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Mais qui a écrit ce texte ????? (2eme partie)

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

point d'interrogation

 

 

 

***

Il était sept heures passées de cinq minutes quand Arnie Miller ouvrit le volet métallique qui condamnait pour la nuit l’entrée de sa boutique.

Son caractère s’était à peine radouci car la nuit ne lui avait pas porté conseil. Sa double rebuffade lui avait véritablement porté sur les nerfs. Pourtant, alors qu’il ouvrait le rideau de fer de sa boutique, le libraire tentait de relativiser. Après tout, il s’était fait remettre à sa place par un vieux solitaire un peu grincheux et un gamin taré. Il n’avait pas à s’en faire. Il n’était pas mis en cause. D’ailleurs, pour quelle raison ces refus lui tenaient-ils tellement à cœur ?

-                     Tu te retournes pas, OK ?

Arnie eut un hoquet de surprise. La voix assurée, quoique juvénile, avait éclaté à quelques centimètres de son oreille. Il ne voyait pas son agresseur, il ne sentait que l’odeur du cuir qui émanait de sa veste et son haleine de Red Bull.

-                     Ne fais pas de conneries, p’tit ! Tu veux quoi ?

-                     M’appelle pas « p’tit », vieux con !

-                     Tu veux quoi ? La caisse ? Je commence ma journée, il n’y a rien dedans, tu sais. En tous cas, pas grand-chose…

Il y eut un long silence à l’arrière. Le gamin avait l’air de mesurer l’étendue de sa bêtise. Quant au libraire, il se demandait s’il n’avait pas donné un tuyau à ce garçon. Il devrait se montrer prudent ce soir. Peut-être devrait-il investir dans un spray de défense en plus de la barre à mine placée en-dessous du comptoir.

Il n’y avait pas un chat dans la rue. Il n’y avait jamais personne quand un vieux type ou une fille se faisait agresser. Ses collègues des autres boutiques avaient tous été au moins une fois braqués, mais le vieil Arnie se vantait la semaine dernière encore de ne pas encore avoir fait les frais de la petite criminalité. Sans doute sa boutique faisait-elle plus pitié qu’envie, un constat qui le rassurait, mais ne l’enchantait guère. Aujourd’hui, il pouvait se rassurer. Ce constat, amer, était loin de le porter aux nues.

L’odeur de Red Bull se fit plus forte quand le gamin approcha ses lèvres de l’oreille velue du commerçant. Il sentit la pointe d’une lame presser le bas de son dos.

-                     Tu me files ton ‘larfeuille’ alors.

Arnie sentit des doigts s’introduire dans la poche de son pantalon de velours côtelé, puis en ressortir aussitôt pour se faufiler dans celle de son veston. Ils en ressortirent cette fois avec le butin. Il n’essaya pas de se défendre. Outre le fait que son agresseur avait la force et la jeunesse pour lui, il savait que son cuir élimé n’abritait qu’un peu de mitraille et quelques billets pour démarrer sa caisse. Il entendit le gamin farfouiller dans son bien et le bruit caractéristique des coupures qu’on fourre sans ménagement dans la poche d’un pantalon.

« Pourquoi t’as pas gratté ton billet ?

-                     Hein ?

Le jeune type soupira et lui donna une petite bourrade dans le dos.

-                     Ton billet à gratter, putain ! Tu le gardes sur toi parce que c’est joli ?

Le fameux billet doublement refusé oublié par le client d’hier matin. La veille, sans réfléchir, Arnie l’avait plié en deux et glissé dans son portefeuille fatigué. Il ne savait pas ce qui l’avait poussé à faire ça, mais il ne trouvait pas honnête de le remettre dans le présentoir avec ceux qui n’avaient pas encore trouvé acquéreur.

Il s’éclaircit la gorge avant de proposer :

-                     Prends-le si tu veux.

-                     Je veux, ouais, grogna le braqueur.

Le libraire laissa le gamin gratter la couche protectrice du billet, résigné.

-                     BORDEL !

Le commerçant se retourna à demi.

-                     Quoi ? Quoi ?

N’obtenant aucune réponse, il poursuivit sa rotation. Il se retrouva bientôt face à un adolescent – seize ans, peut-être – portant un blouson en cuir brun fermé jusqu’au cou, jeans troué aux genoux et casquette enfoncée jusqu’aux oreilles. Une moustache – de celles qu’on peine à laisser pousser entre les boutons d’acné – garnissait le dessus de sa lèvre supérieure. Le gamin louchait sur le billet qu’il tenait fermement à deux mains. Arnie remarqua que le cran d’arrêt gisait sur le sol. Le gamin ne paraissait pas s’en soucier.

-                     Quoi ? redemanda le vieux monsieur en arrachant le billet des mains de son vis-à-vis. Qu’est-ce que tu v…

Il n’acheva pas sa question. Devant ses yeux écarquillés s’étalaient plus de zéros que le commerçant n’avait jamais vus de toute sa vie.

-                     Holly shit !   

-                     Putain, ouais ! répliqua le petit loubard qui retira sa casquette pour s’éponger le front de sa manche.

Ils restèrent muets un instant avant de se regarder au même moment. Arnie vit dans les yeux du gamin une franche résolution qui l’effraya. Il n’avait pas le choix, il devait jouer le tout pour le tout.

-                     Ecoute, fils, je sais à quoi tu penses. C’est de la folie et je vais t’expliquer pourquoi. Rentre un instant dans ma boutique s’il te plaît. Il fait froid ce matin…  

Le jeune homme ne voulait pas. Revenant peu à peu de sa surprise, il redevenait crâne et demandait à son aîné ce qui l’empêchait de le poinçonner pour lui piquer le billet. La face ridée d’Arnie Miller s’émailla d’un sourire.

« Tu n’y connais pas grand-chose à la vie, hein ? Fils, tu peux faire valider ton billet uniquement dans la librairie où tu l’as acheté… ça limite la fraude, tu comprends ? Si tu me tranches la gorge comme tu prévois de le faire, ma boutique sera fermée en attendant un repreneur. Ça peut prendre des mois, des années peut-être. En attendant, la somme aura été remise en jeu.

Le petit caïd hochait la tête, convaincu. Il venait de ramasser et de ranger son couteau dans la poche de son manteau de cuir et suivait docilement le vieux type dans sa librairie. Miller n’arrêtait pas de pérorer, ravi que son mensonge prenne, lui qui n’avait jamais été filou dans l’âme.

« Voilà ce que je te propose, poursuivit-il en refermant le volet derrière eux, je valide ton billet et on partage les gains. Bien sûr, tu es obligé de me faire confiance, mais je pense que je suis dans le même cas…  

Il s’approcha du comptoir et le contourna pour se retrouver de l’autre côté, près du tiroir-caisse encore vide dans lequel il faillit y déverser la mitraille et les coupures contenues dans son portefeuille. Il prit un air d’excuse et tendit la main en direction du garçon.

« Pourrais-tu me rendre l’argent, fils ? J’aimerais mon fond de caisse pour ouvrir la boutique.

-                     Heu… ouais, ouais, fit le jeune homme en retirant de sa poche revolver l’objet de son larcin.

-                     Allez, viens ! Approche, je ne vais pas te manger, ricana le vieil Arnie tandis que sa main agrippait sous le comptoir la barre à mine.

Publié dans auteur mystère

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Mais qui a écrit ce texte ????? (1ere partie)

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

point d'interrogation

 

 

Ça avait commencé tout bêtement, par hasard. Le hasard… comme il haïssait ce mot ! Depuis, il se sentait comme un animal traqué par le Destin.

Il savait pourtant que c’était stupide, qu’il n’avait pas demandé ça et qu’on ne pourrait pas lui reprocher de s’être fait mousser pour le plaisir d’un peu de publicité. Il n’était pas comme le voisin de ses parents, qui aurait appelé la presse uniquement parce qu’il venait de s’acheter un tracteur pour tondre son gazon.

John-John, en l’honneur des Kennedy, Sizeman était un garçon timoré, à la limite de l’autisme. Sa vie était pourrie de petites manies de vieux garçon – qu’il était déjà à trente et un ans – du lever au coucher, chaque jour de la semaine, année après année. Jamais il ne dérogeait à ses habitudes.

