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Carine-Laure Desguin dans le volume 3 de l'Anthologie poétique de Flammes Vives !

Carine-Laure, l’année 2017 s'est bien terminée, un texte dans une anthologie, c’est bien ça ?
Oui, belle surprise en ouvrant la boîte aux lettres. Un de mes textes dans le volume 3 de l’Anthologie poétique de Flammes Vives. Dans le volume 2, il y avait déjà un autre de mes textes.
http://carineldesguin.canalblog.com/archives/2017/06/19/35400165.html
J’ai ce texte sous les yeux, celui du volume 3, et je le survole. Dis-moi, c’est un texte surréaliste et je ne sais pas pourquoi ça me fait penser à de la science-fiction.
De la science-fiction ? Ah je n’avais pas du tout songé à ça. De la science-fiction, pourquoi pas, après tout.
C’est une belle reconnaissance, un texte dans une anthologie. Je lis que c’est un texte extrait du recueil À chaos chaos et demi. C’est un recueil non édité, il est en recherche d’un éditeur ?
Ah, je n’ai pas envie de tout dire. Il faut laisser des surprises pour 2018 !
En tout cas le titre est accrocheur et si les autres textes ressemblent à celui-ci, quel bouleversement dans les neurones des lecteurs. On peut dévoiler le titre du texte ?

Bien sûr. C’est donc un texte qui se situe à la page 50 du volume 3 de l’Anthologie poétique de Flammes Vives et il s’appelle À quai et d’égarement.
Il y a de quoi s’égarer en effet…
C’est à souhaiter. Il ne sert à rien d’écrire une poésie pour endormir le lecteur.
N’en disons pas plus ! Dis-moi, Carine-Laure, pour obtenir ce livre qui comprend (il faut le signaler) presque deux-cent textes, où s’adresse-t-on ?
Oui c’est en effet une très belle sélection et le livre est très beau. Un auteur par page, une dizaine de ligne au sujet de sa biographie et puis le texte. Pour obtenir le livre il suffit d’envoyer un mail à Claude Prouvostcontact@flammesvives.com
Site de Flammes Vives : www.flammesvives.com
Presque deux-cent textes et tous différents, c’est ce qui est intéressant lorsqu’on lit une anthologie. De plus et ça ne se voit pas sur les photos, le livre est bien broché et c’est un format A5. Comme ça, les lecteurs savent tout ou presque !
Carine-Laure, quelques mots pour tes évènements en janvier 2018 ?
L’année va commencer sur des chapeaux de roue puisque le mardi 23 janvier 2018 je serai entre 20h et 22H en interview sur les ondes de YOUfm dans l’émission animée par Sylvie Mordang et là je vous dirai tout tout tout !
Tu nous parleras aussi de ce texte, Le Transfert, qui sera lu par le Box Théâtre de Mons au Centre Culturel de Frameries le samedi 3 février. Quel texte ! Effrayant ! Et cela pourrait arriver aux citoyens dans un avenir proche !
N’exagérons rien, si les humains commencent à disparaître de cette façon-là…
Carine-Laure, le monde virtuel a un tel espace dans nos vies que rien n’est impossible !
Oui, vivons un jour à la fois. J’en profite pour souhaiter à tous les lecteurs une heureuse année 2018. Que les rêves de chacun se réalisent !
Press book C.-L. Desguin:
http://carineldesguin.canalblog.com/pages/press-book/32061526.html
Vous avez aimé "Le premier choix" de Séverine Baaziz ?

Un nouveau roman qui sortira bientôt !!!! A suivre, donc !
Jules, quinze ans, a toutes les raisons d’être déprimé. Sa mère n’a d’yeux que pour les roses, les chats et la chasse à la poussière, son père est tremblotant de tics et de faiblesses, ses camarades de classe adeptes du langage des poings. Et pour couronner le tout, sa grand-mère, aussi aimable qu’une lame de guillotine, emménage sous son toit… Sauf que la petite dame aux pas ankylosés d’arthrose va donner du sens à sa vie.

