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J'ai peur de..., un texte de Louis Delville

Publié le par christine brunet /aloys

 

delvilletete

 

J'AI PEUR DE…

Commencez un texte qui commence par cette phrase.

 

J'ai peur de vous raconter cette histoire… On va encore dire que je l'ai inventée et pourtant c'est la vérité !

 

Il y a quelques années, lorsque j'étais petit, j'ai rencontré des Martiens ! Vous voyez, vous commencez déjà à sourire. J'en ai marre de ces gens qui ne me croient pas !

 

L'après-midi du 24 décembre 1900 et quelques, je regardais par la fenêtre pendant que ma mère faisait des bouquettes. Eh voila, on sourit encore, on ne connaît pas un mot typiquement liégeois et on rit bêtement !

 

La bouquette est un genre de crêpe à la farine de sarrasin agrémentée de raisins de Corinthe macérés dans le genièvre. Il neigeait doucement et la maison embaumait. On avait fait les courses la semaine précédente et le cuissot de sanglier attendait sagement au réfrigérateur. Maman avait trouvé une recette de sanglier au chocolat à préparer pour le réveillon. Encore ces sourires moqueurs ! Oui, ça existe une recette de sanglier au chocolat !

 

Depuis la veille, la viande marinait… Le foie gras était déjà coupé en belles tranches et Papa avait ouvert une bouteille de ce vin fabriqué à base de grains de raisins pourris. Je vois que vous vous marrez mais il existe vraiment, ce vin, le Sauternes ! Attendez d'en avoir goûté avant de critiquer !

 

Je crois que je vais m'arrêter de vous raconter cette histoire, j'avais bien raison d'avoir peur de la commencer. Vous ne croyez pas des choses vraies, alors comment voulez-vous croire à mon histoire de Martiens ? 

 

Louis Delville

louis-quenpensez-vous.blogspot.com

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Jean-Claude Texier nous propose un extrait de son roman, L'Elitiste

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

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L’ÉLITISTE

                           Jean-Claude Texier

 

Un extrait de circonstances électorales

 

Roméo de Rivera, proviseur du lycée Edith Cavell dans une banlieue bourgeoise de la région parisienne, staliniste farouche et dirigeant tyrannique, devenu socialiste par opportunisme, est fortement impliqué dans la campagne présidentielle de 2007.

 

Le dimanche 22 avril, au soir du premier tour, en proie à une angoisse qu’il crut exorciser en retrouvant ses congénères, Roméo alla au siège du parti. C’était une belle fin d’après-midi printanière et le boulevard Saint-Germain, plongé dans un calme provincial, connaissait le silence préludant aux grands évènements.

Il trouva la rue de Solferino en effervescence. Des groupes de militants du Mouvement des jeunes socialistes agitaient des drapeaux aux cris de « Ségolène Présidente ! » parmi une foule assemblée devant un écran gigantesque, dans l’attente que s’affiche le score de son idole. Sur un podium dressé au milieu de la rue, la télévision achevait ses préparatifs. Les regards graves trahissaient la même appréhension qui l’habitait.  

Il se rendit à la brasserie au coin du boulevard Saint-Germain dans l’espoir de rencontrer une connaissance. Elle était bondée, le comptoir pris d’assaut par une clientèle assoiffée en quête de pronostics venus de l’étranger et d’ultimes prévisions. Les serveurs en sueur, débordés, couraient en tous sens, incapables de répondre à la demande. Il dut s’armer de patience avant qu’on lui servît une bière.  

On se pressait aussi dans l’escalier des toilettes. Il attendait docilement son tour lorsqu’il remarqua devant lui une jeune fille dans laquelle il crut discerner cette touche de distinction qu’il admirait tant chez certains politiciens. C’était une blonde d’une vingtaine d’années, au teint frais, aux lèvres finement ourlées, aux yeux bleus malicieux, souriante dans la file d’attente, et il se dit qu’elle devait avoir de l’humour, la qualité qui lui manquait tant, mais toujours appréciable chez autrui. L’idée lui vint – reste de ses lectures sur la séduction – qu’il devrait faire un effort pour engager la conversation sur un mode léger et plaisant.  

« Quel monde ! fit-il d’un air détaché, on se croirait à l’ANPE. » (Agence nationale pour l’emploi)

Elle éclata de rire, et il s’enhardit à lui demander si elle avait des renseignements sur les résultats probables. Comme elle secouait négativement la tête, il interrogea un jeune homme à lunettes aux traits creusés d’intellectuel, suspendu à son portable. 

« D’après des amis de Lausanne, dit-il gravement, flatté qu’on lui demandât son avis, vers cinq heures, c’était Bayrou qui était en tête. Mais il reste une heure, et tout peut basculer.  

— J’espère, dit Roméo, que Le Pen ne renouvellera pas son score de 2OO2 au premier tour. Je ne peux m’empêcher de souhaiter qu’il meure à la tribune, au milieu d’un discours haineux, d’un infarctus ou d’une congestion cérébrale. Vous ne croyez pas que cela pourrait lui arriver, à 78 ans ? »

Il fit semblant de s’étrangler et de tomber raide mort.

« Oui, certainement ! » fit la fille en riant.

Elle était assez jolie, et quelque chose d’innocent dans son expression lui plut. Il se souvint du premier précepte énoncé par son Don Juan de  Chamonix : faire rire une femme, c’est l’avoir à moitié dans les bras. 

Il poussa plus loin son avantage.

« Et ce n’est pas son imbécile de fille qui prendra le relais. La droite perdra son meilleur tribun et la gauche son pire ennemi. Je souhaite qu’on l’enterre dans une heure, fit-il en regardant sa montre.

— Marine ? Elle ne lui arrive pas à la cheville. Vous n’avez rien à craindre. »

Elle se précipita vers une place devenue libre dans une cabine. Lorsqu’il sortit, il alla l’attendre en haut des escaliers. Elle parut surprise de le retrouver. Il se demanda si elle n’avait pas rendez-vous avec un ami, mais résolut de risquer le tout pour le tout.

« Nous avons le temps de prendre un verre. Tenez, voilà une table qui se libère, allons-y. »

Et il s’empara de deux chaises de la terrasse avant qu’elle refuse son invitation. Mais elle vint s’asseoir en face de lui en le remerciant, toute joyeuse qu’on lui offrît un moment de détente dans cette cohue.