Jusqu’à ce jour terrible où il avait fait un pas de travers. Le pas fatal, comme l’équilibriste qui avait décidé de tenter le grand saut. Cette erreur, il la regretterait encore longtemps.

John-John Sizeman allongea le pas en direction du parc et pria pour que son banc ne soit pas pris. Il avait besoin de s'asseoir et de réfléchir, sur SON banc et pas un autre. Il l'avait choisi dix ans auparavant quand il n'était encore qu'un simple étudiant en informatique. Il ne réussissait à prendre des décisions que les fesses posées sur ce bois peint. En avait-il essayé un autre ? À quoi bon si celui-ci avait toujours fait ses preuves.

Le garçon s'engagea du côté gauche de l'allée

(toujours remonter du côté gauche et redescendre du côté droit, c'était un dogme)

et avança, sans regarder devant lui. Aux autres de s'écarter après tout! John-John avait le poids pour lui.

Depuis ses quinze ans, il ne se nourrissait que de quelques aliments, tous triés sur le volet pour lui apporter de quoi survivre. Il savait que, où qu'il aille aux États-Unis, ces produits seraient là. Il pouvait les conserver pendant des années, à l'abri de leur enveloppe de métal, sans craindre la rupture de stock. Car si John-John venait à manquer de ces denrées que d'aucuns auraient nommé "malbouffe", il ne saurait pas sur quoi se rabattre quitte à... modifier le PLAN. Or, on ne pouvait, sous aucun prétexte en dévier. John-John Sizeman, moins que quiconque, n'en n'avait le droit.

Il atteignit enfin la fontaine

(il avait reconnu le dessin des pavés qui en délimitaient le périmètre)

et osa enfin un regard en direction du banc. Un couple d'adolescents s'y bécotait sans vergogne. Il leur lança son regard des ténèbres, pourtant, ces deux là étaient trop affairés pour prêter attention au petit gros à casquette qui prenait l’ombre sous le platane.

John-John devait réagir. Mais que faire dans une telle situation ? Il n’avait même pas sa place dédicacée pour réfléchir ! Il lui fallait prendre une décision, coûte que coûte.

Pris d’une soudaine rage, il fonça vers le couple enlacé et leur hurla dessus jusqu’à ce qu’ils prennent peur et s’égaient comme des moineaux suite à un coup de fusil.

Soulagé, le garçon s’écroula sur le banc pour songer à ce qu’il devait faire, à comment réparer sa bourde. Le PLAN pourrait être à jamais compromis s’il acceptait de son plein gré ce terrible coup du sort.

Tout s’était mal enchaîné. D’ordinaire, il s’arrêtait à cette librairie uniquement  pour s’acheter un paquet de chewing gums à la chlorophylle

(encore quelque chose qui ne disparaitrait pas de sitôt !)

mais ce matin, poussé par quelque démon, le libraire l’avait tenté comme le Serpent l’avait fait pour Ève .

John-John n’était pas un joueur

(trop de probabilités, trop de possibilités de sortir du PLAN).

Il fuyait tous les hasards, quels qu’ils soient puisque la vie n’était qu’une suite d’événements programmés à l’avance. Mais cet homme, Mister Miller, qu’il connaissait depuis tant d’années – cet infâme salopard devrait-il dire – lui avait tendu un billet de loterie, de ceux que l’on gratte avec une pièce ou l’ongle du pouce. Prétextant un oubli d’un client précédent, il avait essayé de le lui refiler. John-John avait d’abord catégoriquement refusé, mais Mister Miller s’était montré persuasif.

Allons, John-John, ce client a payé ce billet. Je ne peux pas le remettre sur le présentoir ! Ce serait… du vol.

Mais pourquoi vous ne le lui rendez pas à ce monsieur ? avait bredouillé le jeune homme, en sueur.

Tout bonnement parce que je ne sais pas de qui il s’agit ! avait rétorqué l’autre, vaguement agacé. Quelqu’un m’a acheté hier avant la fermeture une bonne dizaine de billets, un journal et deux ou trois bricoles comme un paquet de cigarettes, du briquet et des allumettes. Il en a oublié un sur le comptoir ! La belle affaire ! Autant que quelqu’un en profite !

Pourquoi pas vous, Monsieur Miller ?

Le vieux libraire avait pris un air gêné et écarté les bras de son gilet de mauvais goût avant de bredouiller un truc totalement incompréhensible où il était question d’éthique. En gros, il ne pouvait pas garder le billet car, s’il gagnait une grosse somme, il ne pourrait tout bonnement pas la garder. Autant que le bénéficiaire soit un client aussi régulier que Mr. Sizeman.

Le gras garçon avait noté un drôle de sourire sur la face ravinée du libraire, mais il était tellement perdu dans ses atermoiements qu’il l’enregistra sans l’analyser. Cela avait été là sa première erreur. Il connaissait bien Mr Miller et l’appréciait beaucoup car, s’il avait compris comment fonctionnait le gamin, il ne lui avait jamais fait la moindre remarque, contrairement aux autres personnes, famille et « amis » de l’entourage de John-John. Sans doute est-ce la raison pour laquelle, alors que sa raison s’y opposait farouchement, la main de John-John Sizeman s’empara du billet.

Il était onze heures moins le quart et, il n’avait pas encore entamé son paquet de chewing gums.      

***

Arnie Miller, libraire depuis l’invention de l’imprimerie, chaussa ses nouvelles lunettes ultralégères que sa femme l’avait convaincu d’acheter et se dit que, décidemment, elles ne lui allaient pas. Il avait abandonné une monture qu’il trimballait sur son nez depuis vingt ans et qui ne se seraient jamais démodées pour la simple et bonne raison qu’elles n’avaient jamais été à la mode. Il avait fixé un petit miroir sur le mur droit de son comptoir, invisible pour autrui, car Arnie avait la hantise de servir ses clients avec le nez sale. C’était une manie qui datait du début de sa carrière et qui le poursuivait encore, d’autant plus que les poils clairsemés de son nez étaient devenus une véritable forêt dense depuis que ceux de son crâne l’avaient déserté.

Toutes les heures, surtout pendant l’hiver et les périodes d’allergie, Arnie s’observait les fosses nasales quand il n’avait personne à servir.

Il était en pleine exploration quand la clochette de la porte d’entrée l’avertit que son intimité était momentanément terminée. Il fit semblant de remettre de l’ordre dans ses billets de loterie le temps que le nouveau venu se plante devant le comptoir. Il attendait généralement le « bonjour » de l’individu pour faire semblant de se sortir la tête du travail, celui-ci ne venant cependant pas, le libraire feignit de reporter tout à fait incidemment son attention vers le client.

Il y vit cette grosse limace de John-John Sizeman qui faisait tellement honte à ses parents. Arnie Miller en avait pitié – même si la première image qui venait à lui quand il le voyait était « gastéropode » – et  faisait tout pour le traiter comme un habitué de son petit commerce. Depuis quatre ans, cinq  peut-être, ce type venait lui acheter tous les jours un paquet de chewing gums à la chlorophylle qui devait soit vider en une journée, soit collectionner depuis l’enfance. Il n’entrait qu’une seule fois dans sa boutique, à neuf heures pile et jamais, au grand jamais, une seconde fois.

Pourtant, il avait devant les yeux en cet instant même un John-John Sizeman blême et tremblant qui lui tendait un billet de loterie un peu froissé, le même sans doute que celui qu’il lui avait donné de bon cœur tout à l’heure.

Je vous le rends, Mister Miller. Je n’en veux pas.   

Arnie se gratta le lobe de l’oreille et essaya un sourire, un clin d’œil et un haussement d’épaules dans un même mouvement.

Quand il avait réussi à refourguer ce billet à cet ersatz d’être humain quelque heures auparavant, il avait été partagé entre deux sentiments contradictoires. Il s’était senti l’âme d’un boy scout et d’un tentateur. À la fois, il souhaitait aider ce garçon à sortir de sa spirale infernale et, en même temps, il s’était rendu compte que le moyen n’était sans doute pas le bon. Un électrochoc d’être humain adulte pour ranimer un mulot. Il en avait la preuve de visu.

Rebonjour, John-John, chantonna-t-il. Que puis-je faire pour toi ? À nouveau…

Il grimaça intérieurement. Ces deux mots étaient de trop.

