Marcelle Pâques nous présente son recueil de poésies "Bordélique Alchimie"

Biographie
Retraitée, mariée, 2fils et 5 petits-enfants adorables !!!
Belge, née à Naast, charmant petit village
Un recueil paru en 2012 “ Bientôt les jonquilles”
En 2014 “Pourquoi pas?
En 2016 “ Les aventures de Billy” – Contes pour les enfants
Participation à une anthologie “ La marguerite des possibles”.
Participation à des revues littéraires
Mon nouveau recueil “ Bordélique alchimie”.
Et si la vie n’était qu’une bordélique alchimie ?
Un jour…
La rivière emporte
La tendresse du jour
La banalité d’un jour
Ordinaire, extraordinaire ?
Nul ne le sait
Le jour se tait
Christine Brunet a lu "Ici ou au-delà", le nouvel ouvrage de Philippe Desterbecq

J'attendais le nouveau livre de Philippe Desterbecq avec impatience. Je pensais tomber sur un livre pour enfants comme son "Livre magique" à cause, notamment, de la couverture. Mais cette fois, Philippe nous propose un recueil de nouvelles basées sur des événements vrais... Des nouvelles brèves que l'auteur a étoffées pour créer un faisceau d'histoires imbriquées, étroitement liées par des personnages qui se croisent, unis ou non par l'amitié ou les liens du sang.
Je ne m'attendais pas à m'attacher autant aux héros de ces courtes aventures ou de ces instants de vie. Peut-être est-ce le contexte ? La maladie, les décès, l'enlèvement d'un enfant par son père avec ce que cela implique dans une famille sont contrebalancés par un souffle d'optimisme rassurant et des scènes attachantes. L'émotion enveloppe tout ce petit monde ballotté par la vie et les épreuves. Elle affleure entre les lignes, bouscule les mots et happe le lecteur qui s'attarde. Les images persistent bien après la lecture pour notre plus grand bonheur.
Vous savez quoi ? J'aimerais bien croiser Dorine, Sarah, Lilou, Line, Valérie et les autres...
Quant au titre et à la première de couverture, tout s'explique au fil des pages mais ne comptez pas sur moi pour vous en révéler les secrets : il faudra lire !
Bravo, Philippe, pour ce recueil qui m'a fait passer un super moment !! A quand le prochain ?
Christine Brunet
www.christine-brunet.com
Cathie Louvet nous présente son second tome « De Glace et de Feu : l'empire disloqué »
SYNOPSIS TOME 2 : « De Glace et de Feu : l'empire disloqué ».
Les Vikings, habituellement dépeints comme des Barbares assoiffés de richesses n’ayant que peu d’égards pour les populations qu’ils dépouillent de leurs biens, n’ont ici pas moins de scrupules que les Francs et leur volonté d’étendre leur Empire, sous couvert de l’évangélisation des populations étrangères qu’ils parviennent à soumettre.
Le style, fluide et rythmé, a été retravaillé afin d'alléger certaines phrases un peu longues, offrant un texte bien écrit, à la syntaxe et à l'orthographe maîtrisées.
Le récit se structure autour de l'histoire réelle, mettant en scène des événements et des personnages historiques, et de l'histoire de personnages fictifs racontant des événements historiques, donnant de nombreux détails basés sur les documents et les recherches des historiens, notamment celles de Régis Boyer, sans pour autant alourdir le texte et ennuyer le lecteur.
L'originalité du sujet réside donc dans ces « chassés-croisés » entre le réel et le fictif dont le traitement est cohérent.
Points forts : récit bien rythmé, connaissances historiques maîtrisées, descriptions riches des situations et des paysages rendant le texte vivant, donnant l'impression d'y être, personnages attachants dont on a envie de connaître la suite des aventures.
Le second tome s'articule autour de trois axes :
- Destinée de l'empire de 819 à 859, avec pour événements phares le remariage de Louis, la naissance de son fils Charles, les révoltes de ses fils aînés, les complots internes, les déchirements entre frères laissant le champ libre aux envahisseurs, et ouvrant la voie à l'avènement d'une nouvelle monarchie incarnée par les Capétiens.
- Seconde phase des incursions vikings sur les territoires francs qui deviennent annuelles, profitant de la situation politique déplorable : ils trouvent l'embouchure de la Seine ; ils pénètrent bien plus avant dans les terres ; hivernages récurrents plutôt que de rentrer chez eux après chaque saison ; investissent les Shetlands, s'attaquent à l'île de Bretagne, colonisent l'Irlande et luttent contre la résistance celte ; alliances entre les différents chefs vikings qui leur permettent d'être partout, jusqu'à Paris.
