Je marche seul sur le fil. Cela fait maintenant trente-trois ans que ça dure. J’avance non pas à l’aide d’un bâton, mais de mes bras. Je n’ai jamais su marcher droit. Je n’arrête pas de zigzaguer. En bas, je vois des créatures. Des créatures horribles, affreuses et épouvantables. Elles n’attendent qu’une seule chose, que je tombe. Il y en a qui sont même dotées d’ailes. Elles ne se privent pas de me déstabiliser. Heureusement, parfois, il y a des colombes, venant de je-ne-sais-où, qui les combattent. Mais hélas, pour moi, elles ne sont pas toujours présentes. Pour tenir, je me répète souvent « Je dois y arriver tout seul. Je dois y arriver tout seul. Je dois y arriver tout seul. » Comme c’est éprouvant. Physiquement, mais surtout mentalement.
Mais ce ne sont pas les créatures du bas dont j’ai le plus peur. Non, il y a quelque chose de pire. De bien pire... la voix. La voix qui se trouve juste derrière moi. Tellement glaciale, tellement effrayante, tellement terrifiante… Je n’ai jamais osé me retourner.
La voix ne crie pas, elle murmure. A cause d’elle, j’ai failli tomber plusieurs fois. J’ai même souvent été à deux doigts de lâcher prise. Cela s'est même joué à un doigt...
Ce qui me fait tenir, c’est la lumière au bout du fil. Quand je la vois, je ressens une petite chaleur m’envahir. Mais j’ai beau avancer, avancer et avancer, elle me parait inatteignable, et donc sans fin. J’espère bientôt l’atteindre, car j’ai l’impression que la fameuse voix m’attrapera bientôt.
En fait, je me demande si elle ne me tient pas déjà…
Voilà, c’était l’été et j’ai vagabondé avec l’auteur dans ses souvenirs, ses maisons, les parfums et mots loin d’être oubliés, le chemin vagabond dans l’enfance.
Sur tous les plans, ce livre est un régal. Les mots qui caracolent, rient et résonnent, en flamand et en français, en comptines et déploiement de sens :
Mais de temps en temps, tu t’emmêles les pinceaux entre péchés véniels et péchés mortels. Surtout la luxure (…). Vivre dans le luxe, c’est un péché capiteux. Le luxe avec un x comme dans le ksss… ksss… du petit diable.
Lundi est là. Alors c’est demain ? Non, c’est aujourd’hui. Mais hier, tu disais demain. Oui mais demain a changé, il a reculé d’un cran. Aujourd’hui, c’est le demain d’hier. Après-demain, c’est le demain de demain qui n’est pas là. Avant-hier, c’est le hier d’hier qui n’est pas là non plus.
Ils se cassent bras et jambes, et le cou alouette, et l’épaule alouette, aaaaah… mais rien ne les arrête, gentille alouette.
Les odeurs merveilleuses que l’auteur ramène à la vie :
Saint Joseph se confond pour toi avec l’oncle Joseph qui a épousé tante Marie. Les Joseph laissent derrière eux une senteur de copeaux de bois (…).
Grandmont, c’est le parfum discret du tilleul qu’on récolte au début de l’été.
Selon les jours, la vaste cuisine sent bon les pommes à la cannelle ou le pâté de lièvre.
Les maisons de l’enfance, avec leurs habitants, idiomes et décors respectifs. On a les deux couples de grands-parents et un « troisième », le grand-oncle et la grand-tante, frère et sœur restés célibataires. Il y a les parents. Les cousins, et les jeux et sottises que permettent une famille nombreuse. Les importantes questions et réflexions des premières années, avec la logique soignée des petits êtres en devenir que l’on nomme « enfants ».
On ne peut que remercier l’auteur d’avoir si généreusement partagé ses souvenirs avec nous, car bien souvent ils sont aussi les nôtres : les comptines, les expressions, les premiers pas à l’école, les étonnements devant les autres habitudes, la pure joie d’être en vie et l’amour infini pour certains lieux dans lesquels on retourne vagabonder pour rajeunir encore une fois, et puis une autre fois…
Bien que je lui prouve tous les jours ma sagesse !
Ma biographie
L’écriture d’histoire a commencé vers 4/5 ans lorsque je lisais tout types de contes et d’histoires, je me mettais à imaginer des suites, ma mère validait mes scénarios, puis je me mettrais à écrire. Pendant l’adolescence, je me suis naturellement mis à la poésie, mais je trouvais mes écrits trop mièvres et j’ai tout jeté. La déception était grande, je me suis éloigné de l’écriture pendant de nombreuses années, jusqu’à la découverte d’un stage pour le scénario. Ce fut une révélation : l’écriture était une discipline viscérale pour moi.
