Yannick Torlini: extraits de son recueil Polaroïds
Du fond de ces jours nous voudrions
Semer les grisailles qui moutonnent
Au pied du lit
Regards perdus entre les fenêtres
Nous délimitons la pièce l'enclave sonore
De nos intérieurs faméliques
Ombres informes perdues dans les rideaux sans lumière
La vie comme une cavité
Passés les murs l'éclatement du bourgeon
–Boules blanches dans le soir rouge–
Et le pincement qui nous saisit
Lorsque le vent claque contre la présence
De l'arbre
Perspectives tronquées d'un jardin
Nous crevons comme la fleur qui naît
Poème de l’immobilisme (extraits)
La pierre sur laquelle
Buttent
Peu à peu nos vies acides :
Nous n’érigeons
Aucun mur
Dans la serre de l’œil
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Prendre la courbure de l’instant
Ces insectes qui bourdonnent
Entre nos côtes blanchies sous
Nos vêtements défraîchis :
La semblance d’un matin
Dans un semblant
De lumière
Et nos langues de tôles
Froissées comme
Des oiseaux au petit jour
Prennent le pli de l’attente
Apprennent à
Parfaire la mort vraie
***
Il n’y a pas de sens à nos dilutions
Cette vie fade suintée sur un trottoir
(Matins noirs perdus sur les étagères
En désordre)
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Journées mortelles où l’on attend la pluie
La signifiance sourde d’une voiture
Qui passerait toujours dans une rue autre
Perchée en nous l’obscurité éclate en dedans
Sur elle-même ailleurs
L’existence lente
Arrêtée comme l’aiguille dans
La ventripotence des dimanches
Lointains
(La table qui nous est interdite)
On subsiste dans la pièce
À la fenêtre se heurte
La persistance du peuplier
L’ondulation d’un corps sur ses racines
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Sans doute la langue comme une courroie
Qui ne transmet plus alors
Chaque instant nos lits hérissés de clous
Dans des chambres en suspens
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Temps déraisonnables gonflés d’inerties :
La nuit et ses remous jusque dans la chambre
Nous nous absorbons
La vie détachée de la vie et
Ces pierres que l’on entasse dans l’ornière
Des instants
Survivances d’autres instants
Et ce peu d’ombre que l’on traîne
(Plus la peine de)
Le corps comme un origami de chairs
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Et le mot qui se fait soudain
Désir de mouvement :
Nos béances se refusent
À la voix
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La simple idée de crever
Sans un bruissement de paupières
Voici l’immobilisme de la pièce
Yannick Torlini