"Sans nouvelles d'elle", une nouvelle signée Jean-François Foulon, parue dans la revue ONUPHRIUS

http://onuphrius.fr/category/foulon-jean-francois/
Toute ressemblance avec des personnes existantes…
C’est un lundi que j’ai reçu sa première lettre. Etrange. Je ne la connaissais pas mais elle disait qu’elle était passée à la galerie et qu’elle avait apprécié mes peintures. Ma foi, cela fait toujours plaisir, mais j’avais beau faire un effort de mémoire, je ne parvenais pas à me souvenir que quelqu’un fût passé récemment. En fait, je travaille surtout à l’arrière du bâtiment, c’est là que se trouve mon atelier et toutes mes toiles en chantier. Quand un visiteur se présente au magasin, ce qui est assez rare, il faut bien le reconnaître, j’entends la sonnette et je vais jeter un coup d’œil, non sans m’être essuyé les mains au préalable. Cette semaine il y avait bien eu quelques copains qui étaient passés, et puis Sophie, pour l’exposition à la Cité, mais en dehors de cela, rien. Ma correspondante avait dû entrer et faire sa visite sans que je ne m’aperçoive de rien. Dommage.
Je n’y pensais plus quand j’ai reçu une deuxième lettre. Cette fois, il s’agissait d’une véritable analyse de mes toiles et surtout de celle que j’avais intitulée Soleil couchant. Ma correspondante y passait tout en revue, le ton des couleurs, les jeux d’ombre, la composition du paysage, les effets produits, et cela dans une missive qui ne faisait pas moins de cinq pages. Diable ! Si les critiques d’art et les journalistes pouvaient être aussi élogieux et surtout aussi loquaces que cette étrange inconnue, je serais un peu plus célèbre. Non que je sois entièrement obscur… mais personnellement les mondanités m’ennuient ; or, c’est évident, pour réussir dans ce milieu, il faut se montrer : aller aux vernissages des collègues, serrer des mains, bavarder avec quelques députés, parler politique avec un ministre, lancer une galanterie à la femme d’un attaché culturel (sans aller trop loin, bien entendu, juste ce qu’il faut pour être sympathique et ne pas se faire oublier). Hélas, toutes ces réceptions m’agacent profondément et je préfère de loin rester seul avec mes pinceaux, plutôt que de me gaver de petits fours tout en buvant du Martini.
Lorsque arriva le troisième courrier, je dois admettre que je ne fus guère surpris : je l’attendais, et même avec une certaine impatience. Le contenu était semblable au précédent, mais son auteur élargissait le champ de ses investigations à l’ensemble de la peinture contemporaine. Je n’avais jamais rien lu d’aussi percutant et d’aussi captivant. De plus, la dame me donnait son prénom : Yseut (avait-elle son Tristan ?), son adresse (un petit village des Pyrénées Orientales) et même son adresse électronique (laquelle allait s’avérer fort utile). Cela dit, comment, habitant si loin de mon antre, avait-elle pu passer par la galerie et voir mes tableaux, ça c’était une véritable énigme. Cependant, je ne me suis pas torturé les méninges avec ce problème : cela faisait partie du mystère général qui entourait Yseut, tout comme ses lettres, sa sagacité d’analyse ou le ton quasi affectueux qu’elle employait sans me connaître. Nous, les artistes, nous sommes comme cela, pas rationnels pour un sou. Au surplus, l’insolite de la chose n’était pas pour me déplaire et, avouons-le, renforçait le charme qui émanait des lettres de la belle Yseut.
Certes, je ne savais pas si elle était belle, mais je ne pouvais me l’imaginer autrement. Et puis je me suis dit que, si elle m’avait donné son adresse de messagerie, c’était évidemment pour que je l’utilise. Ne pas le faire eût été un crime : je lui ai donc adressé le soir même un fichier de quatre pages (police Arial 9), dans lesquelles je manifestais mon contentement d’avoir « rencontré » une personne aussi sensible et aussi douée pour parler de la peinture.
Il s’ensuivit une correspondance régulière pendant plusieurs mois. J’écrivais et je recevais deux messages par jour, quand ce n’était pas trois. Les sujets traités tournaient toujours autour de la peinture, mais derrière ce thème, on sentait poindre les questions fondamentales. C’est que l’art n’est souvent qu’un moyen d’accéder à autre chose, à une vérité cachée que nous imaginons exister quelque part, sans bien savoir où elle se trouve. Yseut, elle, ne peignait pas, mais elle écrivait. Oh, elle n’était pas publiée, mais on sentait que l’écriture était pour elle un besoin vital et qu’elle constituait un moyen de se connaître et de connaître le monde. La parole, disait-elle, il n’y a que cela de vrai. Nommer c’est créer, et créer c’est toucher au divin. Quand elle s’exprimait de la sorte, elle éveillait en moi des échos insoupçonnés. C’est que, comme tous les peintres, je ne suis finalement qu’un manuel. Je travaille avec mes doigts, je mélange les peintures, je les étale sur la toile, je me bats avec elles et en bout de course, si tout se passe bien, j’arrive à créer un univers, un peu comme un maçon qui parvient à réaliser une maison en partant de rien. Yseut, elle, était davantage portée sur la réflexion théorique, mais ses mots me faisaient découvrir une vérité que je connaissais bien : une vérité enfouie au plus profond de moi, une vérité qui se concrétisait dans mes peintures mais que j’aurais été bien incapable d’exprimer de vive voix.