Le jeune Sizeman secoua le morceau de papier qu’il tenait fermement entre ses doigts boudinés avant de le plaquer sur le comptoir, pile entre le lecteur de cartes et les boîtes d’Oreo.

Arnie Miller remarqua qu’il n’avait même pas été gratté.

Je vous demande de reprendre ce billet, Mister Miller. S’il vous plaît… j’en veux pas.

Le commerçant s’éclaircit la gorge avant de faire la moue.

Bien. Bien. Comme tu voudras. Je le donnerai à quelqu’un d’autre en ce cas…

Et avant qu’il ait pu ajouter le moindre mot, Sizeman avait jaillit de la boutique, laissant le vieux libraire comme deux ronds de flanc.

Il revenait à peine de sa surprise quand la cloche tintinnabula de nouveau et la porte s’ouvrit sur la silhouette légèrement voûtée, mais encore alerte, de Mr Alberts.

Elmore Alberts avait passé sa vie sur les routes. Représentant de commerce retraité, il n’aspirait désormais plus qu’à profiter de sa villa, durement gagnée par des années de sacrifices. De ce qu’Arnie en savait, il n’avait ni femme ni enfant et vivait seul malgré son âge.

Comme le fils Sizeman, il venait tous les jours à la boutique, à la seule différence près que ses achats variaient.

Ils se saluèrent aimablement, prenant des nouvelles de l’un et de l’autre, puis le vieillard réclama son journal et un paquet de pastilles à la menthe. Le libraire profita de sa présence pour tenter de se débarrasser du billet refusé par John-John Sizeman. Comme son prédécesseur, il montrait une certaine méfiance à l’égard d’un cadeau qu’il jugeait injustifié. Miller et lui-même n’étaient pas si proches pour qu’il lui fasse pareil présent. Le commerçant eut beau argumenter, le représentant retraité se montra inflexible et quitta la boutique un peu irrité.

  Hé ben… merde alors ! souffla Arnie Miller de plus en plus dépité. 

Il avait passé sa vie à vendre des tonnes de trucs (parfois inutiles) et c’était bien la première fois qu’on lui refusait un machin gratuit.

Il se mit à fourrager furieusement dans son nez jusqu’à ce que la clochette retentisse une troisième fois. C’était cet imbécile de facteur. S’il y avait bien un quidam à qui il n’avait aucune envie de filer un billet de loterie c’était bien lui !

Les clients se succédèrent et plus aucun ne trouva grâce à ses yeux. Le fils Sizeman et le vieux représentant l’avaient mis dans une humeur telle qu’il ne desserra pratiquement plus les lèvres de la journée.

 

 

 

Publié dans auteur mystère

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L'attentat de Carine-Laure DESGUIN !!!!!!

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

desguin

 

 

 

Qui aurait imaginé un seul instant que je serais là, en plein centre de Bruxelles, un samedi après-midi, occupée à m'agiter les bras, des mouchoirs en papier au bout des doigts, et tout ça devant...devant....Je vous raconte...

— Carine-Laure, déjà là! Tu es une incroyable! 

— Heuuu, grrrbbbrr!

— Mange à ton aise, tu as le temps!

Ça, c'est Kate Milie qui passe en coup de vent, pendant que j'avale un sandwich (au boudin noir et chaud et aux oignons frits), appuyée contre la façade de "Chez Charlotte", place du Jeu de balles. Il pleut. je m'en fous. Une heure plus tard, un SMS, Carine-Laure, nous sommes à la Clé d'or, tu as le temps! 

Le temps, non mais ça va pas? Je file! 



Là, je rencontre Kate Milie et Dominique. Ils sont armés. Oui, oui, ils sont armés. 

— Alors, Carine-Laure, prête pour l'attenta? lance Kate, ironique entre deux lampées de potage du jour. 

— C'est mon premier attentat, je m'en sortirai, ne t'inquiète pas!

— Tout le matos est nickel, nous commençons dans quelques instants, go! continue Dominique.



C'est le marché, la place du Jeu de balles est noire de monde, ça grouille de partout. Pour un attentat, c'est le moment idéal. La tension monte. 

D'un grand sac plastifié vierge de toute pub, Dominique sort de longs rouleaux blancs, des gris, des marqueurs, des rubans adhésifs. Autour de nous, ça commence à jaser, les gens entendent le mot attentat et ça les chipote. Quand même...On dirait qu'ils attendent, mais quoi donc? Un feu d'artifice? Des explosions de couleurs? 

— Carine-Laure, continue, continue à t'agiter, tu es trop drôle! Je te photographie! 

La pluie cesse de claquer contre l'abribus (une chance), et avec mes p'tits mouchoirs, j'ai l'air d'une enfoirée. De l'autre côté de l'abribus, Dominique déroule les affiches. Nous sommes tous les trois très excités, ce n'est pas tous les jours qu'on est acteur d'un attentat dans une capitale...

Janvier-2014-Bruxelles-035.JPGLes premiers badauds s'arrêtent, regardent les affiches qui se déroulent et moi qui frotte encore, et aussi Kate Milie qui flashent tout ce qui bouge. 

— Très bien Carine-Laure, continue, tes mouchoirs essuient mieux que les miens! 

— Tais-toi et rame, Kate Milie! 

Nonante minutes tuées: accrocher les affichent sur des parois humides, accrocher les passants, expliquer, lire les textes...

— C'est super Kate, de m'avoir invitée! 

— Oh je le savais Carine-Laure qu'un attentat poétique te botterait à cent pour cent! 

Les nonante minutes suivantes, que du bonheur, de belles rencontres, des oiseaux dans le ciel, des feux qui éclatent le long des trottoirs, des bitumes qui s'envolent, des mots qui atterrissent. 

Car on ne participe pas à un attentat poétique tous les jours! 

 

Lorsque voici quelques jours Kate Milie me contacta pour m'informer qu'un de mes textesJanvier-2014-Bxl.jpg serait affiché sur l'abribus situé au coin de la place du jeu de balles et de la rue Blaes, je fus ...comment dire...aux anges, oui c'est ça, aux anges! C'est idiot mais c'est comme ça. Je n'oserais pas vous dire le pourquoi. 

C'est dans le cadre d'atelierss urbains que cet événement s'inscrit. Se réapproprier des lieux de la ville, des lieux d'attente. Et donner la parole aux mots. 



— Alors mam'zelle, le mot ville, ça vous inspire? 

Les passants sont timides au début et puis on se déride et on inscrit des mots, on s'exprime, on explique, on discute aussi. Dominique Kate et moi sommes ravis de l'ambiance, de la perplexité des gens, de leur curiosité. 

— N'ayez crainte, voici des marqueurs, écrivez, écrivez...

Ça c'est autre chose, écrire soi-même, ça impressionne, on hésite, on se regarde...

La petite Dounia, elle, elle a pris les marqueurs, joyeuse, contente de s'exprimer sur les parois d'un abribus. Dounia a dessiné une ronde de gens qui dansent. Une ronde de gens qui dansent, c'est beau ça. C'est beau dans une ville, sur une affiche accrochée sur l'abribus de la place du jeu de balles, c'est beau des gens qui dansent dans une ronde. 

— Dounia, tu peux signer, écrire ton nom juste dessous ton dessin. 

Dounia est très fière lorsqu'elle inscrit son nom dessous la ronde des gens qui dansent. 



Les minutes d'émotion, je les ai reçues en plein visage. Ça fouette et ça fait du bien. Uncl2.jpg jeune homme lit à haute voix toutes les poésies de l'abribus. Et il y en a quelques unes...Tahar ben Jalloun, Verlaine, PAscal Feyarts, Christel Marchal, Edmée de Xhavée, Isabelle De Vriendt, Jean Richepin, Francis Dannemark et ..la mienne. 

Le jeune homme ne lit pas pour lui, non non. Oh non, devant lui, qui écoute chaque mot, un homme assis sur une chaise roulante. Lorsque le jeune homme a lu mon texte "Les tissus de la ville", j'ai pensé qu'écrire n'était pas inutile, qu'un attentat poétique n'était pas inutile. Que si les Martiens zoomaient à cet instant précis, et qu'entre deux étoiles, ils fixaient sur la terre un jeune homme debout devant un abribus rempli de poésies, debout et lisant tous les mots à son grand-père assis sur une chaise roulante, les Martiens le sauraient....que la terre est belle.

