Pascale Gillet B. nous présente son nouvel ouvrage "Salon de coiffure"
Extraits (pg 32-33 et pg 139) « Le salon de coiffure »
« Charles interrompt sa rêverie et retourne vers les précieux cartons.
Outre cette facture de « Marie-Claire » de 1937, il retrouve une farde en contenant d’autres, toutes annotées et concernant exclusivement le salon de coiffure.
Les premiers feuillets qui racontent sa mère datent bien de cette époque. Il s’agit d’une série de feuilles lignées proprement découpées d’un cahier d’écolier. L’écriture y est concentrée et dense. Il se demande pourquoi sa mère n’a pas laissé ces notes en un carnet relié, le nombre impressionnant de pages noircies correspondant à quelques livrets complets. Ces mots constituent ainsi le début de ses confidences manuscrites.
Il avait fallu qu’il aille à l’école et soit moins présent à ses côtés pour qu’elle découvre le délassement de rédiger pour elle-même. Son écriture est élégante, elle a utilisé de l’encre bleue ou noire et une plume très fine de sorte qu’elle a pu couvrir les feuillets détachés de façon très serrée sans gaspiller d’espace ni nuire à la lisibilité de son texte. On sent dans la calligraphie, outre le plaisir de raconter, un réel bonheur pour l’acte en lui-même, la satisfaction de suivre les lignes fidèlement, de transcrire chaque lettre dans un soin réussi.
Le contenu de ces pages a ravi Charles. Sa mère y livre une série d’anecdotes cocasses, croustillantes, parfois déchirantes qu’elle avait vécues avec ses clientes. Il était satisfait de s’y retrouver en filigrane.
La plupart des dames qui fréquentaient le salon étaient attentives à ses désirs d’enfant, elles étaient pleinement comblées de son existence silencieuse et de sa réserve qui leur donnaient l’occasion de s’étendre sur leur progéniture à elles. »
« Cette fois, Richard avait invité sa mère chez lui. Il pressentait qu’ils arrivaient au dénouement de son récit et quoiqu’il puisse apprendre, il préférait son décor rassurant qui lui donnait l’illusion d’être davantage maître de la situation. Il avait préparé un navarin d’agneau comme lui seul savait l’accommoder.
Il excellait dans l’élaboration de plats mijotés qui ne lui réclamaient aucun affairement dans la cuisine au moment du repas et le laissaient libre de participer à l’ambiance générale avec ses invités.
Il avait recouvré son calme et vivait une manière de paix décomplexée bien qu’inachevée. Par-delà la terrible révélation à propos de son père, les mots de sa mère avaient exorcisé la honte coupable qu’il traînait en secret dans son sillage depuis la guerre.
Il avait résolu de la laisser reprendre son discours sans agacement impatient. »
Biographie : Pascale Gillet-B
Pascale Gillet-B est née à Liège en 1959.
Retraitée de l’enseignement, elle passe son temps à écrire, à s’occuper de ses enfants et petits-enfants et à faire des promenades avec son mari ; Elle aime les chiens, la mer et les fleurs.
Résumé « Le salon de coiffure »
Dans ce roman, deux amis, Charles et Richard, vont remonter le fil du temps et ainsi retrouver leur adolescence bouleversée à la fin du conflit meurtrier de 1940-45, puis traverser les années de cette guerre désastreuse jusqu’à leur petite enfance et leur première rencontre.
Leur mère respective les guide l’un et l’autre sur le chemin de ces souvenirs, parfois compliqués, souvent douloureux.
Blessé par le décès récent de sa mère, Charles fera ce retour en arrière, à son rythme, à travers les mille et mille papiers entassés dans des cartons et noircis de la belle écriture maternelle qu’il lira avec émotion et passion.
Richard affrontera sa mère au cours de rencontres de plus en plus ardues mais également de plus en plus intimes où elle se livrera sans pudeur et avec beaucoup d’amour.
Les deux amis arriveront transformés au plus profond d’eux-mêmes au terme de ce cheminement très particulier.