Il commanda deux cafés et la prévint qu’ils devraient attendre, ce qui lui donna l’occasion de citer son proverbe espagnol favori : Con la paciencia se gana el cielo. (Tout arrive à qui sait attendre)   

Et comme elle s’étonnait de son accent, il lui avoua ses origines ibériques, sa naissance dans un pays lointain.

« Mais parlons de ce qui nous amène ici. Vous êtes militante ? 

— Disons sympathisante. Mais presque militante, oui. Je devais retrouver une amie ici, mais elle vient de me prévenir qu’elle ne pourra venir. Elle est inscrite et veut que je le sois aussi. Nous sommes toutes deux étudiantes en deuxième année de médecine. Plus tard, on voudrait travailler dans l’organisme de Kouchner. 

— Bravo, mes compliments. Et bonne chance dans Médecins du Monde 

— Merci. Vous êtes professeur ? 

— Moi ? En ai-je l’air ? Non, je suis fonctionnaire. Mais j’ai été instituteur à Chamonix, il y a bien longtemps. 

— Est-ce que vous croyez que Ségolène sera au second tour ? 

— J’en suis sûr. Dans l’administration, beaucoup de gens lui font          confiance. Mais la lutte sera serrée au deuxième tour, à cause de Bayrou qui nous a pris du monde. »

Elle l’approuva tristement.

« Est-ce que vous aurez un jour votre carte du parti ? 

— Sans doute, je pense. En fait, je ne sais pas. Vous croyez que c’est important ? »

Il hocha la tête.

« Oh oui, très important. C’est la marque de votre engagement. C’est par là que vous vous démarquez des capitalistes exploiteurs, de Sarko et de sa bande de profiteurs sur le dos du peuple. Plus on sera de monde, plus on sera fort. Ségolène veut que l’on devienne un parti de masse. »

Leurs voix furent bientôt couvertes par des cris enthousiastes de « Ségolène Présidente ! » Le vacarme dura quelques minutes, entrecoupé de pauses si courtes qu’ils n’avaient guère le loisir de poursuivre leur conversation. 

 

Jean-Claude Texier

L'Elitiste

 

 

 

 

 

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L'inventaire de vos sens, un texte de Louis Delville

Publié le par christine brunet /aloys

 

delvilletete

 

L'INVENTAIRE DE VOS SENS

Fermez les yeux.

Respirez profondément.

Complétez cet inventaire en laissant parler vos sens et vos émotions.

 

Chose claires et pures :

Tintin

L'eau Bru

La mer d'un pays chaud

 

Choses troublantes :

Les OVNIS

Le vent

Les tempêtes

 

Choses qui surprennent :

Un plat inconnu mais succulent

Un plat inconnu mais pas à mon goût

 

Choses qui font battre le cœur :

Des retrouvailles

Une première rencontre

Être face à une caméra

Écouter un orchestre en train de s'accorder

 

Choses mélancoliques :

Les chrysanthèmes de Toussaint

Certaines chansons

Certaines musiques

De vieilles photos

 

Choses poignantes :

Une corrida

Un grand concerto pour piano

Édith Piaf sur scène

Jacques Brel sur scène

 

Choses qui font rougir de honte :

Rien, j'assume !

 

Choses agaçantes :

Celles qui n'avancent pas comme elles devraient (voitures, piétons, histoires…)

Le manque de respect de façon générale

 

Choses qui donnent un vertige d'émerveillement :

Les chutes du Niagara

Un grand paquebot

Un plat cuisiné sublime

La neuvième symphonie de Beethoven

 

Choses qui égaient le cœur :

Voir les étoiles dans les yeux des gens qui m'écoutent conter ou chanter.

 

Choses peu rassurantes :

Les bruits inhabituels (armée, avion, cris, tonnerre)

Une foule inconnue

 

Choses qui provoquent l'enthousiasme :

Quelque chose qui fonctionne bien jusqu'au bout et comme prévu !

Une rencontre

 

Choses fugitives :

Une odeur d'épice

Parfois certains parfums

Un oiseau sur une banche

 

Choses désolantes :

Certaines images à la télé

Une rupture à laquelle je ne peux rien !

 

Choses qui font monter les larmes aux yeux :

Souvenir de personnes disparues

Un enfant prodige jouant du piano ou du violon

 

Choses qui donnent un très grand plaisir :

Conter

Les fameuses étoiles dans les yeux des spectateurs

Recevoir des amis

Offrir un cadeau

 

Choses qui apaisent :

Ma couette

Caresser un gros chien

 

 

Louis Delville

louis-quenpensez-vous.blogspot.com

 

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Extrait de "lettre à mes anciens étudiants" de Jean Destree

Publié le par christine brunet /aloys

 

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Lettre à mes anciens étudiants

 

 

               Chapitre premier

 

 

Est-ce vrai qu'il faut travailler? Et pourquoi?

 

 

 

                                                                Si tu as faim, mange une de tes  mains et

                                                                 garde l'autre pour demain  matin.

                                                                                                                                                                             

                                                                                                 (Ma grand-mère).

 

 

 

 

Est-ce vrai qu’il faut travailler?

Question idiote.

Du moins elle peut le paraître. La Bible ne dit-elle pas dans Genèse:  "Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front"

La belle affaire! Je vous ferai d’abord remarquer que la Bible, comme tous les livres prétendus « sacrés »(?) sert de justification à toutes les conneries des hommes. C’est évidemment bien commode, car cela évite de se triturer la cervelle pour trouver les vraies solutions. Donc si j’en crois la Bible, Dieu - à qui je mets par tradition une majuscule, pour le distinguer des divinités papoues ou jivaros - aurait dit que tu dois travailler. Donc ma question est idiote puisqu’elle va à rebrousse-poil(s) de la parole divine. Autrement dit, si je ne travaille pas, je suis un mécréant, je suis le « mauvais sujet de Brassens », celui qui refuse de marcher au pas au son de la musique.

