Texte 4 sur le thème de la magie pour le 3e hors série de la revue

Publié le par christine brunet /aloys

 

L’épée de Velkan



 

Il y a bien longtemps, dans un lointain royaume…

 

À l’extérieur du palais d’orichalque, qui dominait la ville portuaire en contrebas, acclamations et applaudissements nourris croissaient – Démodion, le premier fils du roi Timéo et de la reine Liliane, souverains d’Allégia, venait de naître.

De mémoire humaine, comme non humaine, on n’avait encore jamais vu un aussi joli bébé. Un présent de la déesse Rozomorfia, assurément – la déesse à la peau couleur framboise, translucide, et protectrice des braves depuis la nuit des temps.

Puis l’accoucheur royal sortit leur second fils – Velkan serait le cadet. Il était tout aussi beau que son frère, sinon plus, et semblait déjà on ne peut plus vigoureux.

Le soir, et toute la nuit durant, des feux d’artifice éclairèrent le ciel d’incroyables bouquets d’étoiles multicolores.

Même le grand dragon Prasinos, l’oracle respecté de tous, se déplaça. Il quitta exceptionnellement son refuge, lequel dominait la Montagne des anciens dieux, dans le Nord. Pour y accéder, une ascension de plus de neuf-cents mètres sur l’adret, grâce aux larges marches polies d’un escalier, taillées dans la roche, était nécessaire. L’ubac de la montagne, lui, était l’endroit où vivait le pacifique peuple des lutins, bâtisseurs de génie aux doigts habiles et grands amateurs d’énigmes et de charades.

Lové sur le dôme du palais, Prasinos, presque aussi vieux que la déesse Rozomorfia, rassurait le peuple et le couple royal par sa seule présence majestueuse.

Il faut dire que…

Quelques mois auparavant, dans une grotte, Timéo et ses gardes réussirent à piéger Cattus Khan, le terrible nécromancien qui terrorisait la planète tout entière depuis le règne de l’arrière-grand-père de Timéo. Là, au terme d’un long combat de magie blanche contre magie noire, Rozomorfia enferma son esprit perverti dans une pierre de sang, profondément enfouie, un peu plus tard, dans les Ruines du Vampire, dans la région tropicale de la planète. Quant à son corps, il fut incinéré.

Certains des pires généraux de Cattus Khan demeuraient toutefois en cavale… Parmi eux : le puissant Ken-Do, qui maniait admirablement le sabre, et l’impitoyable Glaciarr. Glaciarr, de son vrai nom Glade Odegård, était autrefois le vaillant capitaine de la garde royale d’Allégia. Il fut capturé par le nécromancien, asservi magiquement, puis transformé en mutant capable de contrôler eau, glace et vent.

Ce soir, soucis et malheurs semblaient n’avoir jamais existé…

Et les deux jeunes princes grandirent…

Ils reçurent le même amour, le même enseignement, mais l’un : Velkan, était naturellement vertueux, adoré de tous, et l’autre : Démodion, naturellement sournois. Un mal sommeillait dans son cœur et dans ses veines, et la beauté de son visage n’était qu’un masque. Son âme était laide. Aliénée.

Prasinos mit en garde le roi : son fils aîné les trahirait un jour, mais Timéo se braqua. Il savait… Tous, ils savaient. Mais la connaissance et l’acceptation sont deux choses différentes. Surtout quand il s’agit de la famille.

Un an plus tard, Démodion fut surpris par leur maîtresse d’armes en train de conspirer avec la sorcière Jynx, ancienne élève de Cattus Khan, inféodée à son culte. Démodion, pour préserver son secret, tenta de tuer leur professeure d’un coup de glaive en plein cœur, mais son frère l’en empêcha. Ce jour-là, en effet, Velkan, perturbé par son rêve de la nuit passée, l’avait discrètement suivi… Il s’empara de l’épée et, d’un coup malheureux, défigura son frère qui s’écroula à ses pieds en vociférant.

Jynx usa d’un sort de disparition, emportant Démodion avec elle dans un tourbillon de fumée. Ils se réfugièrent dans la région la plus sombre et la plus désolée d’Allégia, où parias et criminels vivaient depuis la chute du cruel nécromancien.

Des semaines s’écoulèrent – le roi et la reine, horrifiés par le récit de Velkan et de Kyniga, la maîtresse d’armes, avaient proclamé la mort de leur aîné. Un « tragique accident ». Cette version, jugèrent-ils, était préférable pour les Allégiens.

Le fiel de Démodion grandit, et grandit encore…

Une nuit, attiré par une voix dans sa tête, il se leva subrepticement et se dirigea vers ce lieu sinistre connu sous le nom des Ruines du Vampire. Il marcha peut-être trois heures avant de voir apparaître l’ancien sanctuaire, théâtre de sacrifices rituels.

À l’intérieur, alors qu’il scrutait la statue d’un ancien despote : Desmobat, la terre s’ouvrit sous ses pieds, et Démodion disparut… Il réapparut quelques minutes plus tard, en lévitation, tout nimbé d’un éclat funeste. Dans sa main, une pierre – la pierre de sang où la déesse Rozomorfia avait enfermé l’esprit de Cattus Khan.

L’esprit du nécromancien prit alors possession du déjà perfide Démodion. En réalité, il fusionna avec lui… Démodion hurla de douleur et tomba à genoux. Quelques minutes plus tard, il se releva, totalement métamorphosé… Il n’était plus le prince déchu d’Allégia… Il était Nécrodion, le nouveau maître des ténèbres !

Infatué de sa puissance magique, il détruisit la statue de Desmobat et transforma les ruines en forteresse. Sa forteresse. Plus tard, il réunit la sorcière Jynx, Ken-Do, Glaciarr et quelques autres, et réfléchit à sa vengeance contre Velkan.

– Il te faudra plus qu’une épée et de la chance pour me battre, cette fois, mon frère… ricana-t-il. Car je détiens tous les pouvoirs de Cattus Khan ! Et tu mourras !

Ainsi, l’odyssée de Velkan n’allait pas tarder à lui être révélée… Et que signifiait son dernier rêve ? La belle déesse Rozomorfia et son glaive ne faisaient plus qu’un.

Mais ceci, braves gens, est une autre histoire…

 

Publié dans concours

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
P
Un vrai conte à inclure dans un recueil !
Répondre
M
Quelle imagination !
Répondre
P
J'ai le tournis aussi 😁 <br /> Un univers que je ne connais pas ! Mais belle écriture!
Répondre
E
J'en ai le tournis :D
Répondre
A
Une Fantasy pleine d'imagination dont on aimerait connaître la suite. Joe a raison, le choix va encore être difficile !
Répondre
C
Un texte qui ns plonge ds un tout autre univers. Passionnant! A 7h 29 on lit ça et puis on se demande comment affronter le métro de 8h. Ben, avec l'épée de Velkan, bien sûr!
Répondre
J
Magie noire, Heroic Fantasy... Un bel hommage à l'univers du romancier Robert E. Howard... Le choix sera réellement compliqué, Christine !
Répondre