Le décor : un poème de Claude Colson
LE DÉCOR
File, file , fonce ; fonce, fonce et file
Le train de nuit vers Paris,
Qui savamment le noir défonce.
Mars en guerre n'offre pourtant
Pas résistance bien longtemps.
Sur les côteaux, obscurs et loins
Une forêt de lumignons serrés veille.
Patiente, elle attend l'aube qui point.
Le voyageur dédaigne les bourgs
Encore ensuqués, de sommeil gourds,
Les gares sales et bla fardes.
Il s'attache aux lointains que la nuit garde.
L'obscur cache la laideur,
Égalise tout en beauté,
Pour une fois bien partagée.
Pour peu encore : c'est bientôt l'heure
Où le jour cruel fera qui pauvre, qui riche,
Opposera l'homme à l'homme, en grâce chiche;
Aime la nuit, dispensatrice !
Mais comme toute chose elle est biface,
Recèle aussi pièges et menaces,
Complots ourdis, gens agressés :
La nuit parfois est sans pitié.
Le jour, la nuit, tantôt ennemis, tantôt complices,
Sont le décor où tu te glisses
Pour comme chacun faire de ton mieux,
Mener ta barque où faire se peut.
Claude Colson
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