      Ma question est encore plus idiote si l’on admet une fois pour toutes pour toutes que l’homme est le seul animal qui soit obligé de travailler pour subsister. Cela aussi est une vérité incontournable. Personne n’a jamais vu un lion faire des boulons au Ruau, forer des puits de pétrole ou compulser des dossiers dans un ministère. Personne n’a jamais imaginé un moustique creusant des tunnels, conduisant un bus ou érigeant des gratte-ciel et encore moins un setter régler la circulation à Piccadilly Circus, surtout s’il est Irlandais(!) Et tout cela pour ne pas crever de faim, de froid, de soif ou ...d’amour. Mais l’Homme oui! C’est un devoir. Voilà! Le grand mot est lâché. Un devoir. Travailler, il faut travailler. Sinon, pas de boulot, pas de sous, pas de pain, pas de vin, pas de lit, pas de maison, pas... de femme(s) non plus. Compris?

 

       Pas de questions?

       Oh! que si, bien sûr.

 

       Et ma question sera d’autant plus idiote - la réponse n’est pas dans la Bible - quand on considère que le seul moyen de s’en tirer, souvent plus que honorablement, n’est pas de travailler soi-même, mais de faire travailler les autres pour soi. Beaucoup l’ont compris. C’est pour cela qu’il y a des patrons et des ouvriers, des employeurs et des employés, des exploiteurs et des exploités. Ceux-ci travaillent pour ceux-là. Nous en reparlerons plus tard, car chaque chose en son temps. Et comme dit le proverbe: « Chacun à sa place et les vaches seront bien gardées ».

 

 

      Mais revenons à notre propos. Et commençons par une citation latine, cela fait très bien dans le décor et ça prouve que l’on a de la culture, même si elle n’est qu’un vernis qui s’écaille très vite. In illo tempore... (en ce temps-là, pour ceux qui n’auraient pas compris),  il y a des milliers d’années , il y avait la nature. Des arbres, des fleurs, des rivières, des mers. Il y avait aussi des oiseaux, des poissons et des ... iguanodons, comme ceux de Bernissart. Et puis un jour, (quelques années plus tard) est apparu... l’Homme, « le roi de la création » (sic). Et oui, pardi! Notez, il n’était pas très évolué, notre bonhomme, du moins on le prétend. La suite va le montrer. Encore que si l’on compare avec l’Homme de maintenant, on peut se poser des questions... toujours aussi idiotes.

 

   Au fait, cet homme, que faisait-il? Oh! c’est très simple: il se comportait comme les autres animaux. Il pêchait et chassait pour manger; il cherchait à se protéger quand il faisait trop froid ou quand il pleuvait trop. Il paraît qu’il pleuvait beaucoup plus que maintenant. C’était le « déluge » le bien nommé. Vous voyez qu’on ne peut l’éviter, cette Bible. Quelle mine de références; point n’est besoin d’une grande bibliothèque. Et ensuite? Ah! j’oubliais. Il faisait aussi l’amour. Sans doute pour peupler la terre, parce que , prétend encore la Bible, Dieu aurait dit: " Croissez et multipliez-vous ". Bref,  "l'Homo primitivus " passait son temps. Et comme la journée valait vingt-quatre heures, comme maintenant, quand il avait mangé, qu’il était bien à l’abri et qu’il avait bien honoré sa compagne, savez-vous ce qu’il faisait? Vous donnez votre langue au chat? Et bien, il dormait. Il se couchait avec les poules et se levait au chant du coq. Et chaque jour, il recommençait. A sa manière, il écrivait - façon de parler - « l’Eloge de la paresse ». Et cela dura... un certain temps. Combien d’années? Nul ne le sait et je ne vais pas discuter avec les paléontologues préhistoriens pour décider si ce fut six mois ou un million d’années.

 

       Ce qui paraît à peu près sûr, c’est que les choses vont changer. Parce que l’homme est aussi le seul animal qui n’est jamais content de ce qu’il possède. Ce désir de toujours obtenir plus - ce que certains appellent le « progrès » - fait que la mentalité va se transformer parce que les conditions de vie vont changer. Une nouvelle notion va apparaître qui créera de nouveaux rapports sociaux entre les hommes: la hiérarchie. Autrement dit, la relation d’autorité, le pouvoir avec toutes ses conséquences parmi lesquelles l’oppression sous toutes ses formes.

 

     Comment ce changement s’est-il déroulé? On en est, bien sûr, réduit aux suppositions. Peut-être un individu plus rusé - plus pervers - que les autres va se détacher du groupe qui va peu à peu lui reconnaître un certain pouvoir. Comment? Allez donc savoir puisqu’il n’y a pas de trace écrite. N’oublions pas que tout ceci se passe il y quelques années, à une époque où l’homme se contentait, croit-on, de grognements et de cris. Cela n’empêche pas que l’on peut très bien imaginer comment les choses se sont produites. L’imagination est une faculté humaine qui est à la base des plus grandes découvertes. De plus, la connaissance que l’on peut avoir du comportement des individus peut très bien expliquer le processus de prise de pouvoir. Le « coup d’État préhistorique », quoi!

 

       Tout le monde sait que la nature, ça existe. Elle est multiple dans ses formes et ses manifestations. Il y en a une qui, de tout temps, a fichu la frousse: la foudre. Astérix craignait que le ciel lui tombât sur la tête. C’est encore vrai maintenant. Pour s’en protéger dans certaines régions, on brûle un cierge à un certain Saint-Donat. Comme quoi, Armstrong a eu beau marcher sur la Lune, en ce début  de XXIème siècle, les superstitions ont la peau dure.

   Le Ruau est une entreprise du complexe Cockerill-Sambre qui lamine l’acier. L’expression « va faire des boulons au Ruau » est péjorative à Charleroi. Va te faire...

   Avec une majuscule, nom de Dieu! On nous doit bien ça.

   Remarquez la gradation dans le  malheur!

   Un peu plus de 7000  si l’on en croit les Témoins de Jehovah, particulièrement soucieux des chiffres. Quelques millions de plus,  d’après les dernières découvertes.

   Cela fait beaucoup de questions idiotes, direz-vous. Très juste, car vous pourriez  croire qu’il n’y a que de telles  questions. Ce n’est pas une raison pour les éluder. Patience, cela va venir. D’accord?

   Excusez du peu, mais cela n’a strictement rien à voir avec Honoré ni de Balzac ni de  Marseille.