Ici, il ne s’agissait certes pas de parler mais de lire, puisque c’était une correspondance virtuelle que j’avais sous les yeux. C’était cela qui était fascinant. Si j’avais eu Yseut devant moi, il aurait fallu s’exprimer oralement et traduire par des paroles ce monde indicible dans lequel nous pénétrions chaque jour plus avant. Or, sans que je sache bien pourquoi, cela n’eût pas été possible. Par la magie de l’écrit nous parvenions insensiblement à nous dévoiler l’un à l’autre, et la peinture ne m’apparaissait plus que comme un prétexte pour atteindre une autre vérité, que je qualifierais d’ontologique. Comprenez-moi bien, je n’étais pas amoureux d’Yseut, mais ce qu’elle écrivait me renvoyait à une réflexion existentielle. Nous étions deux êtres humains face à face, en train de se demander leur raison d’être sur cette terre. Si nous parlions de nous, c’était moins de nos individualités propres que de notre appartenance à une espèce commune. Nos propos tournaient donc autour du destin et de ce qu’il convient de faire de sa vie. Par exemple, fallait-il laisser des traces de son passage ? Était-ce vraiment important ? Moi qui en laissais avec mes peintures, j’avais tendance à dire que non, et elle qui s’exprimait à travers des mots éphémères affirmait le contraire.
Yseut m’était devenue indispensable. Je vivais à travers ses yeux et, tout ce que je réalisais, je le passais inconsciemment au crible de son jugement futur. Ainsi elle m’avait encore longuement écrit au sujet de ma toile Soleil couchant, toile qui semblait décidément la fasciner et dont elle avait analysé les moindres détails, surtout la touffe de lavande dont on devinait les contours à l’avant-plan. Or dans les autres toiles que j’ai peintes depuis, j’ai chaque fois inséré cette touffe de lavande, dans laquelle mon amie voyait comme la quintessence du monde (des couleurs atténuées par le crépuscule et une senteur bien réelle, qu’elle pouvait imaginer à partir de la toile). Cette lavande représentait pour elle la vérité dissimulée qu’il importait de conquérir.
Elle me faisait aussi lire les poètes, que je croyais pourtant connaître, mais que je redécouvrais à travers ses commentaires. Baudelaire, bien sûr, mais aussi Rimbaud et Jaccottet. À la fin, je ne peignais plus en reproduisant la réalité que je voyais, mais en m’inspirant des poèmes qu’elle m’avait fait lire. On peut dire que j’étais sous son influence mais l’inverse était vrai aussi. Je lui parlais de peintres dont elle ignorait à peu près tout et elle se documentait à leur sujet, avant de les aborder dans ses longs et judicieux commentaires.
Nous en étions là dans ce qu’il convient d’appeler notre « relation » quand un jour, sans raison, je ne reçus aucun message. J’en fus étonné, mais pas vraiment inquiet. Après tout, je ne savais pas grand chose de sa vie et elle pouvait fort bien avoir eu un empêchement. Les jours suivants, ce fut le même silence et aucune réponse ne me parvint, malgré les nombreux courriels que je m’étais mis à lui envoyer. Là, il se passait vraiment quelque chose d’anormal. Après une semaine, j’écrivis aux responsables de son adresse de messagerie. Or, me disait-on, il n’y avait rien à son nom, absolument rien, aucune archive, le vide. Ma chère Yseut s’était volatilisée. J’eus beau envoyer des copies de mes anciens courriels, ils affirmèrent qu’il n’en subsistait aucune trace.