- Destinée des personnages ou familles fictifs dont on a suivi les aventures dans le premier tome, illustrant ce qu'était le quotidien de leurs existences, évoquant une partie de l'histoire du Danemark liée aux expéditions vikings, l'opposition paganisme/christianisme en montrant le très lent mais inexorable mouvement vers la christianisation qui sera effective près de 150 ans plus tard.
FUNÉRAILLES, un texte signé Louis Delville
FUNÉRAILLES
Depuis plus d'un siècle, ma famille travaille dans les pompes funèbres. Avant on parlait de croque-mort, mais cela est tombé en désuétude.
Nous possédons un beau et grand magasin juste en face de l'hôtel de ville Un endroit stratégique à n'en pas douter !
Le pire pour nous, c'est quand quelqu'un de la famille passe l'arme à gauche. Imaginez-vous : fournisseur et client à la fois !
Pour grand-mère, on a décidé de faire confiance à un concurrent. Ce fut dramatique ! On a tout critiqué ! Tout !
La tenue du personnel, la propreté du corbillard, le bois du cercueil et même la vitesse du convoi entre la maison et le cimetière. Grand-maman avait refusé de passer à l'église suite à une dispute vieille de plus de trente ans avec le curé ! Une vieille querelle qui fut fatale à l'homme d'église qui décéda quelques mois plus tard et pour lequel, on avait bâclé l'affaire en moins de deux !
Mais il y eu une vengeance posthume, puisque nous avions appris que désormais le secrétariat paroissial conseillait de ne plus s'adresser à notre société pour les enterrements à l'église !
Notez qu'on s'en fiche, il y a de moins en moins de personnes qui ont recours aux services de la religion pour aller au paradis.
Grand-père, un vieux dur à cuire - quand je pense qu'il veut se faire incinérer ! Cela va prendre des heures - nous a réuni la famille pour passer la main…
C'est désormais, Robert, mon père, qui sera le patron. Avec lui, c'est devenu l'enfer. Un vrai tyran. Il veut tout savoir, tout contrôler, tout régenter. Il terrorise la clientèle et son personnel, le Robert !
Pourtant, moi je reste serein. Je suis son fils préféré et je sais qu'un jour viendra… En attendant, j'agrémente souvent son café "très sucré hein gamin" avec un peu de cette poudre que toute la famille ne connaît que trop bien. Il faut bien vivre, n'est-ce pas ?
Louis Delville
Blog : http://louis.quenpensez-vous.blogspot.com/
Bob Boutique nous propose la bande annonce pour son nouveau thriller "Bluff"
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Didier Fond nous propose un nouvel extrait de son roman "Les Somnambules"

Une chaleur lourde, obsédante, écrase la ville. Quel mois sommes-nous ? Quelle date ? Les saisons n’existent plus. Je sais qu’il est midi lorsque le soleil culmine à l’horizon, je sais que c’est le soir quand le ciel s’obscurcit. L’alternance du jour et de la nuit est le seul point de repère temporel qui nous reste. Quand je pense qu’avant, chaque heure avait sa signification, sa fonction, ses occupations… Tout était si bien réglé qu’il me restait peu de temps pour me rendre compte que, justement, le temps passait, à une vitesse démentielle. Il continue, d’ailleurs. C’est bien la seule chose qui n’a pas changé. J’ai seulement désormais la possibilité de le regarder s’écouler et l’entière liberté de ne faire que cela et paradoxalement, c’est au moment où je pourrais enfin le toucher du doigt, le matérialiser, que je m’en désintéresse le plus…
Nous marchons en silence dans les rues désertes. Pas un bruit. Je me souviens de mes premières promenades, seul, à travers la ville. J’ai parcouru des kilomètres à la recherche d’un visage, d’une voix, d’une présence. J’aurais préféré, je crois, marcher au milieu d’un champ de ruines. Mais tout avait l’air si tranquille, si semblable à ce qui existait avant… J’avais devant les yeux une ville qui ressemblait traits pour traits à celle que j’avais quittée quelques jours auparavant, absolument intacte, mais vide, abandonnée à son sort, condamnée à contempler dans les eaux de ses deux rivières le reflet de sa propre agonie.