Je m’inscrivis aux ateliers d’écriture hebdomadaire chez « Aleph Ecriture » qui s’effectuent sur un cycle de deux ans. J’étais à la recherche d’un style littéraire que je parvins à trouver la première année mais je voulais surtout confronter mes écrits à un auditoire, pour plus d’ouverture face à la critique afin que mes écrits deviennent meilleurs.
La deuxième année m’apprit à plus de rigueur vis-à-vis de l’écriture notamment avec la réécriture des textes en vue de l’élaboration des objets littéraires, et j’ai eu la chance de participer à l’atelier « scénario » animé par Jean Paul Jody, romancier et scénariste.
Un second séminaire, axé cette fois ci sur les genres que sont le thriller, la comédie et l’histoire d’amour est apparu. Quelques jours après, je participai à une autre formation de trois jours chez Aleph Ecriture sur la construction d’une fiction.
Une année, j’appris l’existence du réalisme magique, puis j’étudiai quelques mois plus tard les rudiments nécessaires à la construction d’un roman, et l’écriture pour la jeunesse.
Enfin, dès mon arrivée à Bordeaux, j’ai effectué pendant un temps, un atelier d’écriture individuel avant de trouver cette idée de récit.
Un résumé de mon livre
Un homme est réveillé brusquement. Son amoureuse en colère le soupçonne d’infidélité. Il lui prouve chaque fois sa fidélité mais rien n’y fait, elle doute toujours. Elle décide de le chasser de sa propre maison et l’interdit de la revoir. Il peine à se réveiller correctement et décide de se promener. Il croise une femme dans la rue qui symbolise son idéal. Il est paralysé.
Quelques années plus tard, il retrouve par hasard cette femme dans un port, un dimanche. Il décide cette fois ci de l’aborder puisqu’il n’est plus avec son amoureuse. Mais il n’y arrive pas.
Il rumine sans cesse cette femme, puis elle finit par s’incruster dans toutes ses pensées. Son quotidien est difficile car il a des absences, il rêve à un niveau pathologique. Il craint la nuit, n’arrive pas à dormir malgré ses nuits agitées et ses insomnies et il ne peut vivre convenablement lors de ses journées.
Depuis la tentative ratée, il ne cesse d’aller tous les dimanches au port pour voir à nouveau cette belle femme. Mais il est très affaibli, reste des journées entières à l’attendre sans tenter la moindre autre chose et un soir, il s’effondre.
Il décide de partir en voyage afin de trouver des solutions… il finit par trouver une nouvelle passion. Mais peut être que tout ceci n’est qu’un long rêve mouvementé…
« Ainsi, je devins un vampire », le dernier roman de Joe Valeska est aussi le premier imaginé par l’auteur. Inspiré par le travail d’Ann Rice, dont il est grand admirateur, il s’est lancé dans la rédaction de ce roman bien avant que naisse Julian Kolovos, le héros de sa trilogie « Meurtres surnaturels ». C’est pourtant dans cette dernière et plus particulièrement dans « Le triomphe de Julian Kolovos », que l’auteur a eu l’habileté de nous présenter celui dont il allait, enfin, nous livrer le destin.
Et si Joe Valeska a longtemps et jalousement gardé cette histoire au fond de son tiroir, c’est sans doute parce qu’il y avait mis beaucoup de lui-même.
Bien que le roman commence dans le Paris moderne, entre un vampire et une célèbre journaliste, l’histoire est celle de Virgile Delecroix, né en 1739 à Marvejol dans le Gévaudan, un enfant espiègle devenu un jeune homme fringant ne rêvant que de liberté et des ors de Versailles. Fils de fermier, son amour pour sa mère et son petit frère n’a d’égal que sa détestation pour un père brutal et terre à terre qu’il ne peut s’empêcher de défier. Et puis il y a Chloé et Théo…
Mais le Gévaudan c’est aussi le terrain de chasse de la bête et alors que les drames se succèdent et que l’horreur s’abat sur Virgile, une vampire va à jamais changer le destin du jeune homme. Ce personnage, d’une malfaisance inouïe, est également le pivot de tout le roman, celui par qui tout arrive.