Je patientai pendant un bon mois, puis subitement il me sembla que j’avais un urgent besoin de vacances. La valise bouclée en un quart d’heure, je pris l’autoroute du Sud en direction des Pyrénées. Le soir même je me trouvais dans un petit hôtel de Collioure. Par la fenêtre ouverte, on entendait le bruit calme et régulier de la mer qui venait mourir sur la plage. Cette rumeur monotone était pour moi comme une présence amie qui m’enveloppait et ne me quittait pas. Je pensais aussi que Collioure avait été la patrie du fauvisme et je me demandais ce qu’Yseut aurait bien pu dire sur Matisse. Je suis sorti boire un verre et j’ai flâné dans les rues étroites de la cité. Chaque fois que j’entendais un pas de femme, je me retournais avec l’espoir que ce fût elle, moi qui ne l’avais jamais vue.
Le lendemain, je repris la voiture et commençai à gravir les contreforts pyrénéens en suivant les indications du GPS. Puisqu’elle m’avait donné autrefois son adresse, le moment était venu de s’en servir. Arrivé à l’entrée du village, je m’arrêtai un bon moment. Le paysage était magnifique, époustouflant même. Comme il devait être agréable de vivre ici ! Et dire que je n’avais même pas emporté mes pinceaux ! Je commençais à mieux comprendre ce qu’elle me disait, et certaines de ses phrases, qui revenaient à ma mémoire, prenaient tout leur sens, ici, au milieu de ces montagnes colossales. C’était un monde minéral dans lequel l’homme se sentait superflu. Pour survivre, il lui fallait donc trouver de bonnes raisons. En même temps, la beauté qui se dégageait de ces pics, le trouble qui vous prenait en contemplant ces gouffres, vous donnaient l’impression d’avoir enfin atteint le bout du monde. Après cela, il ne pouvait plus rien exister, cet endroit était le terme où toute vie devait s’achever.
Le temps passait et, si je me plongeais ainsi dans d’intenses méditations, c’était aussi parce que j’avais peur de reprendre mon véhicule et de parcourir le dernier kilomètre qui devait encore me séparer de ma destination. Allons, il fallait bien y aller ! Je repris le volant et, après avoir traversé le village et gravi une pente, je me trouvai sur le sentier signalé dans la fameuse lettre. Une maison, deux maisons, une troisième un peu en retrait, puis plus rien. J’ai encore roulé un peu, au pas, mais me suis vite trouvé dans un chemin de terre qui semblait se perdre dans la montagne. Je sortis de la voiture pour tenter de distinguer quelque chose, mais non, il n’y avait pas d’autres habitations que les trois maisons que j’avais aperçues tout à l’heure. Autour de moi s’étendait la chaîne pyrénéenne, grandiose, imposante, silencieuse aussi, presque inhumaine. J’étais là avec mon angoisse de ne pas retrouver Yseut (mais également, faut-il l’avouer, avec ma peur devant la possibilité de la trouver), et je me sentais tout petit et dérisoire devant ces montagnes qui occupaient l’espace jusqu’à l’horizon, m’écrasant de leur masse de pierre et complètement insensibles à ma peine. Je crois que je ne me suis jamais senti aussi seul et aussi désemparé. Au-dessus de moi, seule trace de vie dans ce décor, un vautour tournoyait et, se laissant emporter par la seule force d’un courant ascensionnel, il parvenait à planer indéfiniment sans jamais donner un seul coup d’aile. C’était le dieu des cimes et il était ici chez lui, fabuleusement majestueux. La vie, soudain, me sembla toute proche de la mort, comme si seule une mince paroi les séparait. Il suffisait, pour s’en convaincre, de contempler cet oiseau au vol superbe et de se rappeler, l’instant d’après, que ce n’était qu’un charognard. Troublé par cette pensée qui brisait mes certitudes, je remontai dans la voiture, fis demi-tour et me laissai descendre jusqu’aux maisons.
L’une portait le numéro 2, l’autre le 3 et la dernière, allez savoir pourquoi, le 7. Comme c’était le 4 que je cherchais et que son absence déclenchait en moi un immense découragement, je suis allé frapper à l’une des portes. Une petite vieille m’ouvrit d’un air soupçonneux et réprobateur. Non, le numéro 4 n’avait jamais existé. La commune était passée directement au 7 pour le cas où on construirait un jour sur le terrain disponible, mais ce n’était pas demain que cela arriverait. Le village se vidait, les jeunes partaient vivre en ville et, à part quelques touristes qui passaient sur le chemin en été pour faire des randonnées, on ne voyait plus personne. Une nommée Yseut ? Bien sûr que non ! Elle n’avait jamais entendu parler d’elle ! Avec un nom étrange comme cela elle ne l’aurait pas oubliée.
