Un poème de Claude Colson : nouveau jour ordinaire en train
NOUVEAU JOUR ORDINAIRE, EN TRAIN
Après le vif, étonnant été de septembre,
Enjambant les douceurs d'octobre,
Indécises à lâcher, mais plus sobres,
Voici, presque conforme à l'attente, novembre.
Il ennuite mon train, fort peu avant le jour,
Glace la vitre qui à son tour fraîchit ma joue,
Rend même – oh, à peine – le bras comme gourd,
Et, invariante, l'aube de la noirceur se joue
Quand, sûre d'elle,subreptice, elle point,
Inversant l'image de la sécuriglace :
À mon reflet estompé le monde fait place.
Il prend corps lentement, émergeant là, au loin,
Puis plus près le voilà qui tout entier s'en vient.
Obscurité s'est faite pénombre ;
En dégradés subtils c'est toute la nuit qui sombre.
Les objets et les êtres veulent sortir de l'ombre ;
Tous s'affirment, envahissent, tant est si grand leur nombre.
La clarté un peu faible en saison de brouillard
A néanmoins gagné sur la nuit qui s'égare.
Les arbres, à l'oeil, verdissent :
de l'hiver ce ne sont encore que prémisses.
L'éclat mat du rail avoisinant
Attire mes regards, spectacle fascinant.
Il trace une ligne ferme et continue
Qui me sépare du monde, de sa cohue.
Je contemple les inconnus qui m'entourent,
Somnolents, peu diserts ou lisants, occupant le répit
Amoindi qui, inexorable, au travail les conduit.
Ils s'agitent soudain, se lèvent lourds,
Accélèrent,voire courent,
C'est la station, la leur, ils agissent ;
Ils descendent, se pressent, pour que tout s'accomplisse.
Claude Colson
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