Sonia Alvarado se présente !
S. Alvarado, … Z’auriez pas vu mon macchabée ?
RESUME
Elle est là. Elle s’approche de lui, le frôle de son haleine glaciale puis disparaît. Elle s’amuse à semer les cadavres sur son chemin comme d’autres sèmeraient de petits cailloux blancs. Elle croit ainsi pouvoir l’ébranler, lui, l’imperturbable, l’autosuffisant, le puissant, le charnel…
Moi, spectatrice, je l’observe tandis qu’il promène son regard perçant et désabusé, sur le champ de ruines qu’Elle déroule aux pieds de l’homme à chacun de ses orgasmes putrides.
Mais il ne sera jamais sa marionnette : il s’avance, sourit, caresse distraitement un sein échappé d’une robe de bal, subtilise le portefeuille d’un corps en charpie, hausse les épaules devant la tasse de thé froide d’un pauvre vieux, renifle le contenu d’une urne… Il éclate de rire. Echec et mat, comme à son habitude.
J’ai la bouche sèche, des frissons, des sueurs froides. Sa Majesté des Morts affiche sa déception face au sourire gouailleur de l’insolent.
Ce jeu du chat et de la souris ne durera pas éternellement. Un de ces jours, je le sais, ils se retrouveront face à face.
EXTRAIT
Accoudé au comptoir où l’on remplit les formulaires bancaires, je tiens à savourer mon croissant chaud et mon café sans précipitation.
Une femme en tailleur passe près de moi, le regard en coin. Aurait-elle faim ? … Pas de jaloux !
– Vous en voulez un morceau ?, lui dis-je.
Elle détourne la tête.
– Les régimes, ça vous met de mauvais poil !
Ses yeux clairs me lancent des éclairs de colère. L’envie est un péché, mais j’ai pitié d’elle.
– Si vous le souhaitez, je vous en achète une demi-douzaine !
Ma proposition n’a pas l’air de lui plaire car elle bifurque et se dirige tout droit vers le vigile armé qui
m’observe depuis que je me suis installé pour finir mon petit déj’.
Peut-être aurait-elle préféré des fleurs.
BIO
Sonia ? … J’ai rencontrée par hasard ce petit bout de femme lors d’une intervention plutôt physique chez un suspect. Je me tenais nonchalamment appuyé sur une balustrade, à supporter une fois encore Germain, lorsque j’ai aperçu cette fille silencieuse qui nous fixait, le regard perdu, un carnet et un stylo noir à la main. Fort de mon charisme, je me suis approché pour entamer la conversation, histoire de ne pas être venu pour rien. Cette garce m’a envoyé balader manu militari, prétextant que les machos comme moi ne l’intéressaient pas ! C’est alors que j’ai commencé à lui raconter ma vie, histoire qu’elle sache ce qu’elle manquait… Et ça lui a plu ; ce qu’elle gribouillait vite !
D’accord, je ne suis pas fâché qu’elle ait couché ma vie sur le papier – à défaut qu’elle soit couchée à mes côtés sous des draps de soie –, mais franchement, des mains pareilles, quel gâchis ! Je suis sûr qu’elles seraient bien mieux employées à d’autres occupations, et le ménage n’arrive pas en tête de liste !
Sonia Alvarado