Carine-Laure Desguin nous propose en épisode sa nouvelle "Ceci n'est pas un meurtre (comme un autre)" qui figure dans le recueil (en PJ) CA SENT LE SAPIN.

Publié le par christine brunet /aloys

La détective strictement privée du palais royal de Laeken trifouille alors dans ses valoches et ressort son assortiment de loques noires jaunes et rouges. En vakantie Kitch’Kasket aime l'incognito, elle ne s'habille qu’en bleu, blanc et rouge. Mais là, vu les insistances royales de Philippeke de Belchique, elle ressort sa panoplie vestimentaire de royaliste cent pour cent convaincue belche et patriotique. 

 

  Décembre à la merde du nord, c'est vent et pluie. Le bikini sera relégué au profit d'un pull, d'une jupette, une paire de bas de laine etc et le tout, comme promis, croix de bois croix d’enfer, dans les couleurs strictement belches.  Kitch’Kasket remplit un sac à dos de tout son matos nécessaire avec conscience et professionnalisme, un crayon et un calepin. C'est pas parce qu'on bosse incognito en détective privée flexi-jobiste que l'on doit lésiner sur tour ça. Soudain elle entend du ramdadam qui vient de l'extérieur, des voix mâles gutturales et des voix criardes, femelles celles-là, des aboiements, des miaulements, et même des ricanements de mouettes, mais oui, les oiseaux ne sont pas dupes. Et soudain, des lumières bleuâtres de gyrophares se reflètent sur ses fenêtres, entre des fientes de mouettes et encore des fientes de mouettes, plus récentes celles-là.

 

Purée, moi qui attendais les guirlandes et les étincelles multicolores de Nowel, c'est pas tout à fait la même chose. J’arriiiive, j’arriiiiive.

 

  Kitch’Kasket descend les trois étages à pattes, autant explorer à fond ce qui peut encore l’être, avant l’intrusion des équipes scientifiques. Atterrie dans le hall d'entrée, elle zieute en oblique les noms inscrits sur les sonnettes et au moment où elle dégaine son calepin afin de noter certains noms qui l'interpellent, elle est aveuglée par les gyrophares qui s'animent à toute blinde de l'autre côté du chemin. Elle sort donc de l'immeuble haut de trois étages seulement et là un strident coup de sifflet l'arrête net dans ses mouvements. 

 

— Stoooop mevrouw! Carte d'identiteit! gueule un zig engoncé dans son uniforme de policier super-réglo.

— Ja, ja, pas de panique! Répond du tac au tac Kitch’Kasket et à ce moment précis notre enquêtrice recule de deux pas, effrayée. À sa gauche, une énorme flaque de sang pas encore tout à fait coagulé, du presque frais donc. Autour de l'hémoglobine, un dispositif policier : trois cônes orange fluorescents. D’un regard circulaire, elle constate que la petite rue est barrée et que le parc situé cinquante mètres plus bas est fermé. Les badauds s’agglutinent derrière las banderoles policières. Deux combis remplis de cerbères freinent de justesse devant l’hémoglobine.

— Oh la la que s'est-il passé ici ? interroge Kitch’Kasket tout en présentant sa carte d’identité au zig de service. 

— Interdiction de dire ça, c'est trop grave beaucoup. 

— Vous ne me connaissez pas. Ik ben Kitch’Kasket, la détective privée très privée du koning Philippeke de Belchique. 

— Alors c'est autre chose ça.

— Il me semblait bien, mon p’tit gars.

— Interdiction de vous informer que cette nuit, plutôt sur le matin, une jeune dame s’est fracassée le nez et tout le corps sur ce trottoir. Cette fille-là était disloquée tout à fait. 

— Elle est raide morte et c'est un assassinat. Et pas un meurtre. 

— Wablieft? 

— Ne cherchez pas a comprendre. Je vous expliquerai. Tout en expliquant cela Kitch’Kasket photographie clic clac clic clac la flaque de sang, soulève sa casquette et se gratte le ciboulot. Au troisième étage, juste au-dessus de la flaque de sang, une fenêtre est restée ouverte. Serait-ce donc de la que la malheureuse … ? se demande-t-elle. Vous avez déjà interviewé les habitants de l’immeuble? 

— Wablieft ? La dame morte était habillée bizarre, très bizarre. Je ne peux te dire tout ça. Mais si toi es amie avec Philippeke de Belchique …

— Oh ja, très très amie, confirme-t-elle d’une clignette complice.

— Ah bon, il n’a pas l’air si coquin pourtant …

— Il n’a pas l’air non …  Alors, les loques de la frangine ?

— Bizarre tout ça, très bizarre.

— Mais encore ? Une robe rouge ? Une casquette orange ?

— Oh non … De longs cheveux blonds. De grands yeux noirs. Une robe noire, une robe de princesse mais le tissu était stoppé juste sous les seins.

— Sous les seins ? Alors les roberts étaient visibles ?

— Il n’y avait pas de Robert ici, répond le zig.

— Je veux dire, les seins étaient nus et visibles ?

— Oh oui, très très visibles, ah ah ah !

— Espèce de cochon !

— Wablift ?

— Non, rien, passe ton tour.

— Ah oui, une espèce de tissu blanc tout transparent était là comme un col et il retombait un peu de chaque côté des seins nus. Tout ça, je ne peux dire mais tu es amie avec Philippeke, alors je peux tout lâcher vers toi. Ah oui, on dit que dans cet immeuble, il y a quelques dames nues tout à fait ou presque et leurs noms sont pas comme les autres. Tu comprends moi ?

— Ça devient compliqué ton bazar. Dank u wel, mon brave !

 

(A suivre)

Publié dans Nouvelle

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E
Potferdek ! Et qu'est-ce qu'elle va faire là contre, Kitch'Kasket ? Faisons-lui confiance une fois, hein !
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C
Une enquêtrice envoyée par Philippeke se débrouille toujours hi hi hi.
S
Ca sent le renfermé ( je parle en code ) ...
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C
D'ici je ne sens rien du tout :D
P
Quel bazar.... ! Compliqué 😁
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C
Non, c'est tout simple, suffit de tournicoter trois fois autour du pot!
A
Heureusement, pour Kitch'Kasket ce genre d'enquête c'est le train train... 😄
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C
En effet, elle avait déjà enquêté à Mons et à Bruxelles. Faudrait que je retrouve ça.
P
Bientôt, il va falloir être au moins trilingue pour te lire, Carine-Laure ! Mais, bon, on s'accroche et on accroche et on attend la suite...
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C
J'ai en effet un langage assez personnel, fais un ptit effort, Philippe, c'est dimanche quand même.