 

 Des associations, des collectifs, des gens qui bougent. Plusieurs attentats poétiques dans la ville, hier après-midi. Des gens se sont croisés, se sont exprimés. Des mots et des idées ont envahi un espace urbain. J'aime ça.



Carine-Laure Desguin

http://carinelauredesguin.over-blog.com

 

Les enfants du grand jardin

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Corps et amour, un poème de Françoise CASTERA

Publié le par christine brunet /aloys

 

contrastes.jpg

 

 corps et amour

 

C’était à nos débuts  je te voyais de loin

De loin je ressentais  de loin je t’appelais        

Car déjà la ferveur qui s’emparait de moi

Augurait les moments que tu épellerais

En prenant tout ton temps en disséquant l’instant

Pour que nous connaissions ensemble l’apogée

Pour que nos corps se frottent et restent haletants

L’un sur l’autre – l’un et l’autre comme un seul – allongés

 

Je me souviens de toi et de cette lenteur

Calculée et savante qui me faisait frémir

Impatiente et ardente – c’était ça le bonheur

Quand ta main s’approchait je tremblais de désir

Et ton amour pour moi était comme une offrande

Nous étions tout collants de sueur et de joie

Entraînés tous les deux dans une sarabande

Qui cernait nos envies et aussi nos émois

 

Ton sexe tes doigts ta bouche tout était confondu

Les jeux que nous jouions n’étaient pas interdits

Et je m’étais ouverte attendant ta venue

Car tu m’apporterais un nouveau paradis

Nos gestes se croisaient    chacun voulant offrir

À l’autre son plaisir – cherchant mais pas longtemps

Les coins les plus secrets afin de découvrir

Le meilleur dans le corps et le meilleur moment

 

Quand tu exacerbais ma sensibilité

Quand tu savais comment il me fallait jouir

Quand tu utilisais ta sensualité

Tu me connaissais tant et comment m’assouvir

Je  pense qu’à nous deux dans nos humeurs mêlées

Nous inventions des jeux nous trouvions des ressources

Nous étions les artistes des joies multipliées

Et par cet amour-là  nous buvions à la source

 

 

 Françoise CASTERA

Publié dans Poésie

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Ainsi soit-il, le nouveau roman de Christian Eychloma

Publié le par christine brunet /aloys

 

couverture ainsi soit-il

 

Ainsi soit-il...

ISBN : 978-2-87459-787-9

300 pages

 

« Ainsi soit-il… » est un roman d’anticipation où l’on voit les principaux protagonistes de l’histoire découvrir peu à peu la vraie nature de leur réalité. Qui, pour aussi dérangeant que cela puisse paraître, pourrait bien en fin de compte être notre réalité...

L’aventure commence dans un établissement pénitentiaire, sur Héphaïstos, une planète à peine habitable où ont été déportés des opposants politiques ainsi que quelques « droits communs ». Profitant de circonstances tout à fait particulières, les prisonniers réussissent à tromper la vigilance de leurs gardiens pour prendre le contrôle du bagne.

Ils découvrent alors un certain nombre de choses dont ils ignoraient totalement l’existence, comme la présence d’un autre camp réservé aux femmes, avec des gardiens sadiques qu’ils devront neutraliser, et des médecins menant de cruelles expériences sur une espèce non humaine apparemment endémique de cette planète.

Après bien des péripéties, ils réussissent à quitter ce monde hostile à bord d’un vaisseau militaire abandonné depuis des années en orbite. Pour être presque aussitôt pris en chasse par un autre vaisseau envoyé à leur poursuite par Atlantis, la planète qui dirige d’une main de fer la Fédération.

Echappant à leurs poursuivants grâce à l’intervention miraculeuse de ces entités extraterrestres qui sont bien loin d’être ce que tout le monde pensait, ils arrivent enfin sur Atlantis. Où cinq siècles se sont écoulés depuis leur départ, à l’issue d’un voyage qui, en raison de la dilatation temporelle liée aux très grandes vitesses, n’a duré pour eux que vingt-quatre ans, passés en hibernation.

Et sur Atlantis, il ne reste rien de ce qu’ils avaient connu. Absolument rien.

 

 

 

Christian Eychloma

futurs-incertains.over-blog.com

http://www.bandbsa.be/contes2/eychloma.jpg


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A la rencontre de Jean-Louis Gillessen : interview sur les traces de sa pièce de théâtre, LEON, 20H30

Publié le par christine brunet /aloys

Jean-Louis GILLESSEN... Mais qui est-il ? Voilà une question que je me pose depuis qu'il a proposé, sur ce blog, un poème... ou plutôt, un hymne à la vie. Je pensais qu'il publiait chez Chloé des lys un recueil de poème... Et bien, pas du tout ! Il propose une pièce de théâtre au titre singulier... LEON, 20H30... avec quelques mots énigmatiques au-dessous "Supposez... Mais ce serait trop long à vous expliquer". Bizarre, bizarre... Non ?

 

Allez, Jean-Louis, tu te présentes ? 

1A.jpg

 

 

Je me présente sous mon  nom réel parce qu'il est déjà apparu sur des affiches, dans des critiques, en tant qu'auteur et comédien de théâtre.

J'habite actuellement à Wasseiges, en pleine campagne, qui se trouve à quasi égale distance de Namur, Louvain-la-Neuve et Liège, et à environ 75 kms de Bruxelles : vive la Belgique et ses autoroutes ! L'entité compte 4 villages et 2.500 habitants.

Je vis seul, séparé, mais suis l'heureux papa d'une fille de 15 ans, pour qui tout boule et roule agréablement. Quatre frères et sœurs, quantité de neveux et nièces.
Parents décédés. Agé de 57 ans, je suis né le 15 mai 1956.

De formation Educateur Spécialisé A1 et Infirmier, j’ai suivi des humanités gréco-latines, beaucoup voyagé en Europe. Gymnaste de compétition,  je me destinais à être enseignant en éducation physique, mais des problèmes de dos m’ont empêché de poursuivre les études, tout comme celles de médecine que j’ai dû interrompre cette fois suite à un accident de moto. Tout en travaillant, j’ai suivi le cursus de 5 ans d’un conservatoire communal en Art Dramatique, années qui m’ont enrichi sur le métier de comédien, sans que je ne pense alors le pratiquer. C’est le « hasard », même si je ne crois pas en celui-ci, qui m’a permis en 1980 de travailler dans un théâtre pour enfants pendant trois ans : j’y faisais tout, de la vente des spectacles à décorateur, régisseur, auteur, comédien, … Puis la vie a fait que j’ai cumulé multiples professions éclectiques : chauffeur de bus, gérant d’auberge de jeunesse, barman dans un tennis-club huppé (plus jamais !), saisonnier en France, directeur artistique pour une boîte événementielle, libraire, et bien entendu éducateur pendant de nombreuses années.

J’écris depuis l’âge de 8 ou 9 ans, voire même avant, avec comme élément déclencheurDSC01285 le souci de vouloir, justement, communiquer en laissant une trace concrète à mes parents, frères et sœurs, sur le tableau destiné à cet effet qui se trouvait dans la salle à manger-salon. Très vite, le tableau ne me laissant pas suffisamment de place, je suis passé à l'écriture sur feuilles puis sur cahier. Plus tard, en humanités gréco-latines, à 14 ans, dans le cadre du cours de Français, pour le premier " vrai " examen de création propre, le professeur avait proposé aux élèves de choisir entre 4 thèmes imposés : deux en dissertation et deux en poésie. J'avais mal à la tête, il faisait chaud, nulle envie de disserter, j'ai pu le faire à satiété dans les années qui suivirent. L'un des deux thèmes en poésie s'intitulait " La page blanche ". Et là, j'ai bondi sur l'occasion pour écrire cinq pages de texte en alexandrins. Emerveillé par les tragédies grecques, romaines et françaises que les professeurs nous avaient fait découvrir, je ne pouvais qu'essayer de créer moi-même quelques uns de ces chantants vers à douze pieds dont je me délectais.
Je fus encore plus surpris quand sur le bulletin apparut au mois de juin la note de ... 19 points sur vingt! J'avais pu écrire et assembler des mots que mon professeur avait appréciés! Puis j'ai cherché à retrouver des notes approximatives, que ce soit par le biais de dissertations ou d'exercices de diction et de déclamation. Heureux étais-je, les points arrivaient et me donnaient à chaque fois une bouffée de bonheur intense.

