Texte 3 Concours sur l'imaginaire
MARJOLAINE
Dix centimètres, des petits yeux noirs brillants, une fourrure blanche comme la neige, Marjolaine est ma meilleure amie. Comme il est hors de question pour mes parents d'avoir un chien ou un chat, Marjolaine est devenue ma confidente. C'est ma grand-mère qui m'a offert cette peluche pour mes sept ans. J'ai choisi ce prénom, celui de ma copine restée dans le petit village où je suis née. Pour se rapprocher du travail de papa, nous avons déménagé en ville où la vie est tout autre qu'au village. J'allais à l'école à pied. À présent, je prends le bus.
Qui pourrait comprendre que je viens d'un univers où les récréations duraient quelquefois plus longtemps que prévu et où l'on travaillait davantage en groupes. Dans ma nouvelle école, j'ai très vite pris conscience d'être une élève différente, moins bien habillée que les autres, plus rêveuse et pas du tout au courant des jeux à la mode.
Alors j'ai décidé d'emmener Marjolaine partout : en classe, au réfectoire et même dans la salle de gym. Elle ne prend pas beaucoup de place dans mon cartable qu'il me suffit d'ouvrir pour trouver sa présence rassurante.
Dans mon école, un établissement très réputé, m'a dit Maman, l'institutrice, Madame Virginie, ne cesse de me houspiller : "Catherine gigote moins… Qu'est-ce que je viens de dire ? Regarde-moi quand je te parle…Relis tes devoirs, tu feras moins de fautes."
Marjolaine et moi, on partage le même lit, le même banc. Le soir, sous ma couette, je lui raconte tout ce que j'ai sur le cœur : que Madame Virginie est injuste lorsqu'elle déduit des points pour "écriture déplorable", que c'est le plus souvent moi qu'on pointe du doigt à la moindre peccadille, qu'on m'appelle souvent la nouvelle plutôt que de dire Catherine. Marjolaine ne répond pas, mais je sais qu'elle comprend tout ce que je lui raconte. Elle rit, oui je peux affirmer qu'elle rit, quand je suis la meilleure en calcul mental et que Madame Virginie me complimente. C'est si rare les félicitations !
Parfois, un petit coup d'œil à mon cartable et Marjolaine m'inspire la bonne réponse. Mais chut, personne ne doit le savoir !
Depuis hier, il y a une nouvelle, elle s'appelle Nadia et descend au même arrêt de bus que moi. La maîtresse m'a demandé de la mettre au courant des habitudes. Nadia m'a offert des bonbons parce que je lui ai prêté des crayons de couleur. Elle aussi a une peluche dans son cartable, elle s'appelle Émilie. Elle me l'a montrée et je lui ai montré Marjolaine. C'est notre secret
Un jour, quand Nadia sera devenue ma vraie copine, je n'aurai peut-être plus autant besoin de Marjolaine…À nous quatre, Marjolaine, Émilie, Nadia et moi, on formera une vraie équipe…