Il y a beaucoup d’émotion dans ce roman, car beaucoup d’émotions agitent l’âme de Virgile. Amour, colère, culpabilité… le personnage est à fleur de peau, marqué par la mort de son petit frère et son incapacité à le protéger, accablé par la tristesse lorsqu’il songe à sa mère, à Chloé, à Théo ; hanté par la quête du père, qui prend fin avec l’arrivée de Benjamin et recommence quand ce dernier disparaît. Enfin, il y a cet insatiable besoin de punir la cruauté.
Avec cet opus, Virgile Delecroix trouve tout naturellement sa place dans l’univers bit-lit de Joe Valeska, qui met en place, pour le plus grand plaisir du lecteur, de nouveaux personnages ‒ dont certains ne manqueront pas de vous surprendre ‒, de nouveaux périls, de nouvelles situations inquiétantes, prémices à une suite que, je suis sûre, les amateurs attendent déjà avec impatience.
Comment donc chroniquer un récit si luxuriant, si riche et varié en anecdotes, paysages, personnages, nourriture ou animaux sans en trahir la narratrice ?
Dans ce foisonnement, j’ai choisi de sélectionner ce qui m’a le plus marquée, impressionnée, émue ou fait sourire. J’ai fait ce choix sans suivre la chronologie de l’auteur mais bien le plaisir de ma lecture.
On visite Montclair et sa colline d’iris, l’’île de Manhattan où se mêlent toutes les parties du monde, de Little Italy à Chinatown, les campus de Yale ou Princeton, la jolie petite ville de Woodstock, ses boutiques artisanales et ses tomates bio.
On flâne lors des promenades-maisons dans les beaux et les moins beaux quartiers.
« Il n’est pas rare de voir une maison dont le côté fait face à la rue, ce qui lui donne l’air d’un train ou d’une roulotte mal garé. Le manque d’appuis de fenêtres donne un aspect plat et frêle qui correspond à la réalité. »
On se balade encore. « Seule pour la plupart du temps, j’aimais me promener sur la route déserte qui s’enfonçait loin dans le rien entre les collines, une heure dans un sens, et le retour. »
On s’arrête au bord des routes « des stops peu diététiques dans les ‘diners’ pour se remplir l’estomac de crêpes au sirop, café et jus d’orange, le tout servi par des dames en tablier de nylon rose mâchant du chewing gum, un bic enfoncé dans la laque des cheveux qui nous appelaient Honey et Sweetie. »
On déguste les tortillas d’Angel, les pupusas chaudes du matin d’Antonio, le gâteau au chocolat indigeste d’une vieille indienne « mais fait avec le cœur, ingrédient de choix… ». Bien sûr, la dinde de Thanksgiving, juteuse et rondelette, le hominy, une préparation de maïs dégustée lors d’un repas cherokee, le homard de Mystic au fumet et à la texture mémorables.
On s’égare dans les allées-avenues des supermarchés où on trouve peu de produits frais. « Le rayon de légumes et fruits, c’était le rayon du compost : plants de céleri jaunes, raisins moisis, tomates effondrées, pêches frémissantes sous les moucherons heureux… et le tout désespérément insipide. »
Lola, Simone, Gastonne et Clara m’ont séduite avec leurs grandes et belles plumes rayées, dindes chéries accompagnées de dindons sauvages qui mettaient à mal pelouses et parterres de fleurs.
Les chats du matin en attente de caresses et de leurs chansons m’ont bien fait rire.
Puis, on croise mille personnes. Les amis, les voisins, la famille.
Les clients de l’imprimerie-photocopie, la surprenante et enjouée Cindy, Clément au rire communicatif, Theresa, une sans abri, Mohammed, un Afghan magnifique, « deux mètres et 120 kgs de gentillesse », Susan, « une white trash enjouée qui avait des dents de murène d’une couleur peu proche du blanc » d’autres affublés d’un surnom , le Croque(mort), l’Avocate.
Et les Indiens, nomades splendides sur la grande route des pow wows dans une ambiance douce, calme et respectueuse. Ils se déplacent d’Etat en Etat se lançant dans des joutes pacifiques de danse, de tambour ou de costume. « Les pow wows bénis par un temps clément sont les mieux réussis parce que le son des tambours n’y rebondit pas sur des murs nus, s’élançant au contraire dans la beauté du monde, sans que rien ne le retienne. Les odeurs de pain indien frit, ragoût d’élan, tacos, riz sauvage avec bison se rencontrent avec bonheur. »
Je m’arrête ici dans la présentation de ce récit, prospère tranche de vie, que je vous invite à découvrir avec le même ravissement que moi.