Toutes ces maisons qui me dévisageaient de leur mille yeux grand ouverts, qui semblaient se pencher sur moi, me suivre du regard tandis que j’avançais le long des avenues et des quais déserts… Je me revois marchant au hasard, monologuant à voix haute, essayant même parfois de chanter pour briser l’angoissant silence qui m’entourait ; et, saisi, d’une véritable folie, grimper quatre à quatre l’escalier d’un immeuble, marteler toutes les portes de mes poings, crier les noms que je lisais, gravés sur les plaques de cuivre, redescendre, recommencer ce manège dans un autre immeuble, jusqu’à ce que, ivre d’épuisement et de peur, je m’effondre en pleurant sur les marches, la tête entre les mains. Comment, à cet instant-là, ai-je résisté à l’envie d’en finir ? Comment, alors que j’étais parvenu au bord du fleuve, ai-je eu le réflexe de me rejeter en arrière et de m’enfuir loin de la tentation ? Comment enfin, arrivé chez moi, ai-je pu tenir toute une nuit, assis sur une chaise, le regard fixé sur la bougie qui se consumait, partagé entre l’intense désir de mourir et la terrible peur de la mort ? Sans doute n’avais-je pas atteint le dernier degré du désespoir, acquis cette morne résignation, cette indifférence de ceux qui ont connu le pire et qui n’ont plus rien à attendre, plus rien à espérer et plus rien à redouter.
A deux, c’est différent. La conversation permet d’oublier un moment l’absence de la foule et le silence. Tandis que nous nous dirigeons vers les quais du fleuve, je l’entends me raconter sa vie dans son village de montagne. Il me parle de sa solitude, de cette envie chaque jour plus forte qui le tenaillait : partir. Ce n’est pas la première fois qu’il évoque devant moi son existence de reclus, et c’est d’une oreille distraite que j’écoute pour la énième fois ce récit. Il ne lui aura pas fallu bien longtemps pour attraper le virus de Saint-Jean : raconter sa vie dans les moindres détails, à la moindre occasion, devant n’importe quel auditoire, aussi réduit et inattentif soit-il. Fera-t-il bientôt comme Eralda qui tient de longs discours à son reflet dans le miroir ?
Christina Previ nous propose un poème "Murmure des murs"

Murmure des murs
Et si tout n’était que murmure
Malgré le plus dur
Du vécu dans et hors les murs
De l’humanité immature
Et si tout n’était que murmure
Effacement des sons durs
Explosion d’un bruit pur
Pour effacer les traces de torture
Et si tout devenait murmure
Dans l’écoute attentive des gens mûrs,
Sous la caresse d’un regard azur,
De nos mains tendues au travers des murs
Et si désormais les murs
N’entendaient plus que des murmures...
Christina Previ
Christian Eychloma nous propose un nouvel extrait de son nouveau roman "Ta mémoire, pareille aux fables incertaines"

« Je suppose que vous pourriez aller beaucoup plus vite que ça ? » s’enquit Bob, debout dans le poste de pilotage, balayant curieusement du regard le tableau de bord de l’étrange engin.
« Nous le pourrions sans problème, mais préférons observer la plus grande prudence » répondit le commandant Jarov, bien calé dans son fauteuil, la main sur le levier de commande. « Avec une telle pression de l’air, la portance est énorme et nos deux moignons d’aile suffiraient amplement à nous propulser vers le plafond de la grotte à la moindre accélération… Sans même parler de ces espèces de lianes qui nous barrent souvent la route et que l’on n’aurait pas le temps d’éviter ! Veillez à propos à vous tenir solidement à la poignée de sécurité… »
Bob obtempéra avant de se pencher légèrement pour scruter, à travers l’épais matériau transparent de la verrière, la profonde caverne brillamment éclairée par les puissants projecteurs situés à l’avant de la « taupe ».
De drôles de plantes ligneuses, aux longues tiges fines et diaphanes, croissaient dans tous les sens le long des parois, s’en écartant parfois pour surgir comme par magie devant le nez de l’appareil lorsqu’on les éclairait, surprenant le pilote en l’obligeant à un brusque écart. Et ces bizarres bestioles ailées, forcément aveugles, zébrant en permanence de leur vol zigzagant l’espace clos fugitivement illuminé de ces tunnels enfouis sous des kilomètres de roche…
Des bestioles qui éveillaient tout d’un coup de vieux souvenirs de lecture. Comment appelait-on ces mammifères terrestres cavernicoles aux ailes membraneuses dont il se rappelait avoir vu des photos ? Peu importait… Il était au fond à peine étonné de retrouver ici comme un petit échantillon de la surprenante faune de cette lointaine planète mère qu’il ne connaîtrait jamais. Les cours d’exobiologie qu’il avait jadis suivis sur Atlantis ne l’avaient-ils pas amené à comprendre que la vie réutilisait toujours et partout les mêmes recettes gagnantes pour s’adapter à des situations similaires ?
