L’amour en trompe-l’œil de Daniel Roualland, lu par Edmée De Xhavée
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L’amour en trompe-l’œil est le titre de la dernière nouvelle de ce recueil, qui en comporte trois. Trois fois se faire plaisir, un régal ! De chacune je voudrais dire qu’elle est ma préférée, mais en réalité, elles le sont toutes !
L’auteur a enseigné la philosophie, et ça se sent dans la façon dont on suit la pensée des protagonistes, leur raisonnement, sans aucune pédanterie d’autre part. C’est souple, c’est évident, ça va de soi mais c’est bien mis en mouvement…
La première nouvelle – La cicatrice ultérieure - nous convie à un séjour à la campagne entre amis. Léo-Pierre se languit de parcourir à nouveau la route sinueuse menant au domaine familial, datant du 18è siècle. On fait le tour du propriétaire, on s’attendrit, on s’émerveille, on marque un temps d’arrêt devant le vieux mobilier, le causse que l’on voit par la fenêtre, et le matin, après une nuit délicieuse, c’est l’odeur du café moulu dans l’appareil de grand-mère qui les accueille. On joue les paysans pendant la journée, on ramasse du bois, on le scie, on bavarde. Le soir on mange et boit à la rustique, et on arrive ainsi à la troisième journée de dépaysement. Et là, la conversation tombe sur… le guéridon. Quelqu’un a-t-il déjà fait tourner les guéridons ?
L’idée flotte encore alors qu’ils visitent, suivis d’une petite inquiétude délicieuse, les caves voûtées et tendues de toiles d’araignées. Et après le repas du soir, quelqu’un ranime l’idée de faire tourner le guéridon. Personne ne s’attendait à ce que l’esprit de Léopoldine se manifeste.
La seconde nouvelle – La vie rêvée de B.D. – nous présente B.D., fils d’une « maraîchine au corps râblé revenue de la ville expresse pour accoucher dans de vrais draps », et d’un « frêle ajusteur de chantier naval, suspendu sans illusion à son maigre salaire de fin de semaine qui l’avait embarquée, quelques années plus tôt, en silence sur le chemin du bon sens populaire et de la nécessité ». Ils attendent de B.D. que leurs sacrifices le portent plus haut qu’eux-mêmes. Lui il aura un bon travail – de fonctionnaire, quoi de mieux ? – une épouse aimante, un joli logis, et se reposera sereinement le soir. B.D. , de ce rêve, fait ce qu’il peut… et puis part en vacances, seul, à Athènes. C’est là que…
La troisième – L’amour en trompe-l’œil – nous présente une traductrice qui a du vécu et de la beauté, de la détermination aussi, Martha. Frédéric est l’homme qui attend du hasard qu’il le secoue, il est prof de philo, un peu émoussé par une histoire d’amour qu’il a vue mourir sans trop de drames, et se rend tous les jours dans le même restaurant à la même heure. Et puis on a Ambre, la jolie serveuse mêle-tout aux yeux qui voient tout. Elle voit bien que Martha sait ce qu’elle veut, et comment ! Elle veut la même chose, mais n’a pas les mêmes armes. Et Frédéric… il est plus un homme de raisonnement que de décisions, car ça se sait, les décisions comportent des risques, et sait-on jamais tout tout tout ? C’est qu’il faut réfléchir, n'est-ce pas ?
Voilà, j’ai vraiment tout aimé de ce livre, les sujets choisis, le décor campé, l’intrusion dans les pensées des personnages, les hésitations multiples devant les choix, premiers ou seconds, voire lots de consolation…
Edmée de Xhavée
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