La montagne, au Gaschney, un texte de Claude Colson
La montagne, au Gaschney
Un peu plus de dix heures, ce matin de juillet. À 1000 m, sur ce col des Vosges jouxtant le petit Hohneck, le frimas de la nuit n'a pas encore complètement lâché malgré le soleil généreux en apparence. Il faut dire que le ciel ( NDLR : la photo est prise à un autre moment) est chargé de lourds cumulus offrant toute la palette du blanc lumineux au gris sombre.
Au milieu quelques trouées de bleu. L'ensemble de ces nues glisse lentement vers la droite, au gré d'Éole.
Au premier plan la prairie vallonne doucement, couverte çà et là de gros rochers dont le gris prend au soleil des reflets d'ardoise. les taches jaunes des boutons d'or (?) font un collier à l"'herbe sèche, derrière, ornée de nuances mauves. Bientôt c'est la première haie des sapins, montant à l'assaut du vallon.
Le soleil qui en frappe uniquement la première moitié éclaircit quelque peu le vert bouteille. On dirait le sourire d'un hémiplégique.
Au delà, c'est le creux, invisible, et plus loin l'autre versant, éclairé lui aussi, où les arbres de la forêt dense paraissent minuscules. Ils se serrent peureusement.
Levons les yeux un peu encore et ce sont les chaumes, jaune paille déchiré par endroits du sombre de sapins isolés. Enfin, juste sous le ciel, les croupes des ballons vosgiens.
Complètement à ma gauche, dans l'obscurité des bois, la montée vers la Schlucht, visible cependant.
Et voici que le paysage s'anime : déboulant du même côté mais à mon niveau, le ding-ding de clarines annonce le défilé - à la queue leu-leu - d'une troupe de belles vaches locales, oblongues, têtes blanches, corps noirs surmontés tout le long du dos d'un large galon blanc. Deux veaux marron ferment la marche.
Le tintement des sonnailles s'éloigne presque aussitôt. Je lève les yeux de mon écrit, les bêtes sont passées. Je peux à nouveau m'évader vers les crêtes surmontées de la chevelure des épicéas, en brosse clairsemée.
À l'horizon , la ligne bleue d'autres ballons.
Il fait bon voir ou revoir ces merveilles, dans le silence épais bien vite revenu.
Claude Colson
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