Des situations similaires… Il avait beau se répéter qu’il appartenait à une civilisation entièrement tournée vers l’espace, une technocratie qui ne s’intéressait aux planètes plus ou moins habitables que pour les richesses minérales qu’elles pouvaient offrir, il lui était toujours aussi difficile d’admettre que les autorités d’Ouranos aient pu ignorer jusqu’alors l’existence de cet incroyable édifice naturel. Cet immense labyrinthe sous-terrain que d’autres avaient su discrètement utiliser à leur profit.
« Et vous dites avoir des cartes suffisamment précises de ce réseau de galeries dans lesquelles nous sommes en train de nous faufiler ? » demanda-t-il, un peu inquiet. « Je n’arrive pas à croire qu’il puisse vraiment s’étendre sous toute la surface…
- C’est pourtant vrai. Enfin, presque… Avec de nombreux endroits bien moins praticables que cette portion-là, mais ça passe toujours. Et heureusement pour nous car je doute fort que nous ayons eu le temps de nous échapper par la mer !
- Vous pensez qu’ils ont détruit la base, à l’heure qu’il est ?
- Si ce n’est fait, c’est qu’ils s’apprêtent à le faire… Il valait mieux foutre le camp au plus vite, croyez-moi. Notre base de repli la plus proche n’est qu’à cinq heures de route environ. Mais ce qui me préoccupe le plus, c’est que maintenant, ils savent. Fini, l’effet de surprise !
- Mais s’ils détruisent la base…
- Ils se douteront bien que nous en avons installé d’autres et feront tout pour les trouver. Ça risque d’être « chaud », à partir de maintenant…
- Ce qui me paraît rassurant, c’est qu’ils ne disposent probablement pas de la technologie leur permettant d’explorer les fonds marins comme vous pouvez le faire… Pourquoi l’auraient-ils développée, ignorant totalement ce qui était en train de se tramer ?
- Juste un petit sursis, Bob… Cela ne nous laisse qu’un tout petit sursis avant que nous ne ressuscitions l’antique guerre sous-marine ! » répondit le commandant sur un ton désabusé. « Avec toutefois d’autres moyens que ceux dont on disposait lors des batailles navales de notre bonne vieille Terre ! On a dû vous parler de ça à l’école ?
- Oui, je me souviens vaguement de ces histoires de sous-marins torpillant des navires qui à leur tour leur balançaient des charges explosives…
- Des grenades, c’est ça… On appelait ça des grenades.
- Ces récits m’amusaient beaucoup, étant gosse !
- Ça vous amusera moins lorsque les satellites d’observation, repérant le moindre déplacement de masses métalliques dans les profondeurs, nous enverront les chasseurs suborbitaux lestés de torpilles à charge d’antimatière… »
Bob, mal à l’aise, ne répondit pas. Il se contenta de tourner la tête vers l’arrière de la cabine où Alex, n’ayant pas suivi la conversation, s’entretenait calmement avec les deux nouveaux venus responsables bien malgré eux de la situation périlleuse où ils se trouvaient tous maintenant.
Il ramena son regard sur la nuque du commandant pour poser la question qui lui brûlait les lèvres.
« Comment pourrons-nous quitter Ouranos, maintenant ?
- L’équipage de l’Exocet apprendra ce qui s’est passé ici aussitôt qu’ils sortiront de l’hyperespace » répondit celui-ci sans quitter des yeux l’avant de la machine dont les phares paraissaient vouloir fouiller les entrailles de la planète. « Ne vous en faites pas… Vous pourrez tous embarquer lorsque le vaisseau se présentera à l’entrée de notre prochaine base, là où notre sous-marin nous attend déjà !
- Là-bas aussi un énorme tube blindé, j’imagine… L’Exocet se verrouillera directement sur le sas ?
