Pascale Gillet-B a lu et chroniqué "Le Transfert" de Carine-Laure Desguin
Le Transfert, Carine-Laure Desguin, théâtre, Editions Chloé des Lys.
Dans cette pièce de théâtre, un seul décor : une chambre d’hôpital.
Les personnages sont anonymes, aliénés à une fonction, étrangers à eux-mêmes. Existent-ils seulement ?
Un clown en face d’un patient allongé veut jouer envers et contre tout.
Progressivement inquisiteur et autoritaire, il semble dicter les règles du jeu au détriment de celui qu’il est venu faire rire.
Le patient, triste et morose ne rit pas. Est-il fou ou puni ? Il doute de tout et interroge le clown.
D’abord résigné, il ne comprend rien, il ne reçoit pas de réponse de son étrange interlocuteur. Il souffre, il souffre atrocement, il se souvient. « Le parfum des roses me paraît si loin, si loin, si loin… »
Un robot sorti de nulle part apporte le remède à sa douleur, un carton blanc, vierge et vide !
Les visites sont terminées, le clown quitte la chambre.
Le docteur et l’infirmière entrent en scène. Ils discutent de l’existence du patient ou plutôt de sa non-existence. Un dialogue complètement burlesque s’engage entre ces deux nouveaux personnages à propos du malade.
Le patient comprend lentement, il se souvient, il réfléchit maintenant, il veut pisser, il a faim, il a soif… il sourit même ! Il se rebelle.
Mais non, il ne sera pas sauvé. Il est fou, il ment, il n’existe plus. Il est devenu non-patient, englouti dans le néant.
Il n’a pas ri, le clown lui avait bien dit pourtant qu’il devait rire.
Il ne reste rien, même pas le souvenir d’un parfum…
Prodigieuse, Carine-Laure Desguin nous emmène dans un dédale abracadabrant par la seule puissance de ses mots ! Dans ce texte court et dense, elle dépasse avec audace les limites de la raison pour le plus grand plaisir du lecteur.
Une lecture hors-norme dans la forme comme dans le fond! Bravo !
Pascale Gillet-B