Marie-Noëlle Fargier nous propose une nouvelle... "Enfants de l'Océan"

Publié le par christine brunet /aloys

Enfants de l’Océan

 

Avant de te voir, te rencontrer, te connaître, je t’ai lu ma belle. Encre sensible à ta force et ta splendeur. De cette encre issue de tes abysses. Ceux de la Garonne. Miroir de ses rives clinquantes, majestueuses. Fleuve tantôt lisse et soumis, tantôt révolté et provoquant.

Je t’ai suivie au gré des pages « Ecoute ma Garonne ». Je l’ai entendue. Raz-de-marée noirs de chair torturée. La bouche édentée expulse la poussière d’or sur les pierres de la ville. L’homme aveuglé de ses lèvres pincées s’abreuve du métal inoxydable. Dépendance immortelle. Raz-de-marée rouges de chair suante. De ses mains usées fabrique les argentiers. Ouvriers mis en cale. Raz-de-marée dorés de chair soyeuse. De ses ongles manucurés soudoie Dionysos. Paquebots à quai. Oriflamme faste, couleur aurifère. Dépendance immortelle. Qu’ont-ils fait de toi ?

 

Et puis, tu m’as parlé d’elle. Ta compagne sauvage. Dordogne se nomme-t-elle. Librement elle circule avant de te rejoindre dans ta prison humaine. Emmurée, bétonnée. Elle te raconte ses rives de terre et d’arbres et de fleurs, ses poissons, son tapis de flore. Toi qui n’es plus qu’un vide de souillures. Elle se souvient de son berceau dans les monts Dore, sans malédiction.  Elle serpente au caprice des reliefs, rencontre le lys, s’aventure à travers son homonyme. Refuge des indomptables. Comme elle, affranchis. Elle s’amuse de quelques embarcations indiennes. Mémoire. Gène de sagesse, de savoir.  Elle rêve de ces corps nus qui glissent dans son onde. Volupté. Servitude des sens. Couronne champêtre sans blason ni étendard. Dépendance vitale. Ils t’ont épargnée.

 

Enfin, tu m’as parlé de lui, l’aîné des Titans et je vous ai suivies. Chargées d’eau douce et d’eau de mer. Orchestrées par la marée vous façonnez vases, bancs de sables et îles. Le colérique mascaret ne vous néglige pas.  Enlacées au Bec d’Ambès vous vous jetez dans l’océan. Toujours unies et victorieuses. Raz-de-marée oubliés. La terre se dessine d’un archipel où il fait bon vivre, initié de vos vagues.

Publié dans Textes

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J
Un beau texte, dont on suit le cours des mots en rêvant, ces mots qui s'écoulent comme ces rivières qu'ls décrivent.
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D
Les mots semblent couler de source sous ta plume, vers un ocean de poésie.
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M
J'ai beaucoup apprécié ce texte plein de poésie. Bravo !
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H
Un texte que j'ai apprécié : des mots qui évoquent des jolies images.
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C
Très beau texte, des vagues de poésie comme une ode à la nature, celle de contrées que nous devinons. Merci Marie-Noëlle et viens souvent nous raconter tout ça. C'est un texte qui appelle à l'oralité. J'ai l'impression d'être au coin du feu et d'écouter une vieille légende.
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P
Pas vraiment une nouvelle, mais un texte très poétique et j'espère que Marie-Noëlle est allée le lire à l'océan...
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F
Merci pour vos commentaires. A très vite et belle année à tous !