Aujourd'hui, je continue d'écrire par amour de la vie du verbe. Pour exister par la plume et enseigner, transmettre ce que je ne peux simplement dire.
Pour témoigner de scènes de la vie quotidienne, d'épisodes ou de témoignages à leur tour entendus au détour d'un café, d'une rencontre au hasard des jours plus nouveaux les uns que les autres. Pour dire tel inattendu, telle expérience, telle joie, telle douleur. Pour rapporter, raconter, conter les mouvements des multiples histoires qui déterminent un destin, un chemin, pour donner le feu à une étincelle, apporter la lumière à ce qui pourrait ne jamais paraître ou apparaître, pour partager, faire circuler de l'émotion, celle qui sous-tend nos valeurs et nos comportements. Voilà ce que représente pour moi l’écriture.

DSC04451J'aime à surprendre par le mot, le faire chanter dans son verbe, s'entrechoquer avec ses pairs, je les veux multiples et distrayants, tantôt différents, tantôt répétés, sans jamais lasser, tantôt bruts, tantôt transformés, remaniés, inventés, j'essaie de faire vivre le langage écrit comme s'il était dit. Tel est mon désir et par là-même, ce qui le fait vivre, et surtout continuer à vivre, à perdurer. Car si le désir est toujours satisfait,  satisfait à jamais,  c'est la mort du désir,  la mort de l'écriture.

Je  suis un " désireur " assidu. La pratique de l'écriture de la parole, des mots dits par l'autre ou ceux que j'imagine et que je dépose sur le papier, cette pratique s'attache à dégager l'émergence sans cesse renouvelée de ce désir qui me fait vivre.

«  Heu-reux ! » , comme disait Fernand Raynaud.

Certes je peux ressentir par quelque fulgurance un surgissement passager d'une partie du tas gris comme une caserne qui se trouve bien enfouie au tréfonds de mon être, mais alors j'écris, je pose le mot, je me réanime et je l'anime. Alors vient à la rescousse précisément un nouveau désir, que j'apprivoise, reconnais plutôt que ne le refoule, et que je m'applique à maîtriser. Je ne peux écrire sans maîtrise, fut-elle directe ou juste à la relecture : j'écris à la plume, rature, biffe, reprend, corrige, peaufine. Et les mots doivent danser et chanter. Pour moi bien entendu, mais aussi et surtout pour la lectrice, le lecteur. Si je perçois que mon désir échoue, je m'évertue à le libérer de sa première force pulsionnelle parfois aveugle, afin de le faire passer du plan alors souvent inconscient, où il resterait " immaîtrisé ", au plan conscient où il peut être assumé, réfléchi, plus précis, messager de mots plus nuancés, plus jolis, mieux choisis, mêlés, transcrits, ... ils deviennent alors mieux manuscrits, formeront in fine meilleur manuscrit. Pléonasme entre le mot adjectif et son nom homonyme.

DSC01276.JPGLe style de mes écrits ? Ils sont variés. J'ai publié de 2000 à 2007 - dans la revue R.I.F (Réfléchir, Intervenir, Former), dont j'étais membre actif pendant cette période -  des articles mensuels tantôt journalistiques, tantôt sous forme de poèmes. La revue existait (et existe encore) sous l'obédience du coordinateur de l'équipe éducative au sein de laquelle je travaillais dans un Centre d'Hébergement pour la Jeunesse dépendant de l'AWHIP. Je m'occupais de la mise en pages, de l'édito, et mes articles relevaient tantôt de l'actualité sociale, tantôt le plus souvent tournaient autour d'un thème que je choisissais librement (ex: la précarisation, les familles recomposées, la transcription d'un témoignage, les droits du père séparé, de nombreux poèmes à thème social, ou complètement hors ce sujet.)

Comme dit plus haut, j’ai également participé activement à l’écriture en groupe de pièces de théâtre pour l’enfance et la jeunesse. Aujourd’hui je m’adonne toujours à la rédaction de poèmes et d’articles de fond journalistique. Je remercie d’ailleurs Christine Brunet qui publie et publiera encore de temps à autres quelques uns de mes textes.

Mon univers littéraire ? Tout récemment les ouvrages de mes nouveaux comparses que je commence à découvrir chez CDL Chloé des Lys, je ne citerai pas de noms pour ne pas faire de jaloux, et j’ai du pain sur la planche car la production est éclectique et prolixe  (rires) ! L’intensité de la lecture dans ma vie a beaucoup varié selon les périodes de ma vie. Un peu, beaucoup, passionnément selon les  disponibilités. De fait j’ai repris des études par deux fois dans la trentaine puis la quarantaine, tout en travaillant et en élevant ma fille Manon. Lorsque je travaillais full time, temps plein, tout en étudiant, j'ai plus lu des livres en rapport avec les études susnommées, car je ne pouvais pas concrètement lire autre chose, si ce n'est le journal, et l'un ou l'autre magazine littéraire (ou pas). Je me souviens (rires, parce qu'il était deux ou trois heures de la nuit et que je devais assurer le réveil, petit-déjeuner + la gestion des départs à l'école des enfants dits à trouble du comportement lors des gardes en tant qu’éducateur) je me souviens donc avoir lu tout un temps Le Journal du mardi, dont le rédac chef était le journaliste Bouffioux.
Comme beaucoup,  j’ai fort été marqué et influencé par les «  classiques  »  lus en humanités, j'ai fort apprécié dans le désordre pendant cette période et les années qui suivirent tant Hugo, Tolstoï, Zola, Stendhal en passant par Alfred de Musset, Georges Sand, Verlaine, Rimbaud, Voltaire, Tchekhov, Pirandello, Camus, Sartre, la liste est trop longue et certes non exhaustive, j’en oublie une quantité incroyable, puis Stefan Zweig, Sagan, tant cette vague donc que  de nombreux romans selon les époques et les modes dont je n'ai plus en mémoire les titres ni ne pourrais ici retrouver les auteurs (habitant sur seulement 83 m2 de surface, j'ai vendu une bonne partie des livres lus, même si certains sont encore "casés" dans des vieux casiers AMP de mon ancienne librairie (rires). Je voudrais citer Roland Topor, Dubillard du même prénom pour ses fameux Diablogues et autres,  Dostoïevski, l'intégrale des textes de Raymond Devos, ceux de Pierre Desproges, des maîtres en la matière, Guy Bedos, j'apprécie fort Philippe Labro, et dans un tout autre registre passionnément le regretté généticien et philosophe Albert Jacquard, le sociologue Joseph Basile ( chroniqueur dans la LLB) et j'oublie ici quantité d'auteurs lus avec grand intérêt, mais que ma mémoire ne pourrait retrouver pour l'heure ...

gillessen1Que vais-je publier chez CDL ? Une pièce de théâtre intitulée " Léon 20 H 30 ", inspirée d'un fait divers, au départ irradiant de banalité, qui m'est arrivé.
La pièce relate l'histoire de Léon. Son histoire qu'il raconte. Passager sur une moto, ce jeune étudiant en médecine est victime d'un accident de roulage. La moto percute une ambulance à vive allure et il subit un traumatisme crânien sévère. Il est alors entraîné dans une histoire clinique longue de dix ans, où le milieu du médico-légal se révèle être impitoyable et surprenant. De victime Léon devient comme accusé. La pièce, dénonciatrice d'un système, se veut néanmoins résolument drôle et optimiste. Elle a été jouée à de nombreuses reprises et en plusieurs endroits, le total de ses diverses créations a réuni huit ou neuf mille spectateurs.        

Niveau reconnaissance, j'ai connu la joie d'être reconnu (oui, j’apprécie fort ces mots de la langue française «  connaissance »  et « reconnaissance  ») par des critiques positives de quotidiens belges et autres hebdomadaires. J’ai pu bénéficier d’un passage à la RTB radio Namur et à la télévision au JT de 19H30 sur la RTBF, qui présentait un extrait filmé par leur équipe au splendide Espace Léopold Cedar Senghor Place Dumont à Bruxelles. Sans compter  la reconnaissance du public. Mais pourquoi avoir attendu tant de temps alors pour faire éditer le texte ? Je pense que l’évidence ne m’apparaissait pas,  j’ai mené une vie fort remplie (qui n’est pas finie !), et ce sont ma fille, des amies et amis qui m’ont convaincu d’entreprendre la démarche : aujourd’hui j’ai fait le pas sage qui s’imposait.      