Je me suis retrouvé dans la voiture sans trop savoir comment. De grands coups sourds résonnaient dans ma tête et je n’arrivais plus à réfléchir. Je m’arrêtai sur la place du village et entrai dans le seul café existant. Il était vide, bien entendu. Quand le patron entra, il me dévisagea tout de suite d’un air soupçonneux (lui aussi). Mais quand je commandai un cognac, il prit une mine franchement renfrognée. Comme il restait là à son comptoir en train de m’épier – avait-il peur que je lui vole sa bouteille ? –, je lui demandai s’il ne connaissait pas une certaine Yseut, qui se passionnait pour la peinture. D’un ton rauque, il répondit que s’il y avait eu un peintre dans le patelin, tout le monde l’aurait su, mais que de toute façon ce n’était pas d’artistes qu’ils avaient besoin, les gens d’ici, mais d’un vrai peintre en bâtiment, pour rafraîchir un peu les façades. Je payai ma consommation et, sans un mot, regagnai la voiture.
La descente vers Collioure fut pénible. Il faisait chaud, mais à l’horizon les montagnes étaient dissimulées par une brume blanche qui allait en s’épaississant. Manifestement, un orage se préparait et il promettait d’être violent. Je ne savais que penser. M’avait-elle menti en inventant une fausse adresse ? Savait-elle pertinemment que le numéro 4 n’existait pas, ou bien avait-elle inventé un nom de rue au hasard, après avoir pointé un village sur la carte ? Cela ne lui ressemblait pas. Elle s’était montrée trop sincère et trop présente pendant tout le temps qu’avait duré notre correspondance. Avait-elle seulement existé et n’avais-je pas tout inventé ? Mais dans ma poche je sentais la copie de son dernier courriel, ce qui au moins prouvait que je n’étais pas fou. Il fallait me rendre à l’évidence, mon bon génie avait disparu pour toujours. Un grand vide s’installait progressivement en moi, que je ne savais comment combler. Y parviendrais-je jamais ?
Il faisait nuit noire quand je garai la voiture à proximité de l’hôtel. Les premières gouttes, énormes, commençaient à s’écraser sur le pare-brise. J’étais parqué devant une galerie d’art et, instinctivement, j’ai jeté un coup d’œil à la vitrine. Ce que je vis alors me laissa sans voix. Bien en évidence, sur un chevalet, se trouvait une toile intitulée Soleil couchant. Elle représentait des montagnes avec un petit chemin de terre à l’avant-plan. Dans le coin inférieur droit, une touffe de lavande irradiait de tout son éclat. C’est à ce moment que le premier éclair zébra le ciel et que l’éclairage public s’éteignit tout d’un coup. Il me fallut tâtonner dans le noir et raser les murs pour parvenir jusqu’à l’hôtel. J’étais complètement trempé. Derrière son comptoir, la gardienne de nuit me tendit la clef de la chambre. Elle me dévisagea et, sans rien dire, esquissa un sourire d’un air étrange.
L’éclairage de secours donnait aux lieux un caractère insolite. Bien entendu, l’ascenseur ne fonctionnait plus. Je gravis l’escalier comme je pus, et arrivai enfin au bon étage. J’étais exténué et me suis affalé sur le lit. Ce n’est pas pour autant que je trouvai le sommeil, car les idées s’enchevêtraient dans ma tête.
J’entendis des bruits de pas dans le couloir. C’étaient ceux d’une femme. Elle frôla ma porte puis pénétra dans la chambre voisine, où elle s’enferma. Le bruit de la clef dans sa serrure résonna longtemps à mon oreille ; je m’endormis enfin. Quand je m’éveillai, un frais parfum de lavande flottait dans l’air de l’aube.
Jean-François Foulon
Carine-Laure Desguin a vu "Marbie Star de couillu les 2 Eglises"

C’est mardi dernier que j’ai regardé Marbie, Star de Couillu les 2 églises, oui, mardi 14 novembre 2017.
Oui, je sais, c’est honteux…Un film carolo sorti en 2014…Et pourtant, j’avais lu chaque article qui concernait ce film et j’avais écouté toutes les interviews. De plus, je connaissais plusieurs acteurs du film, Mémé Loubard et Pino Bonelli, entre autres.
Alors pourquoi avoir attendu ? Je l’ignore. Je me souviens de l’enthousiasme des Carolos, un film était tourné sur leur fief, quelle fierté ! Et moi, j’avais fait bêtement marche arrière.

