Mickaël Auffray nous propose deux nouveaux extraits de son recueil de nouvelles à paraître chez CDL "Vous êtes ici"
Souvenez-vous sa première présentation :
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« Vous êtes ici » est un recueil de 10 nouvelles exposant des personnages à l'adversité contemporaine:
- L'impasse révèle les déchirures d'un couple au pied du mur ;
- Démission offre une plongée dans une entreprise de recouvrement ;
EXTRAITS :
L'impasse
C'est un moment de bascule, un jour à péter les plombs. Je serre le volant de toutes mes forces, strangulation discrète. Elle s'observe dans le miroir du pare-soleil, passe méticuleusement son rouge à lèvres ; elle se pense belle, je ne vois que laideur. Mon regard se pose sur la rue d'en face, au bout de la rue c'est une impasse, au bout de l'impasse c'est un mur : le mur qui écrasera sa jolie gueule... Le rouge sur ses lèvres aura bientôt une autre saveur. Il suffira d'accélérer, environ 400 mètres pied au plancher, saisir la boucle de sa ceinture de sécurité et au dernier moment, presser le bouton comme on appuie sur la détente. L'airbag c'est fait, je l'ai désarmé côté passager.
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DEMISSION
01h42 : Prière de laisser cet endroit aussi propre que vous souhaitez le trouver en entrant. Avec la cuite que je tiens, il est certain que les consignes affichées sur la porte des toilettes ne seront pas respectées : chiotte occupée versus dégueulis imminent, l’apéro en question a pris une tournure inattendue et franchement exaltée. Tête basse, j'observe le mur d’en face où des mots doux gravés dans le béton côtoient des bites dessinées au marqueur. Peu inspiré par cette poésie, j’insiste lourdement en frappant la porte, la réponse est cinglante : « Casse-toi pauvre con ! » […] Je reviens au bar, une grande bouteille de rhum est posée sur le comptoir. On me tend un verre avec une tape dans le dos à vous décoller la plèvre. Nous trinquons avant d’absorber ce soyeux liquide qui fait d’honnêtes gens de parfaits imbéciles. Je me tourne vers la scène de concert, un groupe de punk à la négligence maîtrisée éructe sa vision du monde. Ils surjouent l'indignation en triturant leurs coûteuses Gibson Les Paul pendant que les pissouses du premier rang crachent des salves de cyprine. Je vomis de nouveau, par les oreilles cette fois-ci.
MICKAËL AUFFRAY