Il est vrai que j’éprouve des difficultés à «  accepter  » un texte définitif quel qu’il soit : je ressens le besoin de changer tel ou tel passage, remodeler, peaufiner, mais j’en ai déjà parlé plus haut à propos du sens que je donnais à l’écriture et concernant ma façon d’écrire. Je peux ajouter que j'écris toujours au stylo d'abord, puis je transcris sur ordi. Parfois en écoutant de la musique. Souvent la nuit. Il m’arrive régulièrement de me relever pour jeter sur le papier une idée. Parfois cela me prend deux minutes, parfois je les prolonge en heures ! Le soleil se lève, j’écris encore, je ne vois plus le temps passer quand, à onze heures du matin, … j’ai faim !

Je constate alors que j’étais à la plume comme on était au charbon pendant huit à 10 heures d’affilée. Mais la joie, le bonheur, la jouissance sont intenses.

DSC04455.JPG

Des projets ? Ha, des projets, oui, ça bouillonne là-dedans ! Je m’attèle  à la mise sur pied d'une nouvelle création de ma pièce dans laquelle je jouerai et ferai la mise en scène : je dispose de l’endroit pour les répétitions (la salle de gymnastique de mon village), et pour les représentations de la merveilleuse salle qu’est le centre culturel de la ville de Wasseiges (Ferme de la Dîme). Je compte pouvoir « tourner »  avec la pièce dans quelques villes-clés de Belgique. A l’heure venue, je ferai connaître les dates et lieux de représentations sur le blog Aloys, avec l’autorisation de mon amie Christine Brunet.

Parallèlement je continue d'écrire ardemment, tout en préparant l'édition de Léon. J’ai commencé à m’attacher à la création d'un blog que je veux être attractif, rédigé correctement, à l'aspect non rébarbatif et sans couleur d'amateurisme. Cela prend du temps. Pour l’instant, il n’est pas très original, j’en reste aux balbutiements. Je souhaite continuer à travailler sur un projet d'écriture également théâtrale qui a pour thème l'éducation, au sens large du terme, mais plus particulièrement vue par l'œil d'un éducateur passé par multiples expériences, tant au niveau du terrain avec les enfants que celui des formations, séminaires, contacts avec les collègues, réunions d'équipes, de synthèse concernant un enfant patient, etc. J'abrège : le projet est la réalisation d'un "One man show" sur le ton principal humoristique, auto dérisoire et critique par rapport au thème abordé. Il va de soi que, tout comme pour la quasi majorité de mes textes, je m’inspire de «  qui  »  et de «  ce que  »  je vois et observe autour de moi, alentour dans la société du tout venant.

Cela me permet, et j’en terminerai par ceci, d’écrire en en-tête de ce que je publie :

« Toute ressemblance avec des personnes existant

ou ayant existé n’est pas fortuite »

Jean – Louis  Gillessen

 

Allez, je vous propose de découvrir quelques lignes de cette pièce de théâtre qui, je dois l'avouer, m'intrigue fortement...

 

DSC04459

 

P R E A M B U L E ( sur scène )

 

 

  Un médecin féminin

 

En blouse blanche, elle vient s'asseoir

 sur une chaise faisant partie du décor

 déjà planté de la scène I.

Un éclairage bleu est  tamisé.

 

 

 

Fin de journée. J'ai passé l'après-midi avec Léon. Tout a changé.

Je vous répète qu'il s'agit là d'un état démentiel qui ne nous paraît pas susceptible d'amélioration, étant donné sa relation à des lésions irréversibles, par nature, du cerveau. " ... C'était il y a dix ans, une phrase parmi tant d'autres issue du dossier médico-légal de Léon.

Supposez, mais ce serait trop long à vous expliquer.

Alors nous ne pouvons pas en parler, me direz-vous. Bientôt, si, et vous avez raison,

il faut connaître Léon. Cet après-midi, à dix-sept heures, il est parti.

Pour aller au théâtre, à vingt heures trente, pas loin d'ici, peut-être ici-même.

Il m'a dit qu'il vous " dira ". C'est étrange, j'ai passé quelques heures en sa compagnie, et je parle un peu comme lui. Mais je ne sais toujours pas s'il est vraiment guéri.

J'irai le voir ce soir. Ce qu'il a certes oublié dans ce qu'il a écrit, je l'ai retenu pour lui dans ce qu'il ne dit pas. Il sera surpris mais ravi de découvrir ces quelques phrases perdues sur quelques feuilles trouvées dans quelque pile de ses quelques papiers.

C'est vrai qu'il en a trop. Des papiers. Entassés épars sur un dossier dérangeant, comme pour le couvrir sans trop l'étouffer. Le dossier.

Mal rangés, dérangés. Les papiers sur le dossier. Voici l'oubli de Léon.

 

( Sur ces derniers mots, le médecin soulève une pile de feuilles qu'elle projette

 

en l'air : les feuilles par dizaines retombent éparpillées sur la scène. )

 

 

Publié dans interview

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Silvana Minchela : un interview dans le blog d'Elodie Lemaire pour LIMAGINARIA

Publié le par christine brunet /aloys

 

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La Terre nous dit A Dieu a été le premier roman chroniqué en cette année 2014. Suite à sa lecture, et touchés par la plume pleine de tendresse et de poésie de son auteur, nous avons voulu en savoir plus. 
Interview réalisée pour Limaginaria en janvier 2014.

Felixita : Bonjour Silvana, pour commencer, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Silvana Minchella : Je suis descendue de ma montagne du sud de l’Italie, à l’âge de cinq ans, pour suivre mes parents à  Bruxelles.
Mais je pense qu’une partie de moi est restée là bas et c’est elle qui capte et me renvoie les histoires que j’écris.
Si la montagne m’a offert l’alliance avec la vie sauvage, la ville m’a permis de découvrir les livres.
J’ai été prise de boulimie dès le premier contact visuel puis tactile avec la merveille qu’est un livre… son odeur, la sensualité du papier, les mots qui murmurent ou crient. Je les voulais tous, c’était mon seul désir.  J’en oubliais de manger et de dormir.
Tout naturellement, j’ai commencé à écrire des poèmes.  A l’adolescence, ce furent des nouvelles et des lettres d’amour…
Vers la trentaine, j’ai découvert la pensée de plusieurs guides spirituels et ce fut une deuxième naissance.  Depuis, cette quête ne me quitte pas.
La petite fille en haut de la montagne me dit qu’elle sait tout cela depuis toujours mais que je ne l’écoutais pas!

F : La Terre Nous Dit A Dieu est-il votre premier roman ? Quel est votre parcours littéraire ?La Terre nous dit à dieu
S.M :
 C’est, à ce jour, mon seul roman. Le deuxième est en cours d’écriture.  J’ai publié plusieurs recueils de nouvelles, un livre de poésie, des contes pour enfants.

F : La Terre Nous Dit A Dieu est un ouvrage plein de poésie et de tendresse. Quelles ont été vos sources d’inspiration pour ce titre ? Comment avez-vous abordé la création des personnages ?
S.M : La poésie et la tendresse, ainsi que l’humour, se retrouvent dans tous mes ouvrages.  " La Terre nous dit à Dieu" reste pour moi un grand mystère.  Je l’ai "reçu" et écrit sans en changer un virgule.  Tous les matins, à l’aube, j’étais tirée hors du lit et menée au clavier. Par qui? Par quoi? Mystère… J’écrivais, dans un état second, et j’avais très froid.  Soudain, je me réveillais, je relisais et découvrais le texte dont j’ignorais tout!  Il m’arrivait de pleurer, parfois je voulais changer le cours des choses.  Impossible.  L’histoire et les personnages cherchaient un canal pour se matérialiser, ce fut moi.

