Michel Beuvens nous propose "Petites réflexions sur un grand mystère"

PETITES RÉFLEXIONS SUR UN GRAND MYSTÈRE
Lorsqu’on écrit, on utilise des jumelles, une loupe et un microscope . Des jumelles pour suivre le fil de son histoire, une loupe pour vérifier le sens des phrases que l'on écrit, et un microscope pour contrôler l'orthographe ou la typographie, le plus difficile étant de s’empêcher de passer sans cesse d’un outil à un autre.
Mais à force de l'examiner ainsi, on finit par s’interroger sur l’objet sur lequel on focalise : est-ce une chose que l’on crée, ou est-ce une chose qui existait et que l’on découvre ? Car parfois, il y a des mots ou des idées qui semblent venir de l’extérieur. Ça arrive tout d’un coup, on dirait que ça sort du clavier, comme si l’idée était à l’affût et s’imposait sans nous demander notre avis : ce seraient des lectures anciennes, des influences accumulées, des rencontres oubliées qui s'activent en coulisses et profitent d'une ouverture pour revenir sur scène avec des habits neufs ? Et à d'autres moments, c’est la recherche active, la réflexion, l’exploration de la mémoire qui livrent les mots désirés et élaborent une nouvelle construction : ce serait la véritable création ?
Alors ? Écrire : création ou découverte ? Est-ce l'une ou l'autre ? Ou font-elles chacune une partie du travail ? Mystère... Mais, de toute façon, on n'est jamais entièrement l'auteur de ses écrits : un auteur est un « inventeur », mais au sens d'inventeur d’un trésor : « personne qui trouve par hasard un trésor sur le terrain d’autrui et qui acquiert ainsi le droit d’en posséder la moitié ».