Texte 11 concours "Disparitions/fantômes du passé"

Publié le par christine brunet /aloys

AVEC SES FANTÔMES…

 

 

Je suis un écrivaillon. Quelques personnes disent apprécier ma plume et mon univers, mais je suis un écrivaillon. Non pas amer, mais désillusionné. (La suite expliquera ces propos…) Je n’ai jamais voyagé et je ne suis pas spécialement instruit – chacun de mes livres a nécessité plusieurs dizaines d’heures de recherches sur Internet et, quand possible, car j’aime toujours cela, au cœur d’une bibliothèque. À l’instar d’un comédien, il faut savoir faire illusion… Ai-je au moins réussi cela ?

Depuis quelque temps, le même rêve fou revient durant mon sommeil : un très gros éditeur me repère sur le blog littéraire Aloys. Il m’offre un contrat incroyable, un agent littéraire merveilleux, et le succès arrive, somme toute, rapidement. C’est une nouvelle vie – qui fait excessivement peur, malgré tout.

Au bout d’une année seulement, je peux réaliser mon rêve secret : racheter l’appartement de mon enfance. Dans ce rêve récurrent, je m’écrie souvent : « Ça y est, j’ai enfin réussi à récupérer notre chez nous ! Je ne suis peut-être pas le raté qu’ils disent, dans mon dos, que je suis, dans cette famille. » Puis je me réveille… Je regarde autour de moi, afin d’être sûr, et il m’arrive de pleurer. Ce ne sont pas les murs de ma maison, témoins de tant de bonheurs simples, et mes chers disparus ne sont évidemment plus là.

Je ne suis ni Marc Lévy, ni Guillaume Musso, ni Danielle Steel. Juste un écrivaillon qui vit, comme d’autres, avec les fantômes de son passé personnel. J’ai tout perdu quand j’ai perdu ma maison. Cet appartement minuscule où j’étais merveilleusement heureux. Comme des esprits frappeurs, les dimanches en famille, sans ces putains de smartphones, reviennent me hanter à l’envi. Je repense continuellement à ma grand-mère en train de cuisiner pour tout le quartier, à mon grand-père qui rentre de ses parties de pétanque ou des courses de chevaux en sifflant, à tous ces moments précieux avec maman, éternellement jeune à mes yeux, à nos voisines, tous les jours chez nous.

Ça fait mal, affreusement, mais on vit avec les fantômes du passé. Je ne m’en délivrerai jamais. J’aurais aimé avoir un camescope pour capturer tous ces « fantômes », à l’époque. On n’avait pas d’argent, et le temps s’en moque. Alors, j’écris. J’écris pour vivre avec mes fantômes. Pour un peu de tendresse.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
J
Beaucoup de textes relativement différents, ce concours. C'est agréable. (Merci à Christine...)
Répondre
E
quel bon écrivaillon ! Ce texte a du charme, de la modestie, de l'ambition, du rêve...
Répondre
M
Un beau texte troublant !
Répondre
C
Ecrivaillon peut-être mais bien triste ! Beau texte !
Répondre
A
Un texte très émouvant... Cet auteur a besoin d'un câlin !
Répondre
P
Amusant l'idée de l'écrivaillon reperé sur le blog Aloys !!! <br /> Beaux souvenirs du passé aussi !
Répondre
P
Touchant !
Répondre