Yannick Torlini: extraits de son recueil Polaroïds

Publié le par christine brunet /aloys

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Du fond de ces jours nous voudrions
Semer les grisailles qui moutonnent
Au pied du lit

Regards perdus entre les fenêtres
Nous délimitons la pièce l'enclave sonore
De nos intérieurs faméliques

Ombres informes perdues dans les rideaux sans lumière

La vie comme une cavité

Passés les murs l'éclatement du bourgeon
–Boules blanches dans le soir rouge–
Et le pincement qui nous saisit
Lorsque le vent claque contre la présence
De l'arbre

Perspectives tronquées d'un jardin
Nous crevons comme la fleur qui naît


Poème de l’immobilisme (extraits)

 

 


La pierre sur laquelle
Buttent
Peu à peu nos vies acides :
Nous n’érigeons
Aucun mur
Dans la serre de l’œil

 

             ***


Prendre la courbure de l’instant

Ces insectes qui bourdonnent
Entre nos côtes blanchies sous
Nos vêtements défraîchis :

La semblance d’un matin
Dans un semblant

        De lumière

Et nos langues de tôles
Froissées comme
Des oiseaux au petit jour
Prennent le pli de l’attente
Apprennent à
Parfaire la mort vraie

 

             ***


Il n’y a pas de sens à nos dilutions
Cette vie fade suintée sur un trottoir

(Matins noirs perdus sur les étagères
En désordre)

 

 

             ****


Journées mortelles où l’on attend la pluie

La signifiance sourde d’une voiture
Qui passerait toujours dans une rue autre

Perchée en nous l’obscurité éclate en dedans
Sur elle-même ailleurs

L’existence lente
Arrêtée comme l’aiguille dans
La ventripotence des dimanches
Lointains

(La table qui nous est interdite)

On subsiste dans la pièce

À la fenêtre se heurte
La persistance du peuplier

L’ondulation d’un corps sur ses racines

 

 

             ****

 


Sans doute la langue comme une courroie
Qui ne transmet plus alors
Chaque instant nos lits hérissés de clous
Dans des chambres en suspens

 

             ****

 


Temps déraisonnables gonflés d’inerties :
La nuit et ses remous jusque dans la chambre

Nous nous absorbons
La vie détachée de la vie et
Ces pierres que l’on entasse dans l’ornière

Des instants

Survivances d’autres instants

Et ce peu d’ombre que l’on traîne

(Plus la peine de)

Le corps comme un origami de chairs

 

             ****


Et le mot qui se fait soudain
Désir de mouvement :

Nos béances se refusent
À la voix

 

             ****


La simple idée de crever
Sans un bruissement de paupières

Voici l’immobilisme de la pièce

 

 

Yannick Torlini

http://tapages.over-blog.fr

 


Publié dans Poésie

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L
<br /> <br /> Sombre. Vacuité, béance, inertie, vanité des existences, de l'espoir, attente inutile, ... Pour autant, ces extraits sont de toute beauté !<br /> <br /> <br /> <br />
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E
<br /> <br /> Chloé des lys donne la parole à beaucoup de poètes, pour le plaisir de tous ...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Oui, on a une drôle d'impression en lisant ces vers, et je suis sensible à leur élégance...<br /> <br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> La première fois que j'ai lu des textes de ce troubadour, j'ai aimé ..."La vie est un cheval sauvage" disait-il ...Et donc je reste sur ma position : j'aime ces mots-là , cette<br /> association de phrses qui nous laissent un goût de trop peu et au fond de notre écran une limite entre le certain et l'incertain ...<br /> <br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Les vers de Yannick claquent, bruissent et se déroulent dans une ambiance nocturne... Ils me laissent une drôle d'impression... Sans doute ce qu'il a voulu !<br /> <br /> <br /> <br />
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