- Si la topographie du lieu le permet. Sinon, le sous-marin se chargera de vous transborder sur le vaisseau posé un peu plus loin sur le fond… »
Cet incroyable voyage sous la surface d’un monde supposé sans mystère… Le vaisseau posé sur le fond de l’océan, attendant sagement ses passagers… Depuis le début de cette surréaliste aventure, tout ça réveillait en lui des bribes de souvenirs.
Ces naïfs romans d’anticipation datant d’une époque qui se perdait dans la nuit des temps. Un de ces auteurs anciens dont il avait oublié depuis longtemps le nom et qu’on avait dû lui présenter, étant gamin, à titre de curiosité. L’auteur, à ce qu’il croyait savoir, de quelques-uns des plus vieux récits de science-fiction. De ce que l’on n’appelait pas encore - de ce que l’on n’appelait plus - de la science-fiction.
Avant, bien avant la grande diaspora. Sur une Terre qui s’apprêtait à vivre, quelques siècles plus tard, ce que peu d’écrivains avaient osé imaginer.
Christian Eychloma
L'interview de Didier Fond pour son nouvel ouvrage "Les somnabules"... La suite...

- Après avoir évoqué la genèse de ce roman, j’aimerais que nous parlions à présent de l’intrigue, du décor, des personnages. Car enfin, où sommes-nous ? Quelle est cette ville ? Pourquoi est-elle présentée comme une ville morte, abandonnée de ses habitants ? Pourquoi sont-ils partis ?
- Partis et revenus pour onze d’entre eux. Mais de là à savoir la cause de ce départ précipité… Peut-être les lecteurs vont-ils être déçus de se rendre compte que, le livre refermé, ils n’en savent finalement pas plus à la fin qu’au début sur certains points. C’est évidemment voulu. L’étrangeté de la situation entraine fatalement un environnement lui-même étrange, des personnages au comportement qui sort de ce qu’on appelle la « normalité ». Tu te demandes quelle est cette ville, si on peut la nommer : oui et non ; si elle existe ou si elle est totalement imaginaire : les deux, car bien sûr, le modèle réel est assez reconnaissable, j’ai gardé les noms exacts de certains lieux mais les distances, les éléments qui la composent ont été modifiés. Ainsi lors de la promenade nocturne du groupe à Saint-Jean, si l’on s’était trouvé dans la réalité, il aurait été impossible de voir, du bord de la rivière, la place où se réunissent les Gardiens de la nuit. De même, il aurait fallu que mes personnages soient munis de jumelles pour distinguer aussi précisément les lumières. Ainsi on peut éventuellement identifier cette ville mais les transformations spatiales en font une autre ville, qu’il devient alors difficile de nommer.
- Mais pourquoi en avoir fait un désert total ? Quelle en est la cause ?
- Cela fait partie des mystères qui ne seront jamais résolus. Chacun peut imaginer ce qu’il veut. Il faut simplement se rappeler qu’elle est absolument intacte : il n’y a aucune ruine, rien n’a changé si ce n’est que la population a disparu. Certaines solutions deviennent alors impossibles : pas de guerre, pas de bombardement, pas de missile atomique. Peut-être une épidémie, un conflit bactériologique. On ne sait pas. Simplement, les habitants ont fui, pour une raison connue d’eux seuls et même pas de moi car honnêtement, j’ignore quelle pourrait être l’origine de ce départ. Pour moi, cette ville que je voyais en pensée ne pouvait qu’être abandonnée. Encore une fois, cela fait partie de la mise en place d’un décor inquiétant et oppressant. La chaleur torride qui enveloppe la ville est également un élément destiné à mettre mal à l’aise le lecteur. Pourquoi fait-il si chaud ? Les conditions climatiques se sont-elles détériorées ? Est-ce la raison de cet exode ? Cela parait peu probable mais c’est une piste… qui ne mène en fait nulle part puisqu’aucune solution ne sera donnée.
- Au fond, il suffit d’accepter les présupposés tels qu’ils nous sont donnés, sans chercher à rationaliser les faits.
- Exactement. Et ce n’est pas toujours facile, je le reconnais, en fervent lecteur d’ouvrages fantastico-étranges (joli néologisme !) que je suis. Il faut évidemment prendre garde, à force de vouloir être étrange, de ne pas tomber dans le grotesque ou l’invraisemblable.
- En tout cas, il y a une chose qui me semble assez claire, si on excepte les membres de la Divine Trilogie : ce sont les rapports entre les personnages.
