : quiddu malheureux qui, sans le faire exprès, l’aura envoyé dans l’autre monde ? (Ou moins démoralisant : à l’hôpital ?) Ne parlons pas des assurances, là, le casse-tête devient trop abominable, mais du remords qui pourrait l’envahir alors qu’il n’est nullement responsable de la connerie du mort ?...
Conclusion : Engeance à éviter à tout prix.
(1) Merci Giselle et Lucienne.