Une fois de plus, j'avais dit non et comme d'habitude, j'en éprouvais une certaine fierté. Depuis l'enfance, je trouvais toujours un bon prétexte pour échapper à une corvée. Dresser la table, ranger, cirer les chaussures de la famille, ce n'était pas pour moi ! En tant qu'aîné, n'avais-je pas mieux à faire : lire, contrôler un devoir, préparer un exposé ou simplement rêver.
À trente ans, il était rare que quelqu'un ose encore me demander un service. Aujourd'hui, n'ai-je pas refusé de rester plus tard à l'agence pour remplacer une collègue dont le père se meurt ? J'ai prétexté que je devais reprendre mon neveu à l'école, ce qui est faux évidemment.
En m'arrêtant devant le miroir des toilettes je n'ai vu que le mur derrière moi. Je me suis déplacé, me suis mis sur la pointe des pieds, en vain ! J'ai entendu distinctement le miroir qui m'a dit : "Nul n'est aidé par toi. Pourquoi ferais-je autrement ?"
Le lendemain, mon réveil a fait grève lui aussi, puis ce fut le tour de mon GPS ! Et j'ai donc raté un rendez-vous important.
Et si les objets refusaient dorénavant de m'aider ?
- Fidèle ! Tu parles que tu m'as toujours été fidèle ! Et la jolie secrétaire aux jupes trop courtes, on en parle?
- Ah...oui...bah, c'était juste une incartade, un petit coup de canif dans le contrat...
- Des coups de canif, on peut dire que tu en as donné pendant nos 40 années de vie commune !
- Pas tant que ça, je t'assure...
- Ce n'est pas parce que je n'ai rien dit que je n'ai pas remarqué tes aventures. Elles sont toutes notées là, dans ce carnet !
- Mais...tu exagères ! Il ne peut pas y en avoir tant que ça !
- Regarde, je les ai toutes notées par ordre alphabétique !
- Angélique, je l'avais oubliée, celle-là. Bon, là, c'est normal, tu venais d'accoucher de Renaud et je me sentais bien seul...
- Bien sûr. J'étais à l'hôpital, je me remettais doucement de ma césarienne et toi, tu étais tout seul dans ton lit tout froid... Et tu te trompes, ce n'était pas la première, mais la troisième ! Avant elle, il y a eu Angélina, la belle Italienne et Natacha, la Russe. Toutes, je les connais toutes, je te dis. Elles sont toutes là, enfermées dans mon carnet !
- T'es sûre de toi parce que moi, je ne me souviens pas de ces deux-là !
- L'Italienne, tu te l'es tapée pendant que j'étais partie en classe de mer avec mes élèves et la Russe, c'était quand mon père est mort et que je tenais compagnie à maman.
- Si tu le dis...
- C'est comme ça ! Tout est là ! Tu ne peux pas nier. A chaque fois que tu t'es retrouvé seul, tu m'as remplacé par une blonde, une brune ou une rousse dans notre lit !
- C'est un peu ta faute...
- Quoi?
- Ben, fallait pas me laisser seul ! Tu sais bien que je ne supporte pas la solitude !
- T'aurais pas pu aller boire un verre avec un de tes potes au lieu de te taper une midinette?
- Ça aurait été beaucoup moins gai...
- Je te l'accorde...
- Et toi, tu m'as toujours été fidèle sans doute !
- Evidemment ! Pendant nos 40 longues années de mariage, je n'ai jamais regardé quelqu'un d'autre que toi !
- Tu as eu tort...
- Quoi? Tu vas me reprocher de t'avoir été fidèle?
- Ben, ça aurait peut-être mis un peu de piment dans notre vie...
- Tu me dégoutes ! Et tu sais quoi? Depuis 6 mois, je fréquente un homme beaucoup plus beau et beaucoup plus jeune que toi ! Je te quitte, Victor. Je pars. Vincent m'attend là, sur le trottoir...
- Tu ne vas quand même pas encore me laisser seul? Tu sais que je n'aime pas la...
- Mais, je m'en fous, Victor ! Et comme je suis gentille, je te laisse mon carnet. Il n'est pas plein, tu pourras le remplir à ta convenance... Adieu !
La porte claque, Anna est partie. Victor est seul avec toutes ses conquêtes inscrites dans ce fameux carnet ! Oui, c'est vrai, il y a encore quelques places...