Une écriture à six mains !!!
Voluptueusement vôtre
Les pensées de Giovanni le ramenaient sans cesse vers cette vision surréaliste et pourtant bien réelle, vision qui avait pénétré ses sens d’une gourmandise qui désormais le tourmentait. Il avait conscience d’être resté tétanisé, sa vidéo caméra professionnelle à la main, la bouche entrouverte, alors que la jeune fille était tombée dans la cuve de chocolat tiède destiné à recouvrir des pralines. Elle avait poussé un cri étouffé par le plouf spongieux dans cette marée lente et sucrée dont s’échappaient l’haleine du cacao, du beurre, et d’une épice secrète. Puis elle avait ri avec ses collègues qui, hilares et agitées, lui tendaient la main en s’exclamant « Sarah ! Accroche-toi ! » et elle avait ainsi surgi de la cuve, telle une Aphrodite fondante, sa blouse de travail épousant ses reliefs avec une délicieuse indécence, ses jambes nues laissant transparaître la peau en veinures claires sous la moire sombre qui durcissait déjà. « Ne mettez pas ceci sur la publicité ! » avait-elle plaisanté, inconsciente des pulsions dévorantes qu’elle venait d’introduire dans sa vie.
Et depuis, pas une heure sans qu’il ne goûte, en imagination, ce recouvrement chocolaté sur quelque repli de son corps moite, offert, livré à sa lente et amoureuse dégustation… Le petit bout de film où ce corps jeune et merveilleusement fait était aspiré par une succion sensuelle dont il imaginait les saveurs, il l’avait gardé et se le projetait sans cesse, de plus en plus affamé.
Les rumeurs de cette aventure étaient parvenues jusqu’aux oreilles d’Alex Leloup, chef de production de la chaîne de télévision qui employait le jeune homme.
Il l’avait aussitôt convoqué dans son bureau et demandé à voir le film. Giovanni avait introduit la clé usb dans le portable directorial et avait assisté, impuissant, au trouble qui s’emparait d’Alex. Un silence pesant suivit la fin de la projection… Quand leurs regards se croisèrent… leurs pupilles dilatées ne laissaient aucun doute sur l’excitation qui s’était emparée de leurs sens, balayant toute autre pensée.
Quand le boss lui demanda de convoquer la jeune fille dans son studio privé, et d’acheter de quoi remplir une baignoire de chocolat noir, Giovanni se sentit défaillir… Non, il n’allait pas laisser ce type réaliser, à sa place, le fantasme qui l’obsédait !
Etant dans l’impossibilité de refuser, sous peine de se retrouver sans emploi, il sortit la tête basse, ravalant sa rage.
Le soir venu, il fit entrer la jeune fille dans le studio où les attendait le boss, fit les présentations et voulut prendre congé. Mais Alex lui tendit une coupe de champagne et lui dit, d’un air complice :
- Restez donc avec nous…
Sarah se tourna vers Giovanni, un peu interloquée par cette mise en scène osée et chocolatée.
Elle observa amusée le visage cramoisi de Giovanni qui examinait avec un intérêt soutenu
le bout de ses chaussures.
Avec un sourire sibyllin elle accepta néanmoins la coupe de champagne que lui tendait le boss.
Puis, sereine et consciente de son pouvoir, elle détailla le studio sans dire un mot.
Alex prit enfin la parole.
- Sarah, quand j’ai visionné votre chute dans la cuve de chocolat… j’ai tout de suite pensé à l’impact publicitaire que cette séquence pourrait avoir. Vous, la volupté du chocolat, c’est DIVIN !
- Donc, vous voulez mon accord pour la publicité ?
-
Elle souriait encore. Giovanni pensa qu’il n’avait jamais remarqué la candeur de son regard et pourtant une phrase lui trottait dans la tête depuis son entrée dans le studio…
« Qu’importe l’éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l’infini de la jouissance ».
Baudelaire se dit-il balançant entre l’envie de s’enfuir ou de rester…
- Eh bien en effet, votre accord et un peu de votre corps !
Le boss avait répondu avec un aplomb qui arracha une toux horrifiée à Giovanni. « Le caméraman est prêt », dit-il encore, désignant Giovani qui assurerait un champ complet des merveilles en cours et cachait mal son émoi. « Laissez-vous guider par votre plaisir chocolaté, tout ce que nous attendons de vous c’est du naturel et que l’on ressente toute la sensualité du chocolat. »
Son regard les analysa l’un après l’autre et elle rit d’un air plutôt amusé. Elle termina sa coupe en émettant une sorte de ronronnement, mettant Giovanni et le boss dans un émoi proche de la fièvre qui fit monter leur température d’un cran lorsque, déposant sa coupe vide sur le bord du bureau, elle les toisa et demanda sans hésitation :
- Je dois me déshabiller ici ?
Et sans attendre la réponse, elle avait prestement déboutonné sa blouse de travail, enlevé sa montre et ses chaussures. Elle était parfaite. Un parfait au chocolat, pensa Giovanni, incapable de retrouver en lui un peu d’intelligence. Elle souleva une jambe lisse et claire et enjamba le rebord de la baignoire à pieds de lion pour lentement se fondre dans le liquide épais, brassant ses parfums de volupté sucrée de ses longs bras qui se couvraient divinement d’arômes et couleurs.
Accroupie, elle enleva sans sourciller son soutien-gorge et on devina, sous les coulées de lave noire, deux délicieuses pralines que la chaleur lissait et que tous les deux ne songeaient plus qu’à goûter…
La caméra tremblait dans les mains de Giovanni. Il la fixa sur un support, sorti prestement de son sac, et enclencha le mode automatique. Ces quelques minutes avaient suffi à Alex pour se dévêtir…
Il s’approcha lentement de la baignoire, ne quittant pas Sarah des yeux. Elle soutenait son regard où se mêlaient défi et malice.
Il posa sa bouche sèche sur les lèvres en chocolat, les dégusta lentement, osa une main sur un petit sein noir décoré d’un bourgeon rose… et rencontra la main de Giovanni posée sur l’autre monticule qui flottait hors de la marée aux effluves entêtantes…
La sirène ondula sous l’eau…
Son corps chaud tressaille sous les mains et ravive les passions ancestrales.
Sarah, femme enfant qui enflamme dangereusement les hommes.
Les yeux mi-clos, gémissante elle s’ébroue, parfumée et joyeuse, révélant monts et merveilles.
Tandis qu’Alex et Giovanni perdant la raison dérivent dans un océan de volupté.
Triturant, malaxant…
Mais, soudain, Giovanni n’apprécie pas ce poids sur lui qui l’oppresse, cette langue râpeuse qui explore ses épaules, une haleine fétide…
C’est le boss, il devient fou ?
Il se redresse, cela suffit !
Giovanni est en sueur, assis sur son lit et son labrador lui lèche le torse avec application.
L’esprit embrumé il se frotte les yeux, un pas dans l’escalier, sa femme entre dans la chambre.
Mon amour, c’est dimanche et je t’apporte le petit-déjeuner…
Café et petits pains au chocolat !
Edmée de Xhavée, Silvana Minchella et Marcelle Pâques