   Allons, allons! petits mal tournés!

   Le grand philosophe Érasme a bien écrit l'Éloge de la folie ». Et il a bien fait. Alors, allons-y gaiement!!!

   Ouf! Pour parler de ceux qui courent après le « vieux ».

 

 

 

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Une approche pédagogique du conte, une étude passionnante proposée par Jean-Michel Bernos

Publié le par christine brunet /aloys

 

1e Couverture MML

 

Une approche pédagogique du conte

 

 

Un peu comme Anne-Marie Jarret-Musso qui écrit des histoires à lire à voix haute (le bonheur est dans le conte), je me suis essayé depuis longtemps au conte traditionnel. On réalise en écrivant, que la structure du texte devrait suivre une logique et une construction qui nécessitent de respecter l’esprit même du conte.

 

Quand j’ai terminé le récit (intégré dans mon ouvrage Merci Monsieur Leacock) j’ai senti qu’il fallait clarifier cette méthode. C’est sans doute au sens « technique », la partie la plus intéressante du conte.

 

Comme cette « explication » n’a pas été « ajoutée » dans le livre (en cours de référencement chez Chloé des Lys), j’ai pensé intéressant de partager avec vous ce passage. Il figure donc à la fin du récit présenté ici :

 

 

 

 

LES MELONS DES COLLINES

 

 

 

Antoine était un agriculteur des collines, un homme de la terre. Son unique champ dans les restanques, bien plat et régulier, recevait toute l’année un généreux ensoleillement. Il était fait d’une terre brune dont les mottes se brisaient facilement sous la pression des doigts.

Pour atteindre son lopin de terre, Antoine devait longuement gravir le difficile chemin caillouteux.

 

Antoine était un éleveur de melons. Il ne les faisait ni pousser, ni grandir en sucre et en couleur, car l’eau et le soleil se chargeaient de cette tâche, mais il les caressait de sa binette, leur choisissait un lit de feuilles généreuses, les berçait de ses mains rudes de travailleur. Antoine était un éleveur de melons.

Son père, en quittant ce monde, lui avait légué un cheval vigoureux et la charrette au réservoir de fer blanc qu’il avait construit de ses propres mains. Ainsi, notre ami des fruits orangés pouvait-il chaque jour leur apporter un peu d’eau.

 

Ce travail, Antoine l’accomplissait au prix d’un gros labeur tout le printemps et durant le début de l’été. Il ne s’en plaignait jamais et aurait pu continuer longtemps. Il se satisfaisait de beaux fruits gonflés de jus sucré, appréciés de tous sous l'appellation de « melons des collines ».

Pourtant le hasard devait venir troubler ce délicat équilibre.

 

Martin, du village, dénommé le cérébral, vint un jour à croiser le chemin d'Antoine.  On le nommait ainsi depuis le temps de l'école communale parce qu'il cassait toujours les pieds de ses camarades par ses élucubrations et inventions.

Antoine l'appréciait bien, mais ne l'avait pas revu depuis un petit moment. Ils devaient se croiser sur ce chemin étroit des collines ; Antoine montant de l'eau, Martin descendant avec son âne chargé de planches et de madriers.

Il lui était venu, à ce fada de Martin, l'idée saugrenue de construire des charpentes. Ce sont ces entremêlements de poutres qui servent à soutenir les tuiles couvrant les toits de nos maisons.

 

Allez savoir pourquoi ? Martin, qui d'ordinaire soignait ses oliviers (vous avez remarqué, on ne dit pas « élever des oliviers ! »), s'était aperçu en regardant le ciel, allongé dans l'herbe les jours de pluie, qu'il arrivait qu'on se mouille. Animé d'une soudaine frénésie, il avait alors songé à construire des toits partout où les villageois auraient besoin de ses services.

Ses anciens camarades imaginaient que, de cette façon, ses divagations serviraient enfin à quelque chose.

 

Martin avait échangé son champ d'olivier contre l'âne du Père Michel, sans trop se poser de questions quant à la valeur de l'un et de l'autre. Lorsque nous faisons du troc, nous cherchons surtout à échanger quelque chose qui nous lasse, contre quelque chose qui à nos yeux trouve grâce.

 

Le Père Michel pouvait enfin s'allonger dans l'herbe entre les oliviers et regarder le ciel, tandis que Martin nanti d'une fière bête à bât pourrait construire des toitures, ramenant de la scierie derrière la colline, des planches et des madriers.

Antoine montait donc de l'eau pendant que Martin descendait des billots… des billots de bois, des planches et des madriers.

 

Suivez-vous les enfants ? Il y a beaucoup de monde à ce point de notre histoire.

Bon ! Antoine élève des melons, Martin qui soignait des oliviers a été remplacé par le Père Michel. Le Père Michel, en échange du champ d'oliviers a donné un âne à Martin ! L'âne ne s'appelle pas Martin, il se nomme Anselme ! Quant au cheval d'Antoine, tout le monde l'appelle « Monsieur ».

 

Et Martin que fait-t-il maintenant ? Non, il ne bâtit pas des toitures, mais construit des charpentes. Vous vous souvenez, c'est ce qui soutient la toiture, pour éviter que la pluie ne nous tombe dans les yeux.

 

Antoine, s'étonnant d'une si grosse charge sur le dos de l'âne, le fit remarquer à Martin. Martin finit par l'entendre, ce qui les amena à dialoguer au sujet de leurs différents gagne-pain. C'est-à-dire qu'ils eurent une conversation. Elle se transforma vite en pourparlers puis en tractations et finit à travers une négociation, par une entente.

Ce sont des mots un peu compliqués qu'utilisent les adultes afin de dire qu'ils sont d'accord pour faire du troc. Vous souvenez-vous ? Échanger quelque chose qui ne nous convient plus, pour quelque chose qui nous convient mieux.

 

Martin descendit vers le village avec Monsieur… Le cheval, chargé de planches et de madriers, suivi par Antoine qui avait attelé la charrette du réservoir au dos de l'âne Anselme, laissant au préalable s'écouler l'eau dans les vignes des coteaux.