F : Le roman traite aussi de sujets plus écologiques. Êtes-vous écologiste ? Quel regard portez-vous sur la planète et les créatures qui la peuplent ?
S.M : Je ne suis pas écologiste.  Ce mot ne signifie rien pour moi. J’aime passionnément cette merveilleuse Planète et tout ce qui la peuple. Jamais je ne pourrais faire du mal à un arbre, et l’idée de manger un petit animal me révulse l’estomac.
Je pense que les humains vivent en état d’hypnose, coupés de la Source, et qu’ils sont très malheureux.  Je les aime.  Si les messages contenus dans mes livres pouvaient en aider quelques uns, j’en serais heureuse.

F : Avec La Terre Nous Dit A Dieu, vous avez laissé un message à destination des adultes. Vous arrive-t-il, avec vos mots très poétiques, d’écrire pour les plus jeunes, ou d’écrire dans d’autres genre de littérature ? Si oui lesquels ?
S.M : Oui,  j’ai écrit  " La princesse Amandine" pour les petits.  De très belles illustrations l’accompagnent.  Ce sont des messages d’amour, de gratitude, d’espoir.
On retrouve ces messages dans le recueil de nouvelles  " Eveil"  destiné aux adultes.

F : Vous publiez votre roman chez Chloé des Lys, comment s’est passé le travail de recherche d’éditeur ? Avez-vous envoyé le texte chez plusieurs éditeurs ou un seul ?
S. M :  La recherche d’un éditeur m’a appris la patience et le lâcher-prise.  Beaucoup de réponses du style  " Votre travail est bon mais ne correspond pas à notre ligne éditoriale".   Il semblerait que les romans policiers, les thrillers et les histoires érotiques soient plus appréciés par le grand public.  Concernant " La Terre nous dit à Dieu", je pense que le titre fait peur.  Ce n’est pourtant pas du tout un livre catastrophe.  Finalement, je fus contactée par le directeur de Chloé des Lys pour aller signer mon premier contrat. Il s’agissait du recueil de nouvelles "Eveil".
Chloé des Lys aime beaucoup mon écriture, le comité de lecture me fait toujours un accueil chaleureux.  Ils ont publié trois ouvrages  :  Eveil  -  La Terre nous dit à Dieu  -  Les louves -

L’année dernière, Edilivre a publié un de mes recueils de nouvelles  " Jeux de dupes" qui parle d’aventures à la fois drôles et cruelles sur les sites de rencontres.

F : Comment s’est passé le processus éditorial, a-t-il été long entre le moment où le roman a été accepté et le moment où le roman a été publié ? Comment travaillez-vous une fois le roman accepté ?
S. M : Eh oui, il ne suffit pas d’écrire, de trouver enfin un éditeur.   Chez Chloé des Lys par exemple,  il faut attendre plusieurs mois pour réaliser la mise en page, le choix de la couverture, l’impression et la livraison.  Et après, une fois passé l’émerveillement de tenir en mains son nouveau livre, ii faut redoubler de persévérance, de créativité, de travail … Je m’occupe de la promotion de six livres, un travail d’équipe que je dois assumer seule.

F : Au sujet de la couverture du roman, quels ont été vos choix pour la création ? Comment s’est passée l’élaboration de la couverture ? Avez-vous eu votre mot à dire ou pas du tout ?
S. M : J’aime associer les talents.  Je choisis un ami peintre, sculpteur ou photographe pour illustrer la couverture de mes livres.   Sauf pour " La Terre nous dit à Dieu" pour qui,  à y bien réfléchir, je n’ai jamais décidé quoi que ce soit!   ( Rire )

F : Enfin, quels sont vos projets pour l’année à venir, pouvez-vous nous en parler ?
S. M : Trouver du temps pour continuer à écrire le roman qui me brûle la tête ( celle que vous savez tape du pied là-haut sur la montagne).  Continuer les animations mises en route  :  Conférences "L’énergie sauvage de la Femme" autour du livre  " Les louves"   -    Animation de soirées littéraires réunissant des auteurs, des musiciens et des peintres  -  Brunchs littéraires -  Foires du livre -  Recherche d’éditeur pour un nouveau conte pour enfants …

Retrouvez les ouvrages de Silvana Minchella sur le site de son éditeur:http://www.editionschloedeslys.be/

 

Elodie Lemaire

http://limaginaria.wordpress.com/2014/01/19/silvana-minchella/

Publié dans interview

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L'annonciade, de Didier Fond, portraits

Publié le par christine brunet /aloys

L'annonciade

 

Portrait de commerçants du quartier :

 

La Laitière

 

Edith Martin était une jolie femme d’une quarantaine d’années, de petite taille. Sa poitrine émergeait à peine de derrière son comptoir. Ses bras, courts, avaient bien des difficultés à se saisir des fromages relégués au bord de la bande frigorifique et elle était alors obligée de se livrer à de formidables étirements qui lui mettaient les joues en feu et transformaient le simple fait de servir un client en une gymnastique parfois proche des positions les plus invraisemblables du yoga.  Elle avait de beaux cheveux noirs, coiffés à la diable, un visage fin et agréable, une voix douce. Le regard qu’elle posait sur vous, aussi sombre que sa chevelure, se teintait souvent d’étonnement naïf, comme si elle se demandait ce que vous pouviez bien lui vouloir et quelle étrange idée vous avait saisi de venir dans son magasin. Elle est constamment ahurie, disait d’elle Emeline Lemaire, c’est énervant, à la longue. D’autres prétendaient qu’Edith Martin s’endormait derrière son comptoir entre chaque client, ce qui expliquait le fait qu’on avait toujours l’impression de l’arracher au sommeil le plus profond. Avec ça d’une lenteur ! Une vraie traîne-la-grolle ! Vous aviez le temps de prendre racine dans le magasin et de bourgeonner à votre aise avant qu’elle ait fini d’envelopper dans son papier un malheureux fromage. Tout ceci n’était que calomnie. L’air rêveur, un peu extraterrestre, de la laitière était sans doute un de ses plus grands charmes. Et ce n’était qu’un air. Elle était très capable, quand il le fallait, de se déplacer avec célérité et d’expédier les clients en deux temps trois mouvements. Surtout ceux qu’elle n’aimait pas. Les gens du quartier trouvaient qu’elle ressemblait parfois à une folle, mais ce n’était pas grave, au fond. Elle était gentille, aimable –enfin moins désagréable que la boulangère, celle-là, quelle porte de prison ambulante !- et ne rechignait pas à rendre service.

 

Par contre, son gros, son énorme défaut, et là tout le monde était d’accord, c’était sa manie de laisser, été comme hiver, la porte de son magasin grande ouverte. Résultat : de novembre à mars, la laiterie était une véritable glacière qui reflétait avec une constance et une exactitude admirables la température parfois sibérienne du dehors. Fermez donc votre porte, lui disaient régulièrement les clients quand ils la voyaient surgir de son arrière-boutique, matelassée de trois couches de vestes de laine, l’écharpe autour du cou, et les mains frileusement enfoncées dans les poches de sa blouse. Je ne supporte pas l’odeur du fromage et du lait, expliquait-elle en éternuant. Cette incohérence amusait beaucoup le quartier. Pourquoi cette femme, à qui la vue et le parfum d’un morceau de fromage et d’un litre de lait donnaient envie de vomir, avait-elle eu l’idée saugrenue de tenir une laiterie ? C’était à se taper la tête contre les murs. Et naturellement, comme il faisait toujours un froid de canard dans ce magasin, Edith Martin s’enrhumait très vite et passait l’hiver à renifler, à tousser, à éviter de contaminer ses produits et ses clients et à soigner ce qui risquait de dégénérer en bronchite chronique. En conséquence, son nez était-il toujours aussi rouge que celui d’un clown et le mouchoir roulé en boule dans la manche était-il devenu l’accessoire indispensable à toutes ses occupations commerciales, le symbole de la laiterie et de sa propriétaire.

 

 

Didier Fond

fonddetiroir.hautetfort.com

 

 

Publié dans Textes

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Bouchon... Un exercice de style, deux versions pour un même sujet ! Aujourd'hui, version Louis Delville

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

Petites et grandes histoires

 

La Capitale des Gaules

 

 

Connaissez-vous Lyon, une cité bâtie sur un fleuve et une rivière, le Rhône et la Saône. La seconde ville de France, vous diront ses habitants. La troisième, rétorqueront les Marseillais.