Alors, quand mardi, j’ai reçu le DVD, je n’ai pas hésité. Une fois rentrée chez moi, je me suis calée entre les coussins de mon fauteuil et je me suis énervée en enclenchant le film, ça n’allait pas assez vite, comme quoi… Faut dire que je venais de quitter Dominique Dubuisson, le promoteur et chef d’orchestre du film et son épouse, Dominique Smeets, la réalisatrice.
À souligner que Dominique Smeets est la première réalisatrice carolo. Les Dominique étaient interviewés pour www.actu-tv.net, ils nous ont parlé de leur prochain film, La vérité sort du puits. Là, ce sera le premier film à portée vraiment sociale mais nous en reparlerons plus tard, revenons à Marbie, star de Couillu les 2 églises.
Le premier mot qui me gifla les deux joues, c’est Poésie. Je n’ai pas pensé une seule fois en regardant ce film que c’était un film carolo, tourné dans des endroits que je connaissais, par des gens que je connaissais.
Eh bien non, je n’ai pas pensé à tout ça. Je me suis sentie transportée par toute cette poésie qui flirte avec chaque plan de ce film. Tout n’est que poésie durant ces XXX minutes, je ne sais pas combien exactement, je ne veux même pas le savoir. Je n’ai remarqué aucune longueur. C’est formidable de se dire que ce film a été réalisé par une autodidacte, même si Dominique Smeets a un pied dans le monde artistique depuis plusieurs années. Et là, on le voit à chaque minute, c’est une actrice de qualité, quelqu’un de sincère et d’authentique.

Dès les premières images, on ressent de l’empathie pour cette Marbie et lorsqu’on s’aperçoit qu’elle tombe dans les griffes de ce Jean Tube, on tremble, on se dit qu’elle se fera bouffer, qu’elle sera déçue. On se dit, ben cours dans les bras de cet infirmier, ne crois pas ce Jean Tube, il a beau être le sosie de Johnny, c’est une espèce de c…… !
On ressent une grande empathie pour cette naïve Marbie et on essaierait, tout comme son oncle et sa marraine, de la protéger par n’importe quel moyen. Quand ces mégères de villageoises et tutti quanti se moquent de Marbie, on voudrait leur sommer de se taire, de se regarder, elles qui n’ont aucun rêve étoilé. Et quand ce Jean Tube s’obstine à faire de Marbie une star, on lui lâcherait bien, eh, pas touche mon vieux, passe ton chemin et ambitionne autre chose, ne profite pas de notre Marbie.
Les paillettes, le tapis rouge du festival de Cannes, tout cela serait donc bientôt pour Marbie ? Vraiment ? Je ne dévoilerai pas la fin du film. Car certains d’entre vous ne l’ont pas encore vu, n’est-ce pas ?
Oui, il y a bien l’un ou l’autre Carolo qui a zappé ce film... Et si l’on me demande ce que j’ai vraiment aimé en regardant ce film qui fut qualifié d’improbable car rappelons-le il fut produit grâce à la participation de plusieurs centaines de citoyens, je répondrai que j’ai tout aimé. La toute grande poésie dans chacun des personnages, de Marbie bien sûr mais pas seulement la poésie de Marbie. Je pense à Jacques, à la marraine de Marbie et à Jean Tube, oui, même lui, même ce Jean Tube.
C’est un film belge, ne l’oublions pas, et c’est une toute grande belgitude que l’on croise dans chaque plan du film, et aussi par la musique, et aussi par la « lumière ». Vous voyez ce que je veux dire ? Non, bien sûr que non, cet accent belge n’ampute en rien ce film, c’est un film belge, je vous dis ! Et Marbie qui chantonne Bardot en Flamand, quel cadeau ! Mais je n’en dirai rien de plus, vous n’avez qu’à faire comme moi, vous caler entre les coussins de votre fauteuil, grignoter quelques saucisses en hommage à Jean Tube, et ne perdre aucune image de ce film que je qualifierais d’une profonde humanité. Si vous ne me croyez pas, consultez donc une médium déguisée en Chantal Ladessous…
Eh bien à présent j’attends 2019, car c’est en 2019 que l’on parlera de La vérité sort du puits.
Marbie, le site : http://www.marbiestar.be/news.php?page=7
Carine-Laure, une actu?
Oui, ça vient, ça vient, le 04 février, lecture d’un de mes textes par le Box Théâtre de Mons. J’en dis plus dans quelques jours. Patience !
Press book de C.-L. Desguin:
http://carineldesguin.canalblog.com/pages/press-book/32061526.html