 

L'attitude d'Antoine vous paraîtra sans doute étrange si je ne vous racontais ce que ce troc comprenait :

Vous vous souvenez certainement du surnom de Martin à l'école. On l'appelait « le cérébral » ce qui veut dire que son cerveau était toujours l'objet d'une réflexion, d'une nouvelle idée ou de quelque invention.

 

Au village demeurait et travaillait un autre larron devenu menuisier. Bon garçon, très travailleur, Bastien avait fait le tour de France. C'est un parcours fort réputé pour apprendre un métier et devenir un jour ce que l'on appelle un « Compagnon du Devoir ». Un excellent ouvrier, parmi les meilleurs du pays.

 

Pour devenir ce très bon menuisier Bastien avait construit « son ouvrage ».  Une pièce  qu'on réalise   sous la  direction  d'un  tuteur – un autre très bon ouvrier – pour montrer qu'on est capable de réaliser de belles et solides choses.

Ainsi Bastien avait construit une roue à aube, comme celles que l'on voit sur les moulins utilisant la force des rivières pour moudre le blé. Mais celle-là avait ceci de particulier que le mouvement rotatif vertical était transformé par l'intermédiaire d'un couple conique, en mouvement latéral.

 

Martin connaissant l'existence d'un torrent souterrain dans la colline, avait imaginé qu'en récupérant l'eau dans les petits godets de la roue à aube, il serait facile pour Antoine d'arroser son champ de melons.

 

Anselme… l'âne se chargerait de ce travail. Tournant au-dessus du torrent dans un mouvement circulaire, il entraînerait la première roue, qui à son tour ferait remonter l'eau vers une rigole en amont, c'est-à-dire plus haut que le champ de melons.

 

Ingénieux ce Martin ! Il suffisait de convaincre Bastien de céder sa roue à aube qui, elle aussi, servirait enfin à quelque chose.

Antoine possédait un âne et une citerne. Que pouvait-il proposer à Bastien pour sa roue à aube ? Sans âne, plus de mouvement de la roue, plus d'eau pour arroser les melons et l'âne n'avait pas assez de force pour entraîner la citerne pleine d'eau vers les hauteurs.

 

Martin le cérébral avait pensé à tout !

Le Père Michel aurait bien aimé récupérer une citerne pour conserver l'eau qui tombait sur ses oliviers. Elle lui servirait à les arroser les années où il pleut moins. La charrette serait bien utile pour transporter davantage de bois pour les charpentes. Elle serait donc profitable à Martin ainsi récompensé de ses bonnes idées.

 

Comment payer la roue à aube de Bastien ? Martin avait suggéré à Antoine de la lui troquer… contre des melons.

Antoine, à la faveur d'une eau abondante, serait en mesure d'élever bien davantage de melons sucrés et juteux. Mais il en faudrait beaucoup pour payer une roue à aube avec un mécanisme de couple conique. Martin s'était engagé à les transporter avec Monsieur et la charrette. Il ne restait plus qu'à convaincre Bastien le menuisier.

 

Oh bonheur ! Bastien aimait énormément la confiture de melons. Il accepta le marché.

 

L'histoire ne raconte pas encore comment Bastien, dont la cave était remplie de pots de confiture de melons, décida de les transformer en bonbons. Bonbons pour lesquels il conçut une très jolie boîte en bois poli. Il m'en a offert quelques-uns et vous pourrez les savourer à la fin de cette histoire.

 

Ce que le conte nous dit aujourd'hui, c'est que tout le monde fut ravi : Le Père Michel avec son réservoir de fer blanc dans son champ d'oliviers, Martin avec Monsieur, le cheval et sa charrette,  Bastien le menuisier avec sa nouvelle production de bonbons servis dans les boîtes de bois poli.

 

Antoine finit par s'installer définitivement dans ses coteaux avec l'âne Anselme. Il y éleva des melons des collines au-delà de ce que son petit champ plat et régulier pouvait produire.

 

Ce que l'histoire nous enseigne aussi, c'est que le troc est l'occasion d'échanger quelque chose qui nous sert mal par quelque chose qui nous emballe ! Quelque chose qui non seulement nous plaît davantage, mais qui nous aide d'une façon bien plus sage.

 

Apprenez aussi que l'intelligence peut transformer la puissance d'un travail de cheval par le paisible ouvrage de l'âne.

 

 

 

Les Melons des Collines.

 

Analyse pédagogique

 

L'époque de l'histoire : Elle peut se situer entre la fin du XIXème et le début du XXème siècle, jusque dans les années cinquante.

 

Le lieu où se déroule l'histoire : Le Sud de la France. Certaines expressions la placent en Provence, sans jamais le dire, afin de développer le sens de la déduction.

 

Les personnages de l’histoire : Le personnage principal est un fruit, le melon ; mais pour lui donner plus de caractère, le conte situe son origine dans les collines. Ce sont elles qui sont le second élément de cette histoire. Les hommes ne sont pas le centre du récit. Il y a des animaux, des objets très spéciaux et particuliers : une citerne, une roue à aube, une boîte de bois poli, afin de fixer l'attention sur un aspect hors du commun. A l'image de ce que doit être un conte : un récit merveilleux.

L’intrigue : Une progressive avancée vers une solution idéale à tous les problèmes soulevés par cette histoire. On découvre peu à peu les lieux et les personnages, leur donnant à tous, par leurs particularités, une importance de même valeur. Chaque enfant peut se sentir plus proche de l'un ou de l'autre personnage. Le fil conducteur nous dévoile cependant que l'objectif premier est la culture d'un excellent melon par des moyens qui mettent en œuvre l'ingéniosité humaine.

 

Les Lecteurs ciblés : Ils sont de trois ordres, selon trois degrés :

 

Les enfants de cinq à dix ans : le premier degré : une histoire avec un maximum de mots simples et de phrases courtes, un sujet, un développement progressif, une fin heureuse. Des expressions et des mots répétés pour être retenus. Des explications à leur niveau pour les aider à comprendre des notions un peu complexes : L'arrosage des cultures, la nécessité des toits sur les maisons, la transformation des fruits en confiture ou en bonbons.