- Oui, ce que tu dis est très juste. On comprend vite leurs relations et leur état d’esprit les uns envers les autres. Les deux qui me paraissent le plus évident à analyser sont Louis et le narrateur.
- Effectivement : leur relation est très ambiguë.
- Ca dépend de quel point de vue on se place. En ce qui concerne Louis, il n’y a aucune ambiguïté chez lui. Il éprouve pour le narrateur une très vive amitié, mais cela ne va pas plus loin. Celle qui le fascine et qui va facilement le séduire, c’est Eralda. Le narrateur, par contre, est amoureux de Louis, cela se devine aisément car des indices ne cessent d’être donnés tout au long du roman. C’est ce qui rend si terrible sa situation : il éprouve un amour impossible, qui devient de plus en plus évident, mais qui est source de terribles souffrances au regard des événements qui vont survenir. En même temps, Axel ne le laisse pas indifférent sur le plan physique. Il rêve à lui, mais il ne sait pas trop quels sentiments il ressent à son égard. Ajoutons qu’il n’est pas indifférent au charme sensuel d’Eralda, ce qui complique davantage la situation. Le narrateur semble en fait être quelqu’un de très complexe, bien plus que Louis ; a-t-il vraiment vécu ou bien n’a-t-il fait que rêver sa vie ? Lui-même n’arrive pas à le savoir et c’est l’objet de sa méditation nocturne sur le balcon.
- Nous avons affaire à un groupe que le narrateur appelle « les survivants de Saint-Jean » ce qui laisse supposer qu’ils ont été confrontés à des dangers mortels. Et logiquement, ils devraient s’entraider, être amis à cause de ce qu’ils ont tous vécu, ce qui n’est pas le cas. Je vais même aller jusqu’à dire qu’ils se détestent et qu’ils ne se supportent pas. Du reste, le narrateur le dit franchement.
- Tout à fait. Chacun s’occupe de soi d’abord, même si parfois, un vague reste d’altruisme se manifeste : je pense à l’attitude d’Arabella face à Elsa qu’elle raccompagne chez elle parce qu’elle ne se sent pas bien : elle incite ceux qui n’ont pas participé à l’expédition à aller la voir. Ou bien aux regrets du narrateur quand il apprend la mort d’Elsa. Mais ce sont vraiment des moments très rares. Ce n’est qu’à la fin que le narrateur comprendra à quel point, finalement, il était attaché à eux.
- Venons-en maintenant à la Divine Trilogie : un surnom plus qu’étrange, qui laisse supposer bien des choses…
- Et que la fin est censée expliciter. Oui, en effet, les rapports qu’ils entretiennent entre eux sont également étranges, Axel le dit nettement quand il affirme qu’en apparence, ils sont souvent en train de se disputer mais qu’ils sont et seront toujours unis face aux décisions graves à prendre. Raphael paraît parfois en opposition à ses deux amis, mais c’est pour mieux se rapprocher d’eux quand c’est nécessaire. Quant à leurs rapports avec les « survivants », ils sont simples : ils les commandent, les dominent, leur imposent des règles. Vers la fin, le destin de Mona-Lisa montre clairement à quel point ils sont, tous les trois, redoutables. Et combien Louis a eu raison d’affirmer qu’ils n’étaient pas ce qu’ils prétendaient être.
- Dernière question, et pas la moins facile : pourquoi restent-ils dans cette ville à attendre Dieu sait quoi. Pourquoi ne repartent-ils pas ? Et derrière cette histoire fantastique, se cache-t-il un message, une réflexion sur l’être humain ?
- Louis pose la même question au narrateur et je vais vous faire la même réponse que ce dernier pense sans la dire à voix haute : ils sont déjà partis, mais ils sont revenus. L’extérieur n’offre plus rien, sinon que des raisons de désespérer. Autant revenir chez soi et attendre.
- Terrible fatalisme qui les enchaîne au sort qu’ils ont voulu fuir mais qu’ils subissent quand même. Belle ironie !
- C’est vrai. Mais au fond, ils ne se posent pas longtemps la question. Quant à un éventuel message derrière ce roman, assurément non : pour moi, ce n’est qu’une histoire que j’ai aimé raconter, et que, je l’espère, les lecteurs apprécieront, rien de plus. Mais chacun peut y voir ce qu’il veut : c’est le privilège du lecteur de pouvoir se l’approprier, sans tenir compte des intentions de l’auteur.