FUNÉRAILLES, un texte signé Louis Delville
FUNÉRAILLES
Depuis plus d'un siècle, ma famille travaille dans les pompes funèbres. Avant on parlait de croque-mort, mais cela est tombé en désuétude.
Nous possédons un beau et grand magasin juste en face de l'hôtel de ville Un endroit stratégique à n'en pas douter !
Le pire pour nous, c'est quand quelqu'un de la famille passe l'arme à gauche. Imaginez-vous : fournisseur et client à la fois !
Pour grand-mère, on a décidé de faire confiance à un concurrent. Ce fut dramatique ! On a tout critiqué ! Tout !
La tenue du personnel, la propreté du corbillard, le bois du cercueil et même la vitesse du convoi entre la maison et le cimetière. Grand-maman avait refusé de passer à l'église suite à une dispute vieille de plus de trente ans avec le curé ! Une vieille querelle qui fut fatale à l'homme d'église qui décéda quelques mois plus tard et pour lequel, on avait bâclé l'affaire en moins de deux !
Mais il y eu une vengeance posthume, puisque nous avions appris que désormais le secrétariat paroissial conseillait de ne plus s'adresser à notre société pour les enterrements à l'église !
Notez qu'on s'en fiche, il y a de moins en moins de personnes qui ont recours aux services de la religion pour aller au paradis.
Grand-père, un vieux dur à cuire - quand je pense qu'il veut se faire incinérer ! Cela va prendre des heures - nous a réuni la famille pour passer la main…
C'est désormais, Robert, mon père, qui sera le patron. Avec lui, c'est devenu l'enfer. Un vrai tyran. Il veut tout savoir, tout contrôler, tout régenter. Il terrorise la clientèle et son personnel, le Robert !
Pourtant, moi je reste serein. Je suis son fils préféré et je sais qu'un jour viendra… En attendant, j'agrémente souvent son café "très sucré hein gamin" avec un peu de cette poudre que toute la famille ne connaît que trop bien. Il faut bien vivre, n'est-ce pas ?
Louis Delville
Blog : http://louis.quenpensez-vous.blogspot.com/