 

Les adolescents : Le plaisir de découvrir un deuxième degré, avec des notions à leur niveau de compréhension. Le bienfait du travail, le plaisir du repos ou de l'inactivité momentanée. Quelques expressions amusantes utilisant des mots de leur vocabulaire. Des notions fortes un peu inhabituelles, donc mémorisables : le troc, la mécanique ; d'autres plus courantes : la productivité, la nature belle ou domptée. Pour les plus vifs quelques visions plus motivantes : L'honnêteté, le tour de France des Compagnons du Devoir.

 

Les adultes : Pour le troisième degré. Celui précisément d'un conte avec une morale, donc un développement qui amène une réflexion puissante, dans laquelle, la citation finale prend tout son sens. Un travail de cheval : l'ouvrage d'un personnage dur à la tâche qui poursuit son objectif sans forcément réfléchir. Le paisible ouvrage de l’âne : celui d'un individu qui manque peut être de culture, mais qui avance avec ingéniosité, accomplissant davantage et de meilleure manière.

Par ailleurs, le cheval et l'âne sont des amis de l'homme utiles à celui-ci, véhiculant une image commune dans de nombreuses expressions. "Un tempérament de cheval, un travail de cheval, bourru comme un cheval" (ou une jument). Le cheval symbolise aussi bien la force, que l'âpreté au travail, l'endurance, l’élégance ou une forme de bourgeoisie, de même que l'appel de la terre.

L'Âne est un petit animal sympathique, on le retrouve dans les contes de Daudet comme dans les histoires et légendes de nombreuses contrées. Il est souvent associé à une certaine forme de naïveté : "bête comme un âne", "tu es un âne", ou un imbécile. On ne lui prête donc pas une grande intelligence, mais parfois on le trouve farceur ou astucieux.

Dans cette morale, il est évident que le cheval, dans l'expression "travail de cheval", montre une force sans réflexion. Dans la phrase "paisible ouvrage de l'âne» on dénote une attitude de labeur mesuré, continu ainsi qu'efficace. Alors que l'intelligence du cheval aurait pu supplanter la bêtise de l'âne. C'est cette mise en opposition qui crée la portée de l'expression, en suggérant au-delà d'une simple lecture, la méditation qui fixe la mémoire.

La Méthode : La progression lente et la répétition de notions que l'on souhaite mettre en avant. L'explication volontairement simple des gestes et des mécanismes mis en œuvre. La demande de participation des enfants à certains points choisis de l'histoire. Ceci afin de sceller dans la mémoire les différents personnages, leurs différentes activités, ou changements d'activités. Il peut être possible à tout moment de vérifier l'attention en demandant aux enfants à qui appartient tel animal ou objet. La technique de reformulation positive est un outil pédagogique utilisé pour s'assurer que ce qui est dit est compris et mémorisé. Dans la plupart des cas, si les enfants ne sont pas totalement capables de rapporter la totalité de l'histoire à un adulte ; il est en revanche peu probable qu'ils se trompent dans les attributions et objectifs de chaque personnage.

 

La notion la plus importante pour eux dans ce conte sera celle du "troc". Il est vraisemblable que même sans comprendre réellement la morale de l'histoire, ils s'aperçoivent d'eux-mêmes, qu'il vaut mieux un outil adapté, qu'un travail de force inutile.

 

 

 

 

Jean-Michel BERNOS

jeanmichelbernos.over-blog.fr

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Anne-Marie Jarret-Musso nous propose un second aperçu de son roman "Le bonheur est dans le conte"

Publié le par christine brunet /aloys

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Extrait deuxième partie :

 

Rosette et son ombre

 

Il était une fois derrière chez moi une ferme où vivaient les deux meilleures amies du monde, Jeannette et Rosette.

 

La partie n’était pas gagnée d’avance car il faut vous dire que Rosette n’était pas facile à vivre. C’était une jeune fille rousse à fière allure qui n’aimait pas se faire marcher sur les pieds.

Je vais vous raconter les faits, tels qu’ils se sont déroulés, c’est une histoire ô combien insolite !

 

Rosette est arrivée par un beau matin printanier en compagnie de quelques membres de sa famille : ses deux sœurs jumelles, son cousin Dédé le meneur (comme on le surnommait) qui parlait fort tout le temps, entraînant derrière lui deux cousines à l’aspect imposant qui déployaient beaucoup d’efforts pour l’imiter. Ces trois derniers n’aimaient pas les visiteurs, même les gens de passage qu’ils repoussaient avec véhémence. Cependant, Dédé avait une bonne dose d’affection pour ses proches à qui il avait fait la promesse de les protéger toute sa vie car il possédait un fort esprit de famille.

Loulou s’était rapidement joint à eux venant de je ne sais où, beau garçon et assez coureur.

Ce beau gosse ne pensait qu’à courtiser Rosette et ses deux sœurs rousses qu’il jugeait tout à fait à son goût et dépensait une grande partie de son énergie à vouloir les séduire. En contrepartie, elles avaient instauré une règle qui consistait à manger les premières, lui laissant le soin de finir les plats. Cela les amusait beaucoup.

 

Des mois paisibles coulèrent ainsi et la vie en communauté entre jeunes gens se passait sans trop d’anicroches. Jusqu’au jour où, par

un matin d’été, sans prévenir quiconque Dédé et les deux cousines sautèrent dans un camion, on ne les revit jamais. Je me suis laissé dire qu’ils étaient las des remarques et mesquineries incessantes de Rosette.

Cependant la vie continua tranquillement jusqu’à ce fameux après-midi où…

 

Anne-Marie Jarret-Musso

bonheurconterecto

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Plume, un texte de Louis Delville

Publié le par christine brunet /aloys

 

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PLUME


 


 

Et une, et deux, et trois… Caroline a compté les plumes qui tombaient ! Il faut dire qu'après cette bataille d'oreillers avec son frère, elle était la grande gagnante. Antoine avait eu beau la frapper, son oreiller avait tenu le coup !

 

Caroline s'était bien défendue, avait attaqué avec rage et très vite le tissu avait cédé et les plumes avaient volé.

 

L'enjeu était de taille : qui allait décider de l'émission que l'on regarderait ce soir-là ? Leurs parents les avaient laissés seuls pour la première fois : "Caroline et Antoine, vous êtes grands maintenant et nous vous faisons confiance ! Caroline, tu es l'aînée, à toi d'être raisonnable".