 

J'ai de bons amis à Lyon, Monique et Gérard, et pourtant je n'y ai jamais mis les pieds, mais je ne désespère pas d'aller jusque là et de rentrer dans un bouchon lyonnais pour manger une spécialité de la cuisine lyonnaise considérée comme une des meilleures du monde et dont certains restaurants font la réputation.

 

C'est sûrement dans un de ces établissements que je connaîtrai enfin l'origine de l'expression c'est mon petit bouchon que répète souvent Gérard en parlant de sa charmante épouse, car lui ne sait rien de cela, si ce n'est que son père l'utilisait déjà avec sa mère. Peut-être une affaire de famille, donc ! Qui sait ?

 

Cette histoire s'arrêterait là si je n'avais d'autres souvenirs de mes rencontres avec Monique et Gérard. Jugez plutôt…

 

Nous nous retrouvons en Beaujolais pour un week-end consacré à leur anniversaire de mariage : un superbe restaurant, un excellent repas copieusement arrosé et un service prévenant. Une soirée pourtant ternie par un vin suspect. Nul doute, il avait un goût de bouchon. Une bonne nuit nous a fait oublier l'aventure et le lendemain, nous étions prêts pour passer une belle journée. Dans un petit village ensoleillé, où le bouchon doseur de Ricard semble bien mal réglé. Le verre servi est à peine jauni et l'eau ajoutée délaya le tout en un breuvage à la couleur incertaine. Ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Gérard, d'ordinaire si patient - quand on connaît Monique, on a vite compris - exigea que son verre soit remplacé et comme le serveur refusait, Gérard roula sa serviette en bouchon et quitta bruyamment l'établissement en jurant que plus jamais, il n'y remettrait les pieds !

 

Les cours d'eau me rendent toujours nostalgiques. Pendant plus de vingt ans, mes parents ont habité Liège en bord de Meuse et Lyon me laissait une impression triste. Çà et là sur les quais, un pêcheur ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne, un autre se prélassait au soleil et les chalands passaient, poussifs…

 

Quand fut venue l'heure du départ, Monique et Gérard nous donnèrent plein de conseils pour éviter les embouteillages. En effet, Bison futé annonçait des bouchons à l'entrée des grandes villes.

 

Le voyage de retour fut à la mesure des quelques jours passés là-bas, intenses et joyeux. Une belle étape dans les Vosges nous a permis de recharger nos batteries avant de rejoindre Charleroi. Promis on se retrouve l'an prochain pour nos 40 ans de mariage et on allait enfin faire sauter le bouchon ! La champagne ça a du bon aussi !

 

Louis Delville

louis-quenpensez-vous.blogspot.com

delvilletete

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Bouchon... Un exercice de style, deux versions pour un même sujet ! Aujourd'hui, version Micheline Boland

Publié le par christine brunet /aloys

 

Des bleus au coeur

 

BOUCHON

 

Lors de cet atelier d'écriture du 13/1/2014, il était demandé d'inventer une histoire dans laquelle on trouverait dans l'ordre, les termes suivants :

dans un bouchon lyonnais,

c'est mon petit bouchon,

nul doute, il avait un petit goût de bouchon,

bouchon doseur,

roula sa serviette en bouchon,

ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne,

Bison Futé annonçait des bouchons à l'entrée des grandes villes,

on allait enfin faire sauter le bouchon !

 

Les deux textes qui suivent, postés aujourd'hui et demain, ont été écrits par Micheline Boland et Louis Delville en un peu plus de quinze minutes.

 

 

Clara Bouchonnet

 

 

Clara Bouchonnet était ce qu'on appelle une bonne fourchette. C'est un sourire aux lèvres qu'elle poussa la porte de "La salade folle". Entrer ainsi, seule, dans un bouchon lyonnais n'était pas dans ses habitudes, mais l'envie de tester au plus vite la bonne adresse recommandée par sa sœur était si forte !

 

Clara Bouchonnet s'installa à une petite table proche de la vitrine. On lui tendit la carte et elle fixa son choix sur cette fameuse salade maison aux deux saucissons chauds dont sa sœur lui avait vanté l'équilibre des saveurs et sur un beaujolais à la ficelle. Sitôt le vin servi, Clara but machinalement une gorgée. Il était bizarre ce vin ! La curiosité de Clara l'emporta sur la mauvaise impression. Elle était toute ouïe, car à la table voisine la conversation s'envenimait : "Maman, Claude, c'est mon petit bouchon, mon amoureux quoi ! Tu ne me feras pas changer d'avis." Ah ces conflits entre une mère et sa fille ! Clara but une nouvelle gorgée. Nul doute, il avait un goût de bouchon, ce beaujolais. Ça commençait bien : des clientes qui se chamaillaient, un vin qui n'était pas au top ! Clara en voulut un peu à sa sœur.

 

"Tiens je prendrai bien un Ricard en attendant ma salade", se dit Clara. "Lui au moins, il ne sera pas bouchonné !"

 

Sitôt dit, sitôt fait. La commande était passée et Clara observait le barman. Ce n'était pas possible, il y avait sûrement un problème avec le bouchon doseur. Le verre qui lui était destiné ne contenait qu'un tout petit fond d'alcool.

 

Un tout, tout petit Ricard. Ce n'était pas normal. Clara sentit la mauvaise humeur la submerger. Elle n'allait pas se laisser faire !

 

"Garçon, je crois que mon beaujolais est bouchonné."

 

"Hum, je vais le faire goûter par le patron et le remplacer si nécessaire, bien entendu."

 

Clara était furieuse. Comment ce jeune serveur pouvait-il douter de sa bonne foi. Nerveusement, elle roula sa serviette en bouchon, la roula et la déroula, la re-roula et la re-déroula.

 

La fille reprit de plus belle : "Et je ne t'ai pas raconté… Tu sais, Claude adore pêcher, je t'en ai déjà parlé. Eh bien figure-toi qu'il s'est fait voler ses asticots pendant qu'il était au bord de l'Étang des Grenouilles ! Comme tous les pêcheurs, il ne quittait pas des yeux le bouchon de sa ligne. Il n'a rien vu… Et quand il s'est retourné, la boîte à asticots avait disparu. Envolée, la boîte.

 

"Quel sot ! Et il n'a rien vu, rien entendu ?"

 

"Maman, on voit bien que tu n'as jamais pêché. On voit surtout que tu ne l'aimes pas, mon petit bouchon."

 

Entre la mère et la fille le ton montait…

 

Clara prêta alors attention à la radio qui diffusait des infos trafic : "Bison Futé annonçait des bouchons à l'entrée des grandes villes, mais il s'était pour une fois mis le doigt dans l'œil. La circulation est fluide presque partout."

 

De toute façon, Clara Bouchonnet s'en fichait des conseils trafic. Elle ne se déplaçait qu'à pied et en bus !

 

"Maman, il faut que je te dise, Claude et moi, on va se marier. C'est décidé. D'ailleurs, on est sur le point d'acheter une maison et de faire un bébé. Pense qu'on approche tous les deux des trente ans !"

 

Voilà on allait enfin faire sauter le bouchon de champagne ! Tout allait s'arranger entre la mère et la flle…

 

"Madame, Madame…"

 

Clara regarda le serveur : "Effectivement le beaujolais est un peu bouchonné. Le patron a décidé de vous le remplacer."

 

La quantité de Ricard avait beau avoir été minimaliste, Clara était sur un petit nuage, celui créé par les brumes de l'alcool. Elle mangea le pain qui était devant elle, mais cela n'arrangeait pas son état. Elle avait de plus en plus chaud.

 

"Ainsi vous avez décidé de vous marier. Je n'en reviens pas. Toi une fille si rationnelle et Claude, un garçon tellement bohême et nonchalant. C'est pas possible !"

 

Clara revint les pieds sur terre. À côté d'elle, les deux femmes n'étaient toujours pas sur la même longueur d'onde, loin de là !

 

"Madame, je regrette, il ne reste qu'une sorte de saucisson."

 

Le garçon était de nouveau devant elle et Clara avait envie de le secouer. Il ne méritait que ça.

 

Quant à sa sœur, Clara Bouchonnet lui téléphonerait dès qu'elle serait chez elle pour lui dire ses quatre vérités et surtout que ses soi-disant bonnes adresses, elle pouvait dorénavant les garder pour elle.

 

Micheline Boland

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Publié dans Textes

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