Georges ROLAND nous propose : LE CAUCHEMAR
LE CAUCHEMAR
Si j’écrivais un jour sur le flot d’un ruisseau
Une phrase un bon mot qui ne soit pas d’un sot
Un beau trait callipyge
Que ce verbe s’en aille au galop du courant
Chahuté trimballé comme un épi au vent
Un pin de haute tige
Ce ruisseau deviendrait un rapide un torrent
Et ma phrase suivrait toujours en bondissant
En gagnant du prestige
L’écriture enflerait irait en crescendo
Sur l’écume on verrait étinceler les mots
Mieux que je les rédige
Et le temps d’un quatrain le flot se radoucit
Devient calme serein royal épanoui
On dirait qu’il se fige
Le bon mot suit son cours dans la même logique
A quoi bon résister à l’éclat hystérique
Et lui faire la pige
Il se mue en sentence en cas mathématique
Au trait grandiloquent orgueilleux emphatique
Mais ça me désoblige
Ce petit bout de phrase que j’avais écrit
Me contraint de paraître plus que je ne suis
D’être son homme lige
Après tout je ne suis pas académicien
J’écris plutôt pour les chats et pour les chiens
Bien sûr je me néglige
Mais pour balancer son luth à la postérité
Rançonner les potaches de l’université
A grands coups de rémige
Ce n’est ni mon credo ni mon confiteor
Je n’écris pas pour luire ou pour chercher de l’or
Simplement je voltige
Ma chanson restera un petit ru discret
Abreuvant les grenouilles les vaches et les gorets
Je le veux je l’exige
Georges ROLAND
http://bernardiennes.wifeo.com et http://www.georges-roland.com
Extrait de "Chansons de Roland"