 

Comme tous les 15 juin, Michèle et André sortaient à deux pour fêter leur anniversaire de mariage…

 

Sitôt la porte fermée, Caroline avait décrété "on va regarder la Maison des Amours" ! Antoine avait dit : Ah non, pas ça ! D'ailleurs quand nos parents sont là, on ne peut pas ! Si on regardait le foot ?"

 

Les filles, c'est tenace.

 

Caroline avait empoigné la télécommande et ne l'avait plus lâchée. C'est Antoine qui avait eu l'idée de la bataille d'oreillers pour désigner celui qui pourrait décider du programme. Caroline avait accepté sachant que son oreiller était un peu usé à un coin !

 

Les filles, ça a tous les trucs.

 

Et quand les parents sont rentrés, elle a prétendu que c'était son frère qui avait eu l'idée et qui avait déchiré exprès son joli oreiller.

 

Les filles, c'est méchant…

 

Louis Delville

louis-quenpensez-vous.blogspot.com

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La porte... Jean Destree vous propose un extrait de sa pièce de théâtre

Publié le par christine brunet /aloys

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Il ne faut pas laisser la porte ouverte

 

 

 

Germaine! Germaine! Germaine! Non d'un chien, Germaine, qu'est-ce que tu fabriques encore? De quoi être enragé. Pas moyen qu'elle soit à l'heure! Où est-elle donc encore fourrée? Chez sa voisine sans doute, à bavarder comme une vieille radoteuse qu'elle est! Elle sait pourtant bien qu'elle doit être ici une bonne heure avant le spectacle. Combien de fois ne lui ai-je pas répété. Une heure avant, Germaine! Une heure avant! Il ne faut pas faire attendre le public. C'est sacré, le public!

 

Un temps. Gérard fait une nouvelle fois le tour de la pièce.

 

Ah oui! Je sais bien qu'elle marche difficilement avec sa jambe de bois. Elle pourrait quand même faire un petit effort pour être ici quand j'arrive.

 

Il fouille dans les tiroirs en pestant, sort le matériel de maquillage puis se tourne vers le public. Il soupire.

 

Vous connaissez Germaine? Ne me dites pas que vous ne la connaissez pas. Voilà plus de quarante ans qu'elle officie dans ce théâtre. C'est un personnage connu. Au fait, c'est vrai. Suis-je bête. Bien sûr que vous ne la connaissez pas. Personne ne la connaît ici, à part le directeur, le régisseur et quelques techniciens. On la rencontre, on la salue, quand on est poli, mais on ne la connaît pas. Un temps.

 

C'est vrai qu'on ne connaît pas les petits, les tâcherons, les sous-fifres. Et pourtant, elle fait partie du personnel avec les machinistes, les électriciens, les décorateurs, les techniciens de toutes sortes, les employés, les secrétaires, tous ces gens sans lesquels un comédien n'a plus qu'à remettre sa culotte - comme le proclame une chanson révolutionnaire - et s'en aller s'embaucher ailleurs. Professeur d'académie, par exemple. Ou gratte-papiers chez un vieux notaire. Notez, je n'en veux pas aux professeurs d'académies. Aux notaires non plus. Des profs d'académie! Il en faut pour éveiller les enfants à l'art de bien dire. C'est nécessaire par les temps qui courent. L'art doit être à la portée de tous et non de quelques-uns tout pleins de fric qui souvent n'y comprennent rien et qui vont au théâtre ou au concert pour se faire voir et… faire des rencontres qui rapportent!

 

Il se lève, fait les cent pas dans la loge. Il s'arrête un instant, fait mine de demander le silence, met la main à son oreille et écoute attentivement. Puis il reprend sa marche. Il parle tout en se promenant dans la pièce.

 

Germaine, c'est mon habilleuse. Elle me bichonne depuis plus de vingt ans que je sévis dans ce théâtre. Oui, oui! Vous avez bien entendu: vingt ans. Un bail, n'est-ce pas? Ah! Vous l'aviez deviné! Je me doutais bien que mes spectateurs étaient des gens intelligents. Vous êtes très forts. C'est un bon point pour vous. Quelle brave femme, ma Germaine! Une brave jambe de bois avec ses soixante-cinq ans de vie toute simple, une toute petite vie que l'on croit sans problème et sans solutions. Germaine, elle boîte.

Écoutez! Mais écoutez donc!

 

Il tend l'oreille. On entend le toc toc assourdi d'un pilon qui frappe sur le plancher devant la loge.

 

Écoutez! La voilà! Chut! Ne dites rien! Chuuut! Mais taisez-vous donc, vous allez lui faire peur. Elle a horreur du bruit. Écoutez le son de sa jambe sur le parquet du couloir. N'est-ce pas que c'est impressionnant? Non?

 

Il écoute encore, imposant le silence à la salle.

 

Et pourtant, elle ne l'a pas toujours eue, sa jambe de bois. Elle remplace l'autre, la vraie en chair et en os. C'est banal, n'est-ce pas? Comment dites-vous? Oui, oui! Vous avez parfaitement raison. C'est tout à fait ordinaire, au point que cela ne vaut presque pas la peine d'en parler. Comme la balle qui l'a fracassée ce jour de juillet 1950 près de la gare des Guillemins, vous savez, ce qui était la belle gare de Liège, en Wallonie.

 

La porte s'ouvre doucement. Germaine entre presque sans faire de bruit. Elle reste immobile, attendant un signe, puis s'approche de Gérard qui lui tend son front. Germaine y dépose un petit baiser tout maternel.

 

A l'hôpital, les médecins, de bien braves gens, ceux-là, eh bien! ils n'ont pas pu lui sauver sa jambe, parce que l'ambulance était restée bloquée par les gendarmes au Pont d'Avroy. Oui, le Pont d'Avroy, c'est à Liège, en Wallonie. Il y avait des barricades. Et ça pétaradait, et ça pétaradait! Les gendarmes à cheval chargeaient, les autopompes arrosaient les manifestants. Germaine sortait de chez le boucher et voulut traverser la rue. Pan!... plus de jambe! Comme ça! Elle est tombée sur le trottoir mais pas un gendarme ne s'est dérangé pour lui porter secours. Ils étaient bien trop occupés à taper sur les grévistes.

 

Il s'approche d'elle et l'aide à s'asseoir.

 

N'est-ce pas, Germaine, que c'est comme ça que ça s'est passé. Assieds-toi. (Un temps). Tu sais, j'étais furieux que tu sois en retard, surtout un jour comme aujourd'hui. Tu montes si mal les escaliers. Il y en a trop. Ils sont trop raides. Ils sont trop vieux, usés... comme nous. Alors, c'est fini! Ce soir, on ferme. Toi aussi, tu vas partir vers une petite vie tranquille. Soigner tes chats et tes canaris.

 

Germaine sort un mouchoir, s'éponge le front. Elle se lève et se dirige vers la garde-robe pendant que Gérard, qui s'est assis à sa table, commence à se préparer. Elle sort les vêtements un par un et les dispose sur un fauteuil après les avoir époussetés de la main.

 

Tu sais, tu es un peu ma mère. Tu as toujours été une mère, rouspéteuse mais attentive, colérique et bichonnante. Et moi, je me sens comme ton petit garçon. Peut-être ai-je remplacé celui que tu as perdu en 40 sur les routes de France, quand tu fuyais avec tous les autres et qu'une balle perdue... une de plus...

 

Pendant ce temps-là, moi, comme un pauvre demeuré innocent, je croyais sauver la patrie. Ah! Ce qu'on peut être naïf quand on a vingt ans et qu'on est plein d'ardeur et d'illusions. C'est chouette de croire qu'on va sauver le monde. Tu parles! Sauver la patrie! Ha!ha!ha! Sauver la patrie! Ho!ho!ho! Quand j'y repense! Ce n'est pas croyable! La patrie! Il chante. Allons z'enfants de la patrie!

 

(Un temps.)

 

Mais comment est-ce possible, enfin! Il chante. Le jour de gloire est arrivé! Ah! Oui! Il est arrivé, le jour de gloire! Avec les officiers qui se barraient plus vite que des lapins, dans leurs grosses voitures en nous laissant en plan devant les panzers. Sauver la patrie! Avec un grand chef qui n'attendait que ça pour se vendre aux envahisseurs en prétendant rester avec ses soldats. Oui, avec sa poule surtout. Pendant qu'on se cachait, qu'on se couchait pour éviter les obus ou les rafales de mitrailleuse, Monsieur notre grand chef, faisait l'amour avec sa nénette. Celle qu'il épousera d'ailleurs, tandis que les milliers de prisonniers wallons croupissaient dans les stalags et les oflags. Oui, c'est beau la guerre quand on est à l'abri derrière son titre de chef suprême. Ha! Ha! Sauver la patrie! Holà! La garde! Sauvons la patrie! Il chante. En avant contre la tyrannie! Sauver la patrie! Ah oui! Mais laquelle? La mienne? Un temps.

 

Mais personne ne s'en occupait, de ma patrie à moi. Et surtout pas ceux dont c'était le devoir. Sauver ma patrie, celle de mes parents, de mes grands-parents, ce petit village du Namurois qui se dépeuple parce qu'on y a supprimé le train et le tram parce que ça ne rapportait plus. Comme presque partout dans ma Wallonie où l'on a fermé les usines pour en faire naître à Hongkong, Séoul, Santiago, Libreville.

 

Il se tourne vers le public et fait mine d'interpeller un spectateur.

 

Mais qu'est-ce que je vous raconte-là? Je m'égare. Allons, Gérard, du calme! Pas de panique et surtout pas de propos indécents un soir de dernière. Si tu continues, la maréchaussée va venir te chercher à la fin de la pièce. Elle va te demander pourquoi tu commets un crime de lèse-majesté. Comme si les "majestés" n'avaient pas le droit d'être critiquées quand elles font des conneries.

 

Jean Destree

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Deux cloche art... textes de Carl Chaboum, alias Carol Trottier

Publié le par christine brunet /aloys

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Mini-promenade automnale, un texte de Claude Colson

Publié le par christine brunet /aloys

 

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MINI-PROMENADE AUTOMNALE

 

Je me dirige vers le parc et admire au passage, dans le lointain, les maisons sagement alignées sur les collines, serrant à leur cou leur écharpe de brume.

L'air est vif ; la route descend doucement. Bien vite, je suis à destination . D’abord m'assaille l'odeur de sous-bois émanant du tapis dense et mordoré des feuilles qui jonchent une terre devenue presque invisible.

Tout de suite l’œil est accroché par le mince ruban de mercure du ruisseau à contre-jour. Il n'est que miroitement mouvant. Plus loin, la mare, toujours revêtue de son uniforme vert de lentilles d'eau. Énigmatique, sournoise, même si vers le bord trône, immobile, un ballon d'enfant d'un bleu presque sombre et fluo, ocellé de noir.

Je suis seul ; il n'est pas encore dix-heures.

Délaissé, le toboggan est là,inutile, avec ses rampes multicolores : un Beaubourg rural. On entend le bruit d'un ruisseau canalisé qui, du haut de quelque rocaille artificielle que je sais là-bas, se déverse dans le plan. Un oiseau isolé survole l'ensemble en criaillant. Les trilles d'un congénère lui répondent dans le sapin, déclenchant une sorte de concert varié.

Soudain l'heure sonne à l'église du bourg. Toujours personne alentour ; l'humidité de la nuit recouvre les bancs ornés aussi de feuilles mortes clairsemées. Debout au bord de l'eau, j'écris, les sens aux aguets. Un observateur – heureusement absent – me prendrait pour un original ; qu'importe : quand l'écriture vous prend, elle prévaut !

Encore m'attarder un peu sur le mouvement d'une mère cane qui , caquetant, poursuit dans un grand battement d'ailes ses rejetons indociles et c'est déjà l'heure de rentrer, heureux d'avoir posé ces mots, d'avoir ajouté quelque chose au monde.

Au retour, me forçant à reprendre la plume, le soleil, perçant enfin les nuages moutonnants, frappe soudain l'or des feuilles, faisant naître un somptueux embrasement qui, hélas, bientôt s'éteint.

La nature joue les coquettes et moi, je peux poser le stylo.

 

Claude Colson

claude-colson.monsite-orange.fr

